COURSE À PIED : Florent Vantard, au sommet de l’ultra-trail

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Passionné de sport depuis son plus jeune âge, l’Amiénois d’adoption de 39 ans a pris goût aux courses longue distance.

Le sport peut être synonyme d’hygiène de vie, de compétition ou encore de loisir. La course à pied en est le parfait exemple. Il y a les « coureurs du dimanche », les ambitieux – mais pas trop – qui réalisent des courses de dix ou vingt kilomètres, les marathoniens… Puis il y a les plus téméraires et Florent Vantard en fait partie. Quand on voit la difficulté d’un ultra-trail, on pourrait croire que ces personnes vivent dans l’excès et aiment se faire mal. Et bien non, en réalité, leur train de vie ne se résume pas à mettre ses baskets. Les objectifs sont juste différents, à quelques kilomètres près… Et puis, avouons qu’un Amiénois vivant en plaine qui participe à une course avec 10 000 m de dénivelé, ce n’est pas très banal. Partons dans le vif du sujet.

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Lors de notre rencontre, l’homme de 39 ans raconte son aventure au Grand Trail de Serre-Ponçon, en septembre dernier. Ingénieur de métier, Florent Vantard effectuait son stage à Amiens et n’a plus quitté la ville depuis : « Tout se passe bien, la vie est belle ici (rires). Je m’en rappelle, quand je suis arrivé, j’avais dit que je resterais ici 6 mois, juste le temps de faire mon stage de fin d’études, finalement cela fait 15-16 ans et je me sens bien. » Heureux d’être Amiénois, mais aussi heureux et fier d’être père d’un enfant de deux ans, qu’il appelle « mon petit garçon », d’une voix tremblotante. De nature assez discrète, il n’a pas l’habitude de l’exercice de l’interview : « C’est la première fois que je fais cela. » Plus à l’aise au fil de la discussion, le jeune papa raconte son ascension vers l’ultra-trail.

Tout commence lors d’une inscription à la Transbaie avec un de ses collègues : « A cette époque-là, j’avais du mal à faire le tour du parc Saint-Pierre. Nous nous sommes entraînés pour cette course, qu’on a terminée. Puis, petit à petit, j’ai augmenté, j’ai fait de plus en plus de courses. Je me suis inscrit dans un club (Esprit Run, ndlr) en 2010. C’est là que j’ai commencé à m’entraîner plus sérieusement. Avant je ne faisais que des courses sur route, puis j’ai commencé le trail en 2015. J’ai toujours voulu faire des courses en montagne mais je n’avais jamais trop eu l’occasion. Deux copains cherchaient une troisième personne pour s’inscrire en groupe sur la Marathon Race, à Annecy. Je me suis inscrit et cela a commencé comme ça. » Un bon comme un mauvais souvenir, qu’il avoue en riant : « J’avais fini avec des crampes, c’était horrible ! C’était 40 km et 2000 m de dénivelé. Ça a été jusqu’à 30 km et après, dans la dernière descente, j’ai eu des crampes. Quand les gens font leur premier trail, généralement c’est ce qui arrive… »

Un entraînement atypique

La région amiénoise n’est pas propice pour une préparation à une course avec autant de dénivelé. C’est pourquoi l’ingénieur cherche des solutions : « Je m’entraîne souvent à Cottenchy où il y a des petites côtes. Il y a de quoi faire en chemins, mais il faut répéter plusieurs fois les montées pour faire beaucoup de dénivelé. En revanche, le problème, c’est la descente. Faire 1000 m de dénivelé négatif comme on fait dans les Alpes, ce n’est pas pareil que faire 10 fois une côte de 50 m de dénivelé négatif, ce n’est pas du tout pareil en terme musculaire. C’est vraiment cette partie-là qui est difficile à travailler ici. »

Pour une préparation à un tel effort, le Dijonnais de base insiste sur la progressivité. Avant de participer à un ultra-trail, le coureur a réalisé des courses de 50 à 60 km maximum, afin que son organisme s’habitue aux longues distances. Puis, en 2018, Florent Vantard augmente ses distances en participant à la CCC (100 km) et à la TDS (145 km). Et enfin à l’ultra de Serre-Ponçon l’été dernier. « Je m’entraîne quasiment tous les jours : 2 sorties vélo, 4 sorties course à pied et une séance de préparation physique générale, à la maison. Cette année, c’était plus compliqué de s’entraîner en termes de volume. Avec mon coach, nous avons réduit les volumes d’entraînement pour faire vraiment de la qualité et pas de grosses sorties. La plus grosse sortie que j’ai faite cette année, c’est 2h30 de course à pied, alliée à 1h30 de vélo. Je suis sorti 3-4 dimanches de suite avec ce volume-là »,affirme-t-il.

Année plus compliquée du fait de ses impératifs personnels : « Avant que j’aie mon petit garçon, je pouvais dégager plus de temps, donc je m’entraînais beaucoup le soir […] Grâce au télétravail, je peux m’entraîner le midi et profiter de ma vie familiale. Le plus compliqué à gérer, c’est le dimanche. Ce n’est pas évident car mon enfant demande de plus en plus d’attention, il veut faire plein de choses. Ce que je fais de temps en temps, j’ai une carriole pour courir avec lui, mais ça marche juste quand je suis sur le chemin de halage ou pour des séances à plat, en ville, mais quand je fais des séances en côte, je ne peux pas ». Avant Serre-Ponçon, le trentenaire n’arrive donc pas en totale confiance.

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L’ingénieur puise dans ses forces lors du Sara Korrika Trail

La révélation

Au départ de l’épreuve, l’objectif est de gravir ces 162 kilomètres (avec 10 000 mètres de dénivelé) en 26 heures. En même temps, il en profite pour indiquer ses horaires de passage aux bases de vie à sa compagne. La course démarre sur un rythme élevé. Florent Vantard est alors cinquième et reste lucide : « Quatre personnes sont parties devant très fort. Nous étions espacés de cinq minutes. Je me suis dit qu’il ne fallait pas s’emballer car c’est très long derrière. Puis je suis remonté petit à petit. Après la première base de vie, le quatrième part dix minutes avant moi. Je l’ai rattrapé au sommet de la côte suivante. Il ne faut surtout pas penser que s’arrêter longtemps aux bases de vie, cela va poser problème pour le classement»

Entre les première et deuxième bases de vie, l’Amiénois d’adoption rattrape le troisième et les coureurs font une partie de course ensemble. Ce dernier est contraint d’abandonner au sommet suivant, exténué. À mi-course, l’ingénieur est donc troisième, avant d’arriver au Piolit (sommet des Hautes-Alpes, à 2464 m, ndlr). « C’était un peu compliqué de suivre le chemin et de naviguer. J’ai eu la présence d’esprit de faire un peu de jardinage pour retrouver la trace. J’arrive au sommet et on m’annonce deuxième, sans doubler personne. Les bénévoles m’ont expliqué que le deuxième s’était trompé de route. Il est arrivé au sommet mais par le mauvais côté. Il n’était plus motivé car il savait qu’il allait prendre une pénalité. Je me suis dit que je pouvais finir deuxième », assure Florent Vantard. À la dernière base de vie, les organisateurs annoncent que le premier possède 25 minutes d’avance.

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Florent Vantard en descente du Trail du Jambon, en Belgique.

L’objectif de Florent Vantard est désormais fixé : assurer sa deuxième place. Objectif atteint lors de la descente du Mont Guillaume, dernier col : « Arrivé en haut, j’avais hyper froid, c’était le lever de soleil. À un ravitaillement au milieu de la dernière descente, j’ai demandé aux bénévoles d’appeler leurs collègues qui étaient au sommet pour savoir si le troisième était passé. Ils m’ont annoncé que non, donc je savais que la deuxième place était acquise, sauf si je tombais. » Une nouvelle mission entre dans sa tête : terminer en moins de 24 heures. En avance tout le long de l’épreuve d’une heure sur ses temps de base, Florent Vantard connaît la fin du parcours par cœur et s’est battu avec lui-même pour atteindre son but. Les derniers instants sont libérateurs : « À la fin, c’était 2 km de plat, c’était un peu long mais j’ai discuté avec un organisateur qui prévenait que j’arrivais. Ma famille et mon petit garçon étaient au fond de la dernière ligne droite. Je ne m’attendais pas à faire moins de 24 h sur un ultra comme ça… Le contrat est rempli, c’est une consécration ! »

L’après-course, un calvaire

« Le plus dur commence » assure le finisher. « Avant l’arrivée tout va bien, mais 10 minutes après, j’étais dans le dur. C’est incroyable la différence, tout le corps se relâche. Ça a été très compliqué pendant 4 jours, j’étais à plat, j’étais malade. J’ai mis une grosse semaine à m’en remettre physiquement. Je n’ai rien fait pendant deux semaines. Puis il faut se remettre des objectifs tout de suite. Je repars sur un cycle vitesse, sur des séances plus courtes qui passeront plus vite, ce serait dur mentalement de se remettre à une préparation pour un ultra tout de suite. Cela me dégage plus de temps pour ma famille. Je reprendrai les grosses sorties en février. »

Grâce à cette performance, Florent Vantard pourra voir plus grand l’année prochaine : « Je vais refaire la TDS (Trace des Ducs de Savoie, ndlr) l’année prochaine, et peut-être une course intermédiaire en avril. Mon objectif est de faire un meilleur chrono que lors de ma précédente participation. Il y a de l’adversité. L’UTMB (Ultra Trail du Mont-Blanc, ndlr), c’est le sommet du trail et se confronter aux meilleurs, c’est top ! » Et il finit en donnant quelques conseils aux amateurs : « Il ne faut pas se dire qu’on ne peut pas y arriver, quand on veut on peut ! Il ne faut pas griller les étapes, il faut être progressif. »

Romain Ales
Crédit photos : DR Florent Vantard
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Publié par La Rédaction

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