LES 20 ANS DU TITRE DES GOTHIQUES – Antoine Mindjimba : « On n’était pas les favoris mais la magie du groupe a opéré »

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Au printemps 2004, des milliers de personnes se retrouvaient à l’Hôtel de Ville d’Amiens pour célébrer ce qui reste aujourd’hui, le dernier titre de champion de France des Gothiques. Une finale en aller-retour face aux Bruleurs de Loups de Grenoble. Nous nous sommes replongés, 20 ans après, dans ces souvenirs aux côtés des acteurs de cette réussite. Une dizaine d’anciens Gothiques ont répondu à notre demande, aujourd’hui, rencontre avec le gardien emblématique de cette aventure, Antoine Mindjimba.

Vous êtes l’un des rares joueurs à avoir gagné les deux titres de champions de France d’Amiens en 1999 et 2004. Quel est votre regard sur ces souvenirs après toutes ces années ?
1999, ça reste sans doute le titre qui m’a le plus marqué. J’ai eu quatre titres de champion de France dans ma vie, deux avec Saint-Gervais (1985 et 1986, ndlr) et après, deux avec Amiens. Ce qui a été intéressant avec Amiens, c’est que j’ai joué douze saisons avec les Gothiques et on a été six fois finalistes durant cette période. Si le titre de 1999 est si particulier, c’est parce qu’on avait été en finale en 1997, en 1998, c’était unique ! Gagner ce titre, c’était bien, mais on l’a gagné dans un contexte particulier, c’est-à-dire que l’équipe était vraiment au top. Faire trois finales consécutives et gagner ce titre, qui n’était pas seulement la fin du chapitre de ces deux finales perdues d’affilée, mais qui était en plus le premier titre.

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Je pense que ce qu’il y a d’intéressant dans l’histoire des Gothiques, c’est qu’il y a un passé qui est extraordinaire, je pense sincèrement qu’il l’est. Quand je suis arrivé aux Gothiques en 1994, j’ai vraiment eu la sensation que je faisais partie d’une culture et d’une histoire et que j’étais de passage. J’héritais des anciens, que ce soit les Waroquet, les Petit, les Malletroit. Mon devoir, c’était de continuer à bâtir et de passer la main à une autre génération qui allait continuer à construire.

Le titre de 2004 a aussi une saveur particulière parce que l’équipe n’était pas la même. En 1999, c’était une équipe avec beaucoup de renforts étrangers, c’était une équipe exceptionnelle en termes de qualité de joueurs. Et puis 2004, c’était une équipe qui était essentiellement constituée de jeunes joueurs français, c’était une autre histoire. Faire partie d’un groupe, qui avait fondamentalement changé avec essentiellement des joueurs nationaux formés en France, et être capable d’aller chercher un autre titre, parce qu’en toute honnêteté on n’était pas favori, c’était aussi une histoire particulière.

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Cette équipe essentiellement composée de joueurs français, c’était le pari de Reims dans les années 2000, qu’Amiens a su concrétiser une nouvelle fois en 2004…
C’était très intéressant de se dire qu’on est allé chercher des joueurs français avec une bonne dose de jeunes talentueux, de joueurs en milieu de carrière très solide et d’anciens avec beaucoup d’expérience. Finalement, on a été capable de reproduire un modèle qui avait fonctionné en 99, mais qui était un modèle construit à partir de joueurs français.

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Anthony Mortas évoque, dans une autre interview, votre rôle de leader dans l’équipe, « un capitaine à votre manière » si l’on reprend ses mots. C’était ce rôle que vous vous étiez donné en tant qu’ancien de l’équipe ?
C’était clair dans ma tête que j’avais appris au cours des années que je serais capable d’apporter autre chose à l’équipe que de simples compétences techniques et des talents de gardien. J’avais acquis une maturité, j’avais compris ce qu’était une équipe qui gagne, qui n’était pas simplement faite de talents. J’étais capable d’aller encourager, diriger, rassurer et d’avoir les bons comportements qui étaient à la fois, utiliser l’agressivité pour aller rameuter les troupes et dans d’autres moments, être d’un calme olympien pour asseoir une certaine sérénité lorsque l’équipe était dans une zone de panique. Sur cette deuxième moitié de carrière et sur ce titre, c’est vraiment quelque chose que j’utilisais de manière délibérée et réfléchie, parce que j’avais pris conscience de l’impact que j’avais sur le groupe.

Tout le monde était à sa place, tout le monde connaissait son rôle et ses responsabilités, les égos étaient mis de côté, les individualités s’étaient mises au service du groupe.

Antoine Mindjimba, ex-gardien des Gothiques d’Amiens
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Antoine Mindjimba dans le vestiaire de la patinoire Pole Sud après la victoire face à Grenoble en finale.

Nous évoquons beaucoup la formule 2003/2004, composée de deux parties de saison et d’une finale aller-retour, dans cette série d’articles. Étais-ce quelque chose de spécial pour vous ?
Oui et non. Quand on est sur la glace, on ne réfléchit pas tellement à la complexité du modèle qui est utilisé pour définir la finale. Quand vous êtes sur la glace, vous avez une mission, c’est de gagner. Le sport c’est assez simple, celui qui gagne le plus de matchs a de fortes chances d’être le champion. Je n’ai pas vraiment des souvenirs de modèles mais plutôt des sensations, de la mission qui était la nôtre, du groupe, de la cohésion. Ce dont je me souviens en 2004, c’est qu’on n’était pas les favoris mais la magie du groupe a opéré et on est vraiment monté en puissance. Tout le monde était à sa place, tout le monde connaissait son rôle et ses responsabilités, les égos étaient mis de côté, les individualités s’étaient mises au service du groupe. C’est vraiment ces sensations là qu’il me reste, avec des joueurs extrêmement talentueux comme François Rozenthal qui était un génie sur la glace, et qui avait été capable de mettre tout son talent au service du groupe et sans aucun égo, et ça on peut le dire de tous les joueurs.

Vous parliez de sensation et j’aimerais rebondir là-dessus. Vous avez soulevé quatre Coupes Magnus, est-ce que ces sensations étaient les mêmes à chaque fois ?
C’est différent parce qu’on évolue. J’avais gagné mon premier titre de champion de France à 16 ans et le dernier, j’avais 36 ans. On est peut-être un joueur de hockey sur glace mais fondamentalement, on n’est plus le même vingt ans après. Le problème de gagner si tôt dans sa carrière c’est que ça devient évident, on se dit : « Bah bien sûr que je suis champion, je suis le meilleur, c’est normal » même si après ça met vingt ans à avoir un deuxième titre (rires). Comme je l’ai dit, le premier je l’ai eu très jeune et je pensais que ça m’arriverait tous les ans, le regret que je peux avoir sur mes premiers titres avant Amiens, c’est que je n’ai pas réellement savouré l’exploit. En 2004, il y avait tout de même la fierté de se retrouver leader en plus de ce côté patriote. Il y avait une fierté de se dire qu’on pouvait gagner dans un championnat très relevé avec des talents français.

J’espère que les équipes d’Amiens de 1999 et 2004 ont été capables de donner un petit peu d’espoir et de confiance aux jeunes joueurs et joueuses français(es).

Antoine Mindjimba, ex-gardien des Gothiques d’Amiens
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Quel est votre rapport au hockey actuellement ?
Pour être totalement honnête, résidant au Canada, l’essentiel du sport que je suis c’est la NHL. Le hockey est présent sur toutes les chaînes au pays. J’ai l’occasion d’aller voir des matchs de NHL à Montréal ou à Toronto, plusieurs fois par an voire plusieurs fois par mois. Je suis évidemment les beaux parcours de Français qui arrivent à ce niveau et je suis particulièrement fier de voir les jeunes joueuses françaises dans les meilleurs championnats. Pour ce qui est de la France, je dois avouer que je suis assez peu même si je suis toujours à un clic du site des Gothiques.

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Le dernier rempart de cette équipe championne de France, aux côtés du trophée Magnus.

Que devenez-vous, 17 ans après votre dernier match au Coliseum ?
Depuis, je suis dans un cabinet d’audit financier et de conseil qui se nomme Ernst & Young. Cette transition a été effrayante et à la fois excitante. J’ai plusieurs casquettes, je suis responsable practice à Montréal, co-responsable practice à Toronto et j’ai maintenant un rôle global en tant que responsable sur l’offre de service sur les transformations culturelles et l’inclusion. Je pense que je suis toujours un athlète dans ma tête, avec cette discipline physique et intellectuelle que le sport de haut niveau m’a appris. Si je dois résumer, j’aide les entreprises à comprendre et à optimiser l’élément humain dans leurs performances en tant qu’organisation.

Propos recueillis par Kevin Devigne

Crédit photo : Léandre Leber – Gazettesports.fr

Voici la suite des interviews :

Richard Aimonetto : « On était tous des gagnants, on n’acceptait pas la défaite »

Luc Chauvel : « On voulait absolument ce titre, c’était notre moment »

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Julien Lefranc : « Chacun dans l’équipe avait un rôle qu’il a su mettre au profit du collectif »

Simon Petit : « C’était sympa d’avoir été au bout avec cette équipe »

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