BOXE : Maële Traoré, un exemple à suivre

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A Amiens, le sport féminin se porte bien dans l’ensemble même si l’on peut penser qu’on peut mieux faire en ce qui concerne les disciplines pratiquées et l’accueil qui est réservé aux sportives. Maële Traoré, jeune boxeuse, émerge dans le paysage du sport amiénois et deviendra, peut-être, une figure emblématique de notre territoire.

En général, l’exemple le plus courant est celui du sport qu’une femme découvre à un certain moment de sa vie lorsque par exemple elle est installée professionnellement et sur le plan familial. Mais il existe aussi le cas, plus rare il est vrai, d’une sportive qui a démarré très tôt la pratique du sport.

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Il faut alors bénéficier de circonstances favorables et pour Maële Traoré c’est frappant. Voilà en effet une gamine qui est née dans un quartier d’Amiens celui d’Etouvie où un quart de siècle auparavant, un passionné de boxe française avait décidé de créer son propre club. Cet homme s’appelle Mohammed Oudji, fier d’appartenir à ce quartier d’Etouvie qui l’a accueilli avec ses parents lorsque a pris fin la guerre d’Algérie et que les harkis et leur famille revenaient dans la Métropole afin de recommencer une nouvelle existence.

Très tôt, Mohamed Oudji s’est destiné à la boxe française, suivant l’exemple de son frère Moktar et incitant le plus jeune, Bouziane, à entrer ensuite dans une salle de boxe. Mohamed Oudji et Etouvie sont viscéralement liés même si comme le raconte le film, ce ne fut pas toujours un vrai fleuve tranquille.

Mais revenons à Maële Traoré qui est et sera la dernière pépite de ce découvreur de talents. Car dites moi, quand à l’âge de 4 ans, une petite fille, un peu timide et culottée à la fois, entre dans une salle de boxe française et dit à Mohamed Oudji : « Monsieur je veux faire de la boxe », que peut vraiment répondre cet homme qui, à l’époque, avait bien sûr d’autres chats à fouetter.

Que s’est-il passé alors entre Maële et Mohammed ? Nous l’ignorons mais toujours est-il qu’il y a une sorte de fluide qui a réuni ces deux personnes, une sorte de relation qui va perdurer longtemps nous en sommes certains. Mohammed se souvient de cette gamine qui avait des yeux en amande et qui ne passait pas inaperçue : « Très tôt je me suis aperçu qu’elle avait à la fois de la souplesse et de l’aisance. Nous avons poursuivi avec des jeux de motricité et des jeux ludiques. Maële a fait son premier assaut à Calais mais j’étais seul entraîneur dans l’équipe alors que j’avais 14 filles à coacher. Je n’ai pas vu la journée passer car je courais sans arrêt. Dans le car qui nous ramenait à Amiens, j’ai appelé le papa de Maële pour lui annoncer le résultat. Mais par la suite, plus de nouvelles de Maëlle et j’ai appris ensuite qu’elle avait arrêté la boxe. »

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Tout juste commencée, la carrière de Maëlle a donc failli prendre fin ?  Cela aurait été un beau gâchis. Maëlle se souvient encore de cette période, quand elle avait 4 ans et qu’elle fréquentait la salle de boxe française à Etouvie : « C’est vrai, j’avais quatre ans. Je ne me souviens plus du premier jour mais je me rappelle de cette époque où ma mère m’accompagnait. Je retrouvais des copines. Au final cela m’a plu. J’avoue qu’il y a chez moi une certaine envie de vouloir frapper (sic) et  j’adore me défouler sur quelqu’un. Pour moi c’était un jeu car nous étions loin de l’esprit compétition. C’était avant tout un plaisir. »

Durant une année entière, Maëlle avait donc arrêté son sport favori et si Mohammed Oudji n’avait pas été là pour l’inciter à revenir dans la salle, jamais elle ne serait aujourd’hui titulaire d’un tel  palmarès. Elle a en effet remporté ses 37 assauts, obtenu deux titres de championne de France minimes ce qui n’était plus arrivé depuis 2002 : « En six mois, Maële a refait son retard et dépassé ses copines, poursuit Mohammed. L’année suivante elle a été championne de France ».

« Franchement, j’avais hâte de revenir  car je ne voulais pas pratiquer un autre sport. Sur un ring, j’ai envie de gagner et surtout je ne veux pas qu’on me marche dessus. Je me donne à fond et je hais la défaite ».

Maële Traoré

Maintenant, comment se présente l’avenir de Maële qui devient cadette ? Maële a changé de catégorie et va tenter de décrocher le titre national avec des finales qui auront  lieu en Guadeloupe. Bientôt va arriver ce moment où Maële va disputer non plus des assauts mais de véritables combats. Un assaut c’est une sorte de technique qui est dénuée d’efficacité en ce sens que sur le ring, Maële doit certes frapper mais retenir ses coups. Ce qui n’est pas simple du tout car en assaut il n’y a pas de K.O : « Je peux appuyer mes coups mais je n’ai pas le droit de faire mal. J’ai toujours rêvé de faire des combats et ce moment arrive. »

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Maële s’entraine assidûment dans une salle d’Etouvie sous la direction de Mohammed Oudji qui organise samedi 27 janvier dans le gymnase des Quatre Chênes son dernier gala. Mohamed Oudji souhaite démontrer une dernière fois qu’à Amiens la boxe française a retrouvé la place qu’elle occupait dans les années 90 avec notamment chez les féminines Virginie Lavoine et Naïma Guernou. Mais Mohamed aimerait qu’un jour Maële se destine vers la boxe anglaise et suive ainsi l’exemple de Bouziane Oudji qui fut champion de France dans les deux spécialités.

Maële a plusieurs cordes à son arc. Elève au Lycée de la Hotoie à Amiens, elle s’adonne à sa grande passion, la musique et joue régulièrement du piano. Plus tard, elle veut rester dans le sport et devenir éducatrice sportive. Ce dont rêve surtout Mohammed Oudi c’est que Maële Traoré soit considérée comme une « Ambassadrice de la pratique du sport au féminin« . Ce serait le meilleur moyen pour donner l’envie aux femmes de pratiquer le sport comme le fut dans son temps Chantal Langlacé qui a ouvert la voie à des femmes de pratiquer le marathon.

Maële sera à l’honneur prochainement car elle a été désignée pour porter la Flamme Olympique. La conclusion de Mohammed Oudi est une sorte d’hymne à la gloire du Sport chez les femmes. Pour lui, la boxe et la féminité ne sont pas du tout incompatibles bien au contraire.

Lionel Herbet

Crédit photo : Léandre Leber / Théo Begler – Gazettesports.fr

Publié par Lionel Herbet

Journaliste historique du sport Picard et Amiénois. Lionel est la mémoire des plus grands exploits sportifs de la région.