Durant la 1ère guerre mondiale, les soldats n’avaient pas vraiment d’activité durant leur temps libre. C’est à cette époque que la pratique sportive s’est développée en France.
C’est franchement dommage que pour cette remarquable conférence de Michel Merckel à Albert, consacrée au sport pendant la Première guerre mondiale et ses conséquences, il n’y eut quasiment pas de représentants du monde sportif. À un an des Jeux Olympiques de Paris, il semble que pour beaucoup, les enjeux ne soient pas forcément sportifs mais économiques. Nous le regrettons bien sûr mais à partir de cette soirée, organisée par l’Office de Tourisme du Pays du Coquelicot et Somme Tourisme, nous allons tenter de souligner que c’est au cours de la guerre de 1914-18 que le sport a vraiment pris son essor.
Michel Merckel est revenu sur ce quotidien dans les tranchées et évidemment, durant la célèbre bataille de la Somme. Avec cette phrase magnifique : « Le sport est vecteur de la paix. » Une expression qui devrait être appliquée aux politiques actuelles, avec notamment le débat qui a trait à la participation des athlètes russes aux prochains Jeux de Paris.
En effet, dans les tranchées qui s’étalent dès 1916 sur 750 km, de jeunes Français vont vivre de nombreux mois et n’auront à vrai dire que le sport pour passer le temps. Il n’y avait en effet pas trente-six moyens de pouvoir passer son temps. Les soldats écrivaient beaucoup à leurs familles mais ils faisaient surtout du sport et quasiment toutes les disciplines étaient pratiquées.
À cette époque, le sport était déjà présent et le Baron Pierre de Coubertin avait rénové les Jeux Olympiques à Athènes en 1896 ; la Coupe de France de football avait vu le jour et en cyclisme par exemple le Tour de France avait déjà connu de belles éditions depuis 1903. Mais durant cette longue période vécue dans les tranchées, la vie était toute différente et surtout très pénible, tant physiquement que moralement.
La Grande Guerre ouvrit la voie au sport féminin…
Quand la guerre éclate , on estime que seulement 1% des Français pratiquent une activité sportive. Dans les tranchées, alors qu’un certain Henri Barbusse écrit : « Nous sommes devenus des machines à attendre », le sport est plus qu’un dérivatif. « C’est un formidable délassement que de pouvoir jouer au foot », écrit un soldat. Des compétitions sont organisées et on verra même un soir de Noël une rencontre de football opposant des soldats français à des Allemands. Une scène incroyable mais vraie, qui inspira à Christian Carion, en 2005, le film Joyeux Noël ! Mais, au niveau des officiers, on n’apprécia pas du tout et des sanctions furent prises.
Le sport fait du bien non seulement au corps mais aussi à la tête et c’est à cette période qu’on constate que le sportif n’a pas que des jambes et des bras mais aussi un cerveau. Faire du sport permet d’oublier le cafard et cela fait du bien de plaquer, dans un match de rugby, son copain de tranchée. Michel Merckel précise alors que le sport n’est pratiqué que dans les tranchées de la Somme car dès 1916 avec Verdun, la guerre prend une autre tournure. « À Verdun, on vit et on meurt mais on ne fait pas de sport » souligne l’orateur.
Des journaux sont alors publiés et ils évoquent les rencontres de sports. Le sport permet de développer un véritable esprit de groupe, le respect des autres et il prend dès lors une autre dimension. Dans un premier temps, ces rencontres entre soldats ne concernent que les Français mais peu à peu, viennent se joindre les Anglais, Ecossais, Néo-Zélandais etc. Les soldats français se mettent à boire du thé. Une révolution. Quand un soldat remporte une épreuve, il obtient une récompense inespérée : une permission !
En 1919, après l’Armistice, le sport prend son envol en France et avant les Jeux Olympiques d’Anvers en 1920, sont organisés les Jeux Inter-Alliés à Paris, au stade Pershing, où plus tard sera érigé l’INSEP. Ces Jeux militaires obtiennent un immense succès populaire. Seuls les soldats participent à cette compétition qui sera suivie d’une réservée aux mutilés de la guerre, une sorte de Jeux Paralympiques avant l’heure. Le sport est un formidable élément pour la rééducation des Poilus blessés.
Après la guerre, la femme trouve sa place dans le sport car avant 1914, toute discipline sportive était interdite aux femmes. Fin 1917 est organisé le premier match féminin de football et une course dite des « Midinettes » réunit 2500 femmes qui vont effectuer 12 km entre Paris et Nanterre. Le sport vient de faire son entrée dans la vie quotidienne des Français et on se dit que cette guerre est bien la dernière…
Lionel Herbet
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