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« La motivation est l’art d’amener les gens à faire ce que vous voulez qu’ils fassent parce qu’ils veulent le faire. »
Dwight D. Eisenhower
La motivation est un élément qui est souvent invoqué lorsqu’il s’agit d’expliquer un résultat sportif. On entend ainsi parler d’un jeune espoir qui n’a jamais réussi à percer par « manque de motivation » ou d’une équipe qui s’est transcendée sur un match du simple fait d’une hypermotivation. Pour autant, comme beaucoup de concepts « fourre-tout » utilisés dans le sport, ses contours sont assez flous pour beaucoup d’athlètes ou d’entraineurs.
La motivation est une notion qui recoupe trois composantes essentielles : l’investissement dans la tâche, l’orientation du comportement de l’athlète autour de la tâche et surtout la persévérance. L’athlète motivé sera donc celui qui s’entraine de nombreuses heures spécifiquement dans son activité (orientation de la tâche), avec intensité et acharnement (investissement), sans volonté de changer ou de diminuer cette intensité (persévérance). Cette force qui pousse l’athlète n’est cependant pas un besoin vital comme celui de se nourrir, et ce n’est pas non plus le résultat d’un conditionnement puisqu’il est très facile de s’arrêter une fois les objectifs atteints. Comment peut –on donc expliquer cette aptitude, cette volonté de l’athlète performant à orienter, intensifier et persévérer dans son entrainement ?
Un modèle classique consiste à distinguer des facteurs de motivation externes et internes :
- les raisons « externes » qui peuvent pousser un athlète à s’entraîner et à vouloir être performant sont par exemple la recherche de gain matériel (que ce soit sous forme de médailles, de titre ou de prime), la recherche d’une forme de valorisation sociale (se sentir aimé/apprécié/admiré grâce aux résultats que l’on obtient) ou une forme de comparaison sociale (se sentir supérieur, prouver sa valeur aux yeux des autres). Pour tous ces facteurs, on parle de motivation extrinsèque.
- les raisons « internes » sont par exemple le plaisir personnel dans l’accomplissement de la tâche (sensation physique dans ou après la réalisation d’un effort), l’auto-valorisation au travers du sentiment de compétence (apprécier d’apprendre puis de réussir un nouveau geste technique, augmenter son savoir faire et ses compétences) ou la satisfaction d’avoir atteint des objectifs ou de repousser certaines de ses limites. On parle alors de motivation intrinsèque.
Cette classification en deux catégories est schématique et ne correspond pas complètement à la réalité des choses. En raffinant un peu cette idée, on peut en construire un modèle basé sur la notion d’autodétermination : chaque athlète est unique et les facteurs profonds qui le motivent peuvent se placer sur une échelle allant d’éléments complètement externes (comme le sportif professionnel qui mène sa carrière pour des questions uniquement financières) à d’autres considérations qui ne concernent que les sensations et les émotions propres à l’athlète (comme le surfeur qui ne recherche que la pure sensation de glisse).
Savoir identifier ces facteurs de motivation nécessite pour l’athlète (et son entourage) de se questionner spécifiquement sur le sujet et constitue donc une démarche qui peut prendre du temps (chose que les athlètes et les entraineurs préfèrent généralement passer sur des aspects techniques ou physiques). Pour autant, elle peut constituer le début d’un travail d’optimisation de la performance en orientant la préparation de l’athlète vers les éléments les plus pertinents.
Il est en effet démontré que les facteurs de motivation purement extrinsèques, comme les gains matériels ou la recherche de valorisation sociale sont en général des leviers dont l’efficacité est limitée et surtout peu pérenne. Les athlètes qui fonctionnent sur ce mode là ont tendance à évaluer leur valeur et leur sentiment de compétence sur des aspects purement quantitatifs comme un résultat brut. Leur motivation s’en retrouve donc largement entamée lorsque les résultats ne sont pas au rendez-vous. Malheureusement de nombreux éléments que l’athlète ne peut contrôler peuvent venir contrarier un résultat : blessure, bête noire, adversaire en état de « flow » (état de performance optimale), problèmes relationnels entre coéquipiers etc…En conséquence, on constate que ces athlètes « accros » au résultat sont également de fait plus stressés, ce qui tend à les éloigner encore plus d’un état optimal pour performer.
A l’opposé, le sportif qui ne recherche que l’accomplissement personnel ou de simples sensations aura tendance à persévérer plus longtemps dans son activité et sa motivation sera nettement moins sujette à des aléas extérieurs, faisant de lui un athlète beaucoup moins stressé. Parce qu’il centre son activité non pas sur l’égo, mais sur la tâche à accomplir, cet athlète se place dans des conditions optimales de performance, le résultat étant souvent une conséquence indirecte de la maitrise technique.
Aussi est-il clairement dans l’intérêt d’un entraineur de connaître les facteurs de motivation qui animent ses athlètes. Ceux-ci ne sont pas gravés dans le marbre et évoluent dans le temps, soit de façon « naturelle » (au fil du temps, en fonction de l’évolution de l’athlète et de sa carrière), soit parce qu’ils sont sciemment orientés par le sportif et son entourage. Il est en effet possible d’entretenir et d’intensifier la part de motivation intrinsèque, que ce soit au travers d’entrainements adaptés ou de feedbacks ajustés. C’est tout le sens de la phrase de Dwight Eisenhower citée dans le titre cet article : la motivation n’est réellement efficace que lorsqu’elle émane de l’athlète lui-même. S’il adhère pleinement au projet sportif, s’il se l’approprie, sa motivation s’en trouvera démultipliée. C’est alors tout l’art de l’entraineur ou de l’entourage de faire en sorte qu’il y ait une adéquation pleine et continue dans le temps entre le projet, les objectifs et les aspirations de l’athlète.
Le prochain article de cette chronique sera précisément consacré à la mesure des différents facteurs de motivation et sur les méthodes qu’il est possible d’utiliser pour réorienter ces facteurs afin de les rendre performants et efficaces.
Frédéric Fenoul