Alors que l’année s’achève le président de l’AUC Athlétisme, Bruno Dilly, nous a accordé un entretien.
En tant que président, comment avez-vous vécu cette année ?
« L’année s’est passée avec un manque de visibilité certain. Il a fallu adapter nos pratiques aux différents protocoles sanitaires qui se sont succédé, et surtout assumer la part de responsabilité supplémentaire liée au contrôle des gestes barrières, des jauges, etc. Bref rien de très enthousiasmant… Il a fallu également suivre de très près tous les dispositifs de soutien mis en place par l’État et les relais locaux, et donc remplir tous les dossiers s’y rattachant. Le tout avec une certaine inquiétude liée à la baisse du nombre d’adhérents. »
Le nombre de licenciés a donc changé depuis l’avant covid ?
« Le club a perdu environ 20% de licenciés, ce qui est dans la moyenne nationale, en dépit des efforts qui ont été faits pour maintenir les liens et les pratiques à distance, ou sur des terrains autorisés. L’annulation de certaines compétitions et le flou autour d’un éventuel retour à la normale n’a pas arrangé les choses. Ce début de saison est marqué par un rebond de quelques dizaines de licenciés mais nous sommes encore loin des 800 adhérents d’avant covid. »
On sait qu’après chaque Jeux Olympiques le nombre de licenciés augmente mais cette année l’athlétisme n’était pas en premier plan. Qu’avez-vous donc ressenti cette saison ?
« Les résultats aux JO peuvent avoir parfois un effet positif sur les nouveaux adhérents, mais pas seulement si les Français brillent. Ce sont les exploits sportifs en général qui peuvent aussi déclencher des envies de pratique, notamment chez les jeunes. De beaux moments relayés positivement par les médias valent parfois autant que des médailles. C’est d’ailleurs chez les 7-12 ans que le nombre de licenciés a le plus réaugmenté. Mais les parents nous confient d’abord leurs enfants dans un souci de bien-être, d’activité physique avant de penser à en faire des champions. Quant aux résultats des athlètes français, c’est du ressort de la Fédération d’essayer de trouver les filières d’accès au très haut niveau les plus efficaces, tout en se rappelant que l’athlétisme est le sport universel par excellence, que c’est donc très compliqué de ramener des médailles, que cela ne concerne qu’une toute petite minorité qui sert de vitrine. L’essentiel est d’abord dans les clubs qui accueillent tous les publics et qui peuvent aussi détecter et former les champions. L’AUC a d’ailleurs prouvé sur ce point cet été qu’il en était capable avec ses excellents résultats individuels chez les juniors et les espoirs. »
Sur le développement du club quelles ont été les améliorations que vous avez pu remarquer ? Et les points à travailler ?
« C’est compliqué de parler de « développement », donc de futur, quand on doit gérer une crise sanitaire. L’essentiel des énergies se porte sur le présent et dans le meilleur des cas sur le futur proche. Toutefois, globalement, on sait que le développement du club passera par une professionnalisation accrue, donc de l’emploi. »
« Le bénévolat a ses limites et la lourdeur des taches, la spécificité de l’athlétisme qui en fait un sport difficile à gérer dans toutes ses dimensions, les responsabilités croissantes, la nécessité de monter en compétences tant pour les dirigeants que pour les entraineurs, tous bénévoles, tout cela finit par épuiser les bonnes volontés, d’autant plus que la société se transforme et que l’engagement bénévole intense et sur la durée tend à se réduire. »
On a pu remarquer que le club a quand même participé à de nombreuses compétitions cette année, les bilans sont plutôt positifs ?
« Le club a non seulement participé à de nombreuses compétitions, mais il en a organisé également dès que ce fut possible. L’AUC a été le club régional le plus réinvesti dans les organisations. Il fallait redonner vie à notre sport et permettre à nos adhérents de « sauver » leur saison sans avoir à trop se déplacer. Les résultats de nos athlètes les plus en vue ont par ailleurs été très satisfaisants. »
Dans l’un de nos articles du mois passé, Erwan Konate l’actuel champion du monde de saut en longueur junior et licencié chez vous a précisé rester à Amiens jusqu’en 2024 quel est votre ressenti sur cette décision ?
« Erwan a été formé au club, comme tous les jeunes qui ont brillé cet été. Le fait qu’il se sente bien chez nous est une excellente chose, c’est une marque de confiance ; c’est souvent la clé de la réussite et en athlétisme, qui reste un sport amateur, le fait d’être champion du monde et recordman de France n’implique pas forcément d’aller voir ailleurs. Il se sait soutenu par son club, sa famille, les collectivités, ses camarades de club : c’est le cadre idéal pour accomplir ses ambitions, même s’il est parti à l’INSEP pour conjuguer au mieux étude et sport de haut niveau, ce qui n’est pas toujours simple en France. »
Êtes-vous satisfait de vos jeunes, du rayonnement et de l’image qu’ils donnent de votre club ?
« Les résultats de cet été (1 titre de champion du monde en junior, 2 médailles de bronze aux championnats du monde Junior et Espoirs et une 4e place aux Europe Espoirs) ont été exceptionnels : jamais le club n’avait été à un tel niveau individuel. Ce furent de grands moments d’émotion pour l’ensemble du club, pour les athlètes bien sûr, mais aussi pour leurs entraineurs – bénévoles rappelons-le – qui ont fait le maximum pour les amener au sommet le jour J. Cela restera une année historique, et c’est évidemment très bon pour notre image. Il va falloir maintenant les accompagner jusqu’à l’échéance de Paris dans les meilleures conditions possibles. »
Depuis les nouvelles installations d’Urbain Wallet, ressentez-vous des améliorations grâce aux travaux réalisés ?
« Les travaux effectués par Amiens Métropole ont sans conteste amélioré beaucoup de choses. Le nombre de blessures est en régression, la piste étant moins traumatisante. Cela permet également d’organiser davantage de compétitions dans de bonnes conditions. C’est cette qualité qui nous permettra certainement d’accueillir une délégation étrangère en 2024, mais il faudra veiller à faire régulièrement l’entretien nécessaire. Une piste d’athlétisme et tout ce qui va avec peut se dégrader rapidement. »
Quels sont vos perspectives pour l’année 2022 ?
« L’année 2022 va démarrer avec à nouveau quelques incertitudes. Le club s’est toutefois fixé plusieurs objectifs : obtenir le meilleur résultat possible aux interclubs afin de rejoindre l’Élite 1 (top 8 français) après une descente très malchanceuse en 2019 et deux ans d’interruption, organiser plusieurs évènements nationaux (meeting hivernal « 3 sauts » en février, meeting national sur piste en juin) et bien sûr relever le défi de la Jules Verne, dont le club vient de récupérer l’organisation. Il faudra en même temps essayer de reprendre une activité normale pour tous les adhérents et s’assurer que notre élite se prépare au mieux pour les grandes échéances nationales et internationales. L’idéal serait de trouver aussi de nouvelles forces vives pour diriger le club, pour entraîner et pour juger aux compétitions. Bref, pas mal de pain sur la planche… »
Théo Guercif
Crédit photo : Kevin Devigne – Gazette Sports