En cette année 2019, Lilou Wadoux, pilote du Team JSB Compétition, entrait dans une nouvelle dimension en prenant part au Championnat TCR Europe… Mais après 4 Grand Prix, la saison s’est brutalement arrêtée à Spa, le 8 juin dernier, suite à un spectaculaire accident qui a détruit sa voiture.
Quelques semaines après cette course, la toute récente bachelière a accepté de revenir pour Gazettesports sur cette « demi-saison » de découverte, sur son accident, tout en évoquant son avenir, qu’elle imagine entre architecture et automobile…
Nous sommes aujourd’hui plus d’un mois après ton accident à Spa, comment te sens-tu désormais ?
Physiquement ça va mieux, mentalement on va dire que ça a été plus dur après les tonneaux… en plus le bac arrivait dans la foulée, donc tout s’est enchaîné. On va dire que sur le week-end je n’ai pas vraiment réagi après les tonneaux, je n’avais pas encore percuté ce qu’il s’était vraiment passé.
Ça n’a pas été trop compliqué de se concentrer sur le bac après ce week-end riche en émotions ?
Je pense que le bac m’a aussi permis d’éviter de penser à mon accident
Si, le lundi qui a suivi j’étais en semaine de révision c’était un peu compliqué. Je pensais pas mal à ce qu’il s’était passé (ndlr : les tonneaux) et comment on aurait pu éviter cela, enfin toutes les questions que l’on se pose après des tonneaux. Même si ça a été compliqué j’ai essayé de faire au mieux. Au début ça a été dur, mais je pense que le bac m’a aussi permis d’éviter de penser à mon accident.
Quelques heures après tes tonneaux, tu semblais sereine, presque détachée…
C’est plutôt que quand je suis descendue des tonneaux j’avais encore l’adrénaline, et quand j’étais au circuit je n’ai pas ressenti grand chose. Mais aujourd’hui on ne roule plus, on n’a plus de voiture, donc la forcément ça met un coup.
Durant ce week-end il n’y a pas eu que tes tonneaux, il y a aussi eu le crash de Julien Briché durant les essais…
Oui, j’étais juste derrière lui à ce moment là. Et j’ai eu plus peur au crash de Julien qu’au mien, mais après ce n’est pas pareil car j’ai vécu le truc, je l’ai vu partir… Alors que là quand j’ai fait mes tonneaux je n’ai rien vu arriver, ça me parait moins impressionnant, même si ça l’est peut-être.
Tu te souviens de tout ?
Je me souviens de tout, quand je suis sur le toit je regarde toutes les étincelles, et jusqu’à ce que je me retrouve dans le bac, je me rappelle avoir fermé ma visière alors que je recevais plein de cailloux. Lorsque je suis sur le toit je m’attends à aller taper le mur sauf que je vais dans le bac au final. C’est un peu improbable ce qu’il s’est passé. C’est vraiment un coup de malchance. Ça tape vraiment à l’endroit où il ne faut pas, à 2 cm près ça m’envoyait dans le mur et c’était tout.
Le fait de sortir physiquement quasiment indemne, c’est rassurant pour toi et ta famille ?
Oui c’est rassurant, après moi j’ai vécu le truc de l’intérieur donc je n’ai pas eu spécialement la même peur. Mais maintenant que l’on a regardé la voiture, c’est tout de même impressionnant, elle est détruite, même l’ossature est descendue.
Aujourd’hui, quelle est la suite pour toi ?
Pour le moment c’est d’essayer de refinancer le TCR, aujourd’hui on ne sait pas ce que l’on fait, je me dis que l’on ne roule plus pour l’instant, comme ça je ne me fais pas de faux espoirs. Du coup je vais plus me concentrer sur les études et on verra après.
L’objectif c’est de repartir en TCR l’an prochain ?
Oui peut être l’année prochaine mais là cette année on ne sait pas ce que l’on fait.
Jusqu’à présent, comment jugeais-tu tes débuts en 308 TCR ?
Le but c’était de faire comme en 208, une année de « débutant », et après refaire une année pour essayer de jouer les premiers rôles. Ce début de saison TCR (ndlr : 4 grand prix) était compliqué. La première course je fais des erreurs, des erreurs de débutants, c’est logique. Ensuite je n’ai pas eu trop de chance, je me fais couper en deux à Hungaroring, à Hockenheim je fais une erreur et la voiture ne marchait plus et à Spa elle ne marchait plus et en plus je me fais taper…
Quel bilan tirer ?
En soi au niveau de la vitesse ça allait, on a fait des temps derrière les Clairet qui roulent tout le temps qui ont été champions de France, donc de ce côté là ça a été. C’est une chose à retenir, on a été vite en essais et j’ai eu de bonnes sensations avec la voiture.
Si tu sens que c’est agressif, tu doubles par un coup de portières
Quelles sont les grandes différences avec le 208 ?
La voiture est plus puissante, on a des pneus slick, qui ne sont pas des pneus de série, pas des pneus normaux. On va plus vite également, et il y a aussi les palettes au volant. Je dirais aussi que les pilotes sont plus agressifs en TCR. Je l’ai senti, mais c’est aussi parce que lors de mes premières courses j’étais loin de la tête, avec des pilotes « en perdition », des pilotes qui ne contrôlent plus grand chose. Mais bon, si tu sens que c’est agressif, tu doubles par un coup de portières…
Qu’est ce qui a manqué finalement pour que vous soyez plus performants ?
Ce qui nous a manqué c’est que l’on a pas assez roulé comparé à certains pilotes qui ont dépensé je ne sais pas combien pour faire des entraînements. Après je ne connaissais aucun circuit d’Europe, donc ça n’était pas évident.
Rouler plus en dehors des courses, ça pourrait aider ?
Rouler un peu plus oui, on voudrait tous rouler plus, ça ne pourrait pas faire de mal pour la compétition. Parce que là, découvrir en une heure un circuit sur lequel tu n’as jamais roulé ce n’est pas facile. Ça serait toujours mieux de pouvoir rouler plus pour progresser.
Est-ce encore plus compliqué en 308 de se faire une place en tant que femme ?
En 208 ça a été compliqué au début aussi, car j’étais une fille et en plus j’étais jeune. Mais maintenant je me suis habituée à ça et je suis plus agressive. Après c’est sûr que sur les circuits, je sais qu’ils laissent moins passer quand ils voient une fille…
« Là c’est plus proche du monde professionnel, ça joue plus pour mon avenir »
Le fait d’être dans un championnat d’Europe te met une pression différente ?
Un peu, on sent qu’il y a plus d’argent derrière. Il y a une certaine pression car tu sais que quand tu casses la voiture ça coûte très cher. Après on va dire que l’on a fait TCR dans la mauvaise saison. La saison où l’on n’a pas vraiment eu de chance c’est celle là. Ce n’est pas arrivé au bon moment…
Là c’est plus proche du monde professionnel, ça joue plus pour mon avenir. C’est plus sérieux, on ne fait plus la fête, on est beaucoup plus sérieux qu’en 208. Parfois ça peut mettre un peu de pression mais dans l’ensemble ça va. C’est plus en dehors que je me dis qu’il faut quand même faire gaffe à certains trucs. Notamment au niveau de la communication, quand je suis interviewée il faut faire attention à ce que je dis, même par rapport au championnat.
Quels sont tes ambitions pour le futur ?
Pour l’instant j’ai toujours les 2 options, les études (ndlr : elle intègre un BTS Etude et économie de la construction à Lille en septembre) et le sport auto. Mais dans l’automobile je veux rouler, peu importe le championnat, je veux rouler. Si je peux gagner de l’argent avec l’automobile tant mieux, mais si je ne peux pas alors je ferai les deux en même temps !
Propos recueillis par Quentin Ducrocq
Crédits photos Leandre Leber /Quentin Ducrocq Gazettesports.fr
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