Aujourd’hui, Gazettesports vous propose la seconde partie de l’entretien avec la famille Sellier, dans laquelle Arnaud et Jean-Robert évoquent notamment l’avenir du bénévolat mais aussi, le travail de l’ombre réalisé au quotidien…
Est-ce-que vous souhaitez, par le biais de vos enfants notamment, faire perdurer votre nom de famille au sein de l’ASTT ?
Jean-Robert : On n’a pas le culte de la personnalité. Simplement, on souhaite quand même, à travers notre passage dans la vie du club, au moins qu’on se souvienne de nous. Plus de mon fils que de moi, puisque moi j’ai plutôt envie de rester efficace et discret, mais mon fils mérite quelques honneurs.
Pensez-vous que vos enfants devraient suivre votre engagement en tant que bénévoles ?
Arnaud : Je me pose pas la question parce que c’est beaucoup de travail quand même. Mais d’un autre côté, il faut bien qu’il y ait des gens qui fassent tourner les associations, qui se mettent au service des autres sinon il ne se passe plus rien. Ils feront comme ils voudront, s’ils ont envie ils iront, mais s’ils se disent que ça ne sert à rien…
Jean-Robert : Oui parce que moins on aura de bénévolat, et moins on aura de vie associative et on sait pertinemment que la vie associative est bénéfique pour chacun de nous dès l’instant où on y est sensibilisé. Quand il n’y a plus de bénévoles pour faire tourner une association, c’est un peu une désertification de la vie associative voire sociale, parce qu’au niveau du social on amène sa pierre à l’édifice quelque part, donc c’est quand même important.
Arnaud : Après on parle de crise du bénévolat mais on se rend compte que finalement on trouve toujours quelqu’un pour reprendre le flambeau. Enfin on espère que ça va continuer. Pour revenir sur l’historique d’ici, on avait un président qui était quand même en poste pendant 15-20 ans, on se demandait comment on allait faire quand il ne serait plus là. Et puis il y a eu quelqu’un d’autre, ce président est resté deux ou trois ans et il a eu des soucis de santé et il a décidé d’arrêter; la problématique est revenue : comment on va faire ? Et il y a eu encore quelqu’un d’autre.
Le bénévolat et vos actions au sein du club sont-ils des sujets de conversation qu’on aborde dans votre famille ?
Arnaud : Le beau-frère (qui au début n’était pas le beau-frère), entraînait ici quand je suis arrivé, il m’a entraîné également. Maintenant qu’il fait partie de la famille, forcément oui quand on se retrouve autour de la table, on parle tennis de table. Pas toute la journée mais ça arrive.
Il y a 3 ou 4 ans, il n’y avait plus de trésorier au club et mon beau-frère est comptable. Je l’ai appelé en lui disant qu’on était embêtés par l’absence de trésorier, qu’il faudrait qu’il le fasse. Lui il avait déjà mis les pieds ici quelques années avant, il savait que c’était galère, que ça allait lui prendre du temps, que ça allait lui créer du tracas, des soucis, que ça allait être casse pied : et il a dit oui quand même. Donc en ce moment il est trésorier du club, avec l’aide du président qui fait toute la saisie comptable mais comme il est plutôt compétent en comptabilité, il fait toutes les vérifications et il fait bien son job. Alors on en revient toujours au même, on sait que c’est galère et on y va quand même parce qu’on a aussi envie de rendre service et on n’a pas envie de laisser les autres dans la galère. Donc oui on en parle.
Jean-Robert : Alors oui parce que c’est un sujet de prédilection. On est quand même une famille de pongistes au travers de nos enfants comme au travers de nos beaux enfants. C’est vrai que lorsqu’il y a une réunion de famille, naturellement on abordera le sujet à un moment ou un autre. Ne serait-ce que pour demander les résultats des uns et des autres. Oui c’est un sujet incontournable, après on ne s’éternise pas non plus. Mais ça fait partie effectivement du sujet de conversation favori.
On n’évoque jamais justement cette force, cette fidélité à un club, on n’en parle jamais parce que ça se fait naturellement, ça fait partie de notre vie.
Jean-Robert Sellier
La notion d’attachement au club reste donc très forte finalement ?
Jean-Robert : Ah oui ! Mais on n’évoque jamais justement cette force, cette fidélité à un club, on n’en parle jamais parce que ça se fait naturellement, ça fait partie de notre vie. C’est comme ça, on ne se pose jamais la question. Et c’est tant mieux pour le bénévolat quelque part. Parce qu’imaginons aujourd’hui mon fils arrête : il serait malheureux d’arrêter de façon précipitée pour des raisons quelconques, il serait malheureux au fond de lui-même, tout ce temps investi, c’est un peu un constat d’échec quelque part.
Arnaud : Des fois on se retourne quand même, pour regarder les années qui se sont écoulées, et on se dit « alors ça fait tant d’années que je suis là, c’est bien ou c’est pas bien ce que j’ai fait ? » Il y a du bon et du moins bon. Mais on se dit toujours que ça va s’améliorer.
Y-a-t-il parfois un certains découragement ?
Jean-Robert : C’est vrai parce que le bénévole, quel que soit le club, il est toujours en point de mire. Ce n’est pas l’homme à abattre, c’est l’homme par qui on jure un peu, pour la vie du club, la pérennité. Mais en même temps quand quelque chose ne va pas, c’est la première personne qu’on va essayer d’abattre pour des prétextes ou des futilités. Ce n’est jamais un problème vraiment majeur, c’est toujours une multitude de futilités qui font qu’un bénévole peut se laisser aller au découragement.
Arnaud : Ce qui peut m’agacer c’est quand j’entends parfois « mais qu’est-ce-que fait le club ? Pourquoi le club fait ci ou ça ? » Mais le club ce n’est personne, le club c’est des gens qui, à un moment donné, se sont mis autour d’une table et ont décidé. Personnaliser le club ça ne veut rien dire. Il y a forcément soit une personne, soit un groupe de personnes qui a décidé des choses. On est conscients aussi de ne pas tout faire bien, mais des fois c’est le mieux qu’on puisse faire tout simplement.
Arnaud : Et puis il y a des retraités, moi à 39 ans je travaille encore et heureusement (rires). Donc c’est vraiment le cumul. Et après il y a un autre point important, il y a la famille : le bénévole, le compagnon ou la compagne du bénévole qui doit aussi accepter ça. De mon côté ma femme est pongiste, elle travaille aussi dans une association sportive donc elle travaille avec des bénévoles, mais il faut accepter ce temps que l’autre y passe. Mais on se comprend.
Et je parlais du président, sa femme n’est pas pongiste mais c’est une drôle d’histoire aussi. Il est arrivé en réunion et d’un coup, il a dit qu’il voulait être président. Sauf qu’il n’en avait pas parlé à sa femme avant, et que lui quand il fait quelque chose, il le fait à 3000%. Il part des weekends entiers, il héberge les joueurs chez lui : il faut que la compagne soit consciente et accepte tout ça, sinon ça ne peut pas marcher. Et puis la femme ou l’homme du bénévole finalement il est aussi un peu bénévole. Parce que quand les joueurs de l’équipe première vont dormir chez le président, je pense que madame Chatelain, elle fait aussi des choses donc finalement c’est encore plus large que ça. Il y a des bénévoles très impliqués dans la vie d’une association.
Jean-Robert : Le temps passé dans un club c’est du temps qu’on ne passe pas chez soi. Il y a beaucoup de personnes qui ne sont pas bénévoles pour justement ne pas laisser tout leur temps libre dans une association. Ils préfèrent être chez eux, quitte à ne rien faire, mais peu importe, ils sont près de leur famille, de leurs enfants, de leur femme et ça les satisfait. C’est vrai qu’un investissement ça suppose effectivement qu’il y ait un environnement qui accepte cette situation. Parce que là quand on voit le nombre d’heures qu’ils peuvent passer ici au club, au détriment de leur vie de famille, c’est compliqué. Parce que c’est aussi délaisser des choses personnelles pour des choses collectives, là encore c’est un choix.
Arnaud : Et tout cet engagement pour des retours pas forcément agréables. Là on se dit « les enfants sont plus autonomes » mais on se dit aussi « mais pourquoi je suis là ? Pourquoi je me casse la tête ici ? Je serais mieux chez moi, avec les enfants ». Mais d’un autre côté on peut aussi donner un exemple, c’est un bel exemple je trouve de se mettre au service des autres. Nous on le fait dans le sport mais il y en a qui le font dans l’humanitaire, c’est quand même bien. Et puis après, s’il y a transmission, tant mieux. Finalement je pense que je les encouragerai quand même.
Être bénévole ça veut aussi dire donner sans forcément recevoir en retour. On donne sans condition, gratuitement.
Jean-Robert Sellier
Qu’est-ce-qui vous plaît dans votre statut de bénévole ?
Arnaud : Moi c’est l’amour du maillot, que le club tourne, de voir des gamins bien jouer, que des équipes gagnent, que les gens soient contents d’être là. Et puis espérer qu’il y en ait d’autres qui reprennent le flambeau et qui fassent comme moi il y a quelques années, et de cette façon ça perdure et l’histoire du club continue. On est dans un club qui a une histoire ici, c’est un club qui a été champion de France dans les années 70, là on est en train de remonter une équipe de haut niveau : il y a ce versant haut niveau qui est très visible mais il y a aussi plein d’autres choses, quand la salle est pleine je suis content, c’est ça qui motive.
Jean-Robert : Les bons moments du bénévolat ou de la vie du club occulte un peu les mauvais. Heureusement, mais malheureusement aussi : c’est vrai que les bons moments sont aussi plus rares que les mauvais. Et parfois les mauvais ne sont pas forcément si mauvais que ça, mais ils sont rendus mauvais par un état d’esprit, ou une forme de maladresse, un reproche un peu inattendu qui peut aussi ennuyer. Et ce n’est pas forcément sain dans un club mais ça fait partie du jeu aussi. Être bénévole ça veut aussi dire donner sans forcément recevoir en retour. On donne sans condition, gratuitement. Si on a des retours c’est tant mieux, là le bénévolat prend toute sa dimension, sa grandeur. Ça se raréfie un petit peu mais enfin il y a du positif. Je pense que le bénévolat doit survivre absolument, mais il doit faire de plus en plus d’émules jusqu’à ce que chacun se sente concerné. Il y a du gros travail dans le bénévolat, il n’y a pas assez de combattants pour affronter toutes les tâches inhérentes du bénévolat mais plus il y aura du monde et plus ça marchera. Parce que chacun fait sa petite part, c’est le principe de la vie en société. Chacun fait un petit peu et c’est comme ça qu’on grandit. Le bénévolat je crois qu’il doit avoir ces valeurs là. On ne le fait pas pour s’enrichir, bien au contraire. Mais peu importe, le bénévolat est naturel, c’est en soi et c’est tant mieux.
La saga n’est pas finie, jeudi prochain, la troisième partie de notre entretien avec la famille Sellier sera consacrée à Sonia Sellier, l’épouse d’Arnaud. Rendez-vous pour cela sur le site de Gazettesports.
Retrouvez les autres numéros de la saga :
#1 « Famille de bénévoles » – Sellier (1)
#3 « Famille de bénévoles » – Sellier (3)
#4 « Famille de bénévoles » – Sellier (4)
Propos recueillis par Timothée / Mis en forme par Océane KRONEK
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