Après une saison où le doute aura longuement entouré l’avenir de Mario Richer et celui de son adjoint Anthony Mortas, le club a finalement décidé de confirmer son plan initial en nommant le second cité à la tête de l’équipe. Retour sur 10 mois où les choses n’auront pas toujours été claires.
Le scénario
D’abord il y a une conférence de presse, convoquée par le club fin mars 2019, pendant laquelle il était annoncé la prolongation du duo Richer-Mortas pour une saison, et qu’à l’issue de celle-ci, Anthony Mortas prendrait la tête de l’équipe en tant que head-coach. Le principal concerné déclarait d’ailleurs à l’époque : « C’est une reconnaissance. Ça changera un petit peu mon rôle, mais j’ai quand même l’impression de déjà entraîner l’équipe depuis trois saisons. Avec Mario, on est un binôme». Mario Richer, lui, approuvait alors cette décision et le disait avec des mots bien à lui : « C’est comme un accord, j’ai accepté le contrat d’un an, et je suis très heureux qu’Anthony soit là pour la ou les prochaines années. Donc c’est un peu comme si j’avais un cancer et que dans un an, je devais vous quitter, et en même temps, on va voir la naissance, d’ici un an du nouveau coach.»
À l’époque les choses semblaient alors claires : le duo de coach Richer-Mortas faisait une dernière saison en binome, avant que le second nommé ne devienne le head coach pour 2020-2021.
Acte 1 : L’ombre d’un doute
Quelques mois plus tard, en septembre, c’est donc avec un binome d’entraîneurs reconduit pour une saison que les Gothiques commençaient un nouvel exercice. Les résultats étaient alors au rendez-vous et après 16 rencontres, les Amiénois comptaient déjà 35 points. L’envie de voir le binôme poursuivre l’aventure naissait alors chez les supporters qui reprenaient même espoir lorsque Paul Lhotellier, président du club des bâtisseurs, déclarait successivement au JDA (le 13 novembre 2019) : « C’est une figure à qui l’on doit quatre saisons extraordinaires. On aimerait bien que ça continue. On verra« , puis au Courrier Picard (le 21 novembre 2019) : « On n’est pas aveugles on voit l’excellent travail du duo Mario – Anthony. Aujourd’hui on serait cons (sic) de saboter cela. On est donc ouverts à ce qui se passe. On est donc un peu pris entre ça et la stratégie envisagée depuis 4 ans. » Quoi qu’il en soit, après des mois de septembre, octobre et novembre de très haute facture, et des déclarations de la direction qui semblaient ouvrir la porte à une possible continuité du duo, le doute paraissait de nouveau entourer le plan initial prévu pour 2020-2021.
Pour autant, Paul Lhotellier nuance aujourd’hui ses propos de l’époque : « L’interrogation n’a jamais été sur le plan, dès l’année dernière c’était prévu qu’Anthony reprenne le manche. On ne s’est pas privés de s’interroger sur le bon calendrier, sur le meilleur calendrier, c’était juste ça notre variable d’ajustement, notre programme restait absolument rigide et établi. »
Acte 2 : Flou et soutien populaire
Venait ensuite une interview de Mario Richer, le 23 janvier dernier, dans laquelle le coach amiénois affirmait : « Mon CV a été envoyé un peu partout depuis début janvier, depuis que l’on est rentré dans l’année 2020. Donc je l’ai envoyé à différents endroits et il y a un début de négociations avec certaines équipes. Aucune offre n’a été soumise par Amiens. » S’ensuivaient alors quelques jours de latences, durant lesquels le duo Richer-Mortas bénéficiait d’un véritable soutien populaire marqué notamment par des matchs au Coliseum où le public, debout, scandait les noms des coachs amiénois.
Après cette légère période de flou, où les dirigeants avaient notamment vu le Kop des Goth’s Squad faire une grève des applaudissements, Paul Lhotellier prenait finalement la parole au soir de la rencontre face à Grenoble (28 janvier) : « On a bien entendu les messages qui nous venaient de la part du public et que vous avez relayés dans la presse. » Une conférence de presse durant laquelle il déclarait : « On a aujourd’hui un tandem qui est pour moi extra, on aimerait pouvoir le garder mais pas à n’importe quelle condition », tout en affirmant : « On reste exactement sur notre plan de match que l’on avait établi depuis déjà quelques saisons avec une volonté de rester sur notre ligne. »
Acte 3 : Décision finale et regrets
Le suspens prenait finalement fin le 5 février dernier, lorsque le club annonçait via un communiqué : « Après avoir reçu les deux coachs en entretien, l’AHE est heureux de vous confirmer la nomination d’Anthony Mortas au poste de Head Coach pour la saison 2020/2021. »
Si les choses avaient été annoncées il y a près d’un an, Mario Richer lachaît tout de même : « Depuis avril l’an passé je savais que je ne revenais pas, sauf que malgré ce qu’il s’est passé avec les partisans, il n’y a pas eu de discussion, il n’y a rien eu… Il n’y a même pas eu d’offre, je n’ai même pas fait d’offre. » Une absence de négociations confirmée par Paul Lhotellier : « On est restés sur ce que j’avais dit et annoncé clairement, à savoir : on consulte les acteurs, Mario, Anthony, et on regarde le meilleur calendrier en sachant que l’atterrissage était certain. Il n’y a pas eu de négociations avec Mario, ce n’est pas un échec de négociation, c’est un succès de convergence pour faire en sorte que ça soit le bon tempo. »
Il y avait encore quelque chose à faire, ça aurait été bien...
Mario Richer
Une décision finale qui laissait cependant quelques regrets à Mario Richer : « J’aurais aimé rester, c’est sûr que l’on a un bon groupe d’hockeyeurs, on a de bons partisans. Il y a de quoi bien faire, il y a une bonne base de joueurs qui sont là depuis plusieurs années, qui veulent le bien de l’équipe, qui ont montré depuis plusieurs années qu’ils aimaient être à Amiens, qu’ils aimaient la ville et les partisans, il y avait encore quelque chose à faire, ça aurait été bien… » Pour autant, l’entraîneur samarien lâchait tout de même : « J’ai eu une liberté pendant trois ans, et là cette année ce n’était plus le cas. » L’occasion pour lui de souhaiter bonne chance à son successeur tout en mettant une certaine pression sur le club : « Je pense qu’Anthony va faire un bon boulot, je n’ai même pas de crainte, il faut qu’il soit bien entouré, qu’on le laisse travailler comme il veut, et non comme on essaie présentement de lui imposer des gens... »
Une affirmation nuancée par Paul Lhotellier : « Les décisions de ce qu’il se passe sur la glace, ce sont évidemment les coachs qui vont les prendre et ils seront à la tête de la formation de leur équipe. »
Épilogue
D’ici peu et après quatre années de collaboration, les chemins des Gothiques AHE et de Mario Richer vont donc se séparer. La construction du club va se poursuivre comme nous l’affirmait le président du club des bâtisseurs : « L’ambition est de faire un club. Un club ce sont des juniors, une U20 qui tourne, un lien fort entre les juniors et les pros, ce sont des petits minots de 3 ans qui viennent patiner, des partenaires, des supporters, des sponsors et des dirigeants qui disent ce qu’ils font et ensuite font ce qu’ils disent. Et pour moi c’est ça qu’il faut continuer à bâtir. Après il y a des ambitions sportives, c’est être dans le TOP quelque chose de la Magnus, bien sûr, au mieux de nos capacités financières » tout en apportant une certaine mesure : « Notre pérennité dépend aussi des sous et aujourd’hui nous sommes encore convalescents et nous ne sommes pas encore arrivés au bout de notre équation économique. »
Paul Lhotellier tenait ensuite à souligner l’importance du travail effectué par l’actuel coach des Gothiques : « Il sera bientôt temps de remercier comme il se doit notre super champion de coach Mario, c’est bien important pour nous de rendre hommage à ce boulot que Mario a fait qui était un vrai travail de pérennité et de succession. » Sans réponse actuellement sur son avenir, Mario Richer lâchait lui avec philosophie : « J’avance sur l’autoroute et je ne sais pas quelle sortie je vais prendre… Où je vais aller l’an prochain ? Je ne sais pas, je n’ai pas de contrat à vie. Je n’ai pas de CDI, c’est un CDD, c’est comme cela que ça fonctionne. J’ai fait ce choix dans la vie d’être entraîneur de hockey, j’aurais pu être professeur de sport dans une école et être à ma retraite dans 5 ans... »
Quoi qu’il en soit, alors que les Gothiques vivent leurs derniers moments sous l’égide du duo Richer-Mortas, il leur reste encore de beaux défis à relever avec une finale de coupe de France face à Rouen, puis des quarts de finale de play-offs. Viendra ensuite le temps des adieux à Mario Richer et de la succession pour Anhtony Mortas.
Propos recueillis par Quentin Ducrocq
Crédits photos Kevin Devigne/ Leandre Leber Gazettesports.fr