Voici quelques jours, Ruddy Buquet, qui est à ce jour le numéro un de l’arbitrage en France, troisième de tous les temps à avoir dirigé le plus de rencontres de Ligue 1 derrière Philippe Kalt (355) et Laurent Duhamel (317), a officié pour la 300e fois lors de la rencontre Nantes-Nice.
Ruddy Buquet est aujourd’hui Directeur Technique de l’Arbitrage de la Ligue des Hauts de France. Il nous a reçu dans un bureau de la Ligue, bâtiment qui porte le nom de Fernand Duchaussoy et proche du centre de formation de l’Amiens SC, pour nous évoquer sa carrière débutée en tant que joueur à Licourt et prolongée avec la découverte de l’arbitrage grâce à son père.
Ruddy, vous savez que quasiment en même temps, vous avez célébré votre 300e match en L1 tandis que le gardien amiénois Régis Gurtner jouait son 300e match avec l’ASC. Est-ce que les joies peuvent être les mêmes ?
Cela reste évidemment un évènement particulier que ce soit pour Régis ou moi. Il faut savoir l’apprécier à sa juste valeur. Arriver à ce niveau c’est significatif d’une certaine réussite.
Pensez vous rejoindre vos deux collègues M. Kalt et M. Duhamel ?
Je n’en fais pas un objectif, le tout est d’avancer comme je l’ai fait depuis le début de ma carrière. Avancer saison par saison et match après match. Avec toujours le même plaisir et la même envie de prendre le sac pour officier chaque week-end.
Avez-vous quand même célébré ce 300e match ?
On a vraiment pas le temps d’y penser. Il y a un match à diriger, deux équipes sur le terrain, un enjeu sportif et un enjeu professionnel pour les clubs. Nous essayons d’être bon sur le terrain et prendre les bonnes décisions. L’objectif est que le match soit abouti et que le plaisir soit à la fin.
Vous êtes né à Amiens, vous avez joué à Licourt, vous êtes licencié au club du Pays Neslois et vous habitez Péronne. Vous êtes donc un pur samarien.
C’est vrai qu’après avoir joué à Licourt et Péronne, il a fallu faire un choix. Il a été difficile mais aujourd’hui je suis satisfait d’avoir fait ce choix.
Aujourd’hui, vous connaissez tous les stades de France de L1 et de L2. Est-ce qu’il y a une ville dans laquelle vous n’êtes jamais allé ?
J’ai fait tous les stades de France, en Europe et même au-delà. J’ai eu la chance et le plaisir de découvrir de nouveaux stades. Je suis allé en Chine pour le Trophée des Champions, au Chili mais je vous assure que cela fait plaisir de découvrir un stade pour la première fois. Je découvre le stade la veille du match lors de la conférence d’avant match. La veille du match, nous avons une séance athlétique d’une heure.
Depuis combien de temps vous faites équipe avec Guillaume Debart ?
Cela fait quatorze ans que nous sommes ensemble soit deux ans après mes débuts. Il va s’arrêter à la fin de la saison car il a des occupations à la Fédération. Nous avons débuté ensemble en 1993 avec l’examen à la salle Dewailly à Amiens avec l’école d’arbitrage animée par Didier Cotrel et Claude Cauvet. Nous sommes amis et nous nous voyons très régulièrement. Il faut savoir qu’à chaque match, nous sommes trois jours ensemble. Il y a une vraie complicité sur et en dehors des terrains. Nous nous connaissons très bien.
Quels sont vos contacts avec les joueurs ?
Il y a des joueurs qui sont plus ou moins difficiles à arbitrer. Il y a aussi des joueurs avec qui on échange plus souvent. Des liens peuvent même se créer. Dans l’ensemble, les rapports avec les joueurs sont cordiaux.
On parle beaucoup de l’expulsion temporaire. Etes-vous partisan ? Comment ces mesures seront appliquées et dans quel cadre ?
Il faudra bien expliquer aux joueurs. Cela va prendre un peu de temps.
Est-ce difficile de concilier arbitrage de haut niveau et travail au quotidien ?
J’ai d’abord été prof de sport (temporaire), ensuite employé dans une banque et ce n’était pas toujours facile. Aujourd’hui avec mon emploi à la Ligue c’est plus facile. Un poste s’est libéré et j’ai fait acte de candidature. L’arbitrage, c’est mon domaine.
Aviez-vous un modèle arbitre à vos débuts?
Non car au départ j’étais joueur. J’étais numéro 6 et j’ai pris quelques cartons mais c’était dans le jeu. Je jouais mais mon choix s’est fait naturellement même si la décision a été difficile à prendre. En effet, à cette époque, j’étais à la section Sports Etudes de Péronne qui venait d’ouvrir ses portes et j’avais participé à des sélections dirigées par Jacques Devismes, Jean Michel Lefèvre, Jacques Henot.
Vous êtes marié et vous avez des enfants. Font-ils du sport ?
Oui et j’ai même un fils qui va intégrer en tant que responsable de la communication, l’équipe de cyclisme Cofidis.
Vous êtes le premier à avoir dirigé un match avec la vidéo. Cette nouveauté est devenue une habitude aujourd’hui ?
C’est un plus pour l’arbitrage et elle fait partie du système. La vidéo nous permet de revenir sur un fait majeur car il y a eu tellement de matchs au cours desquels nous prenions une décision en nous demandant si c’était la bonne.
Au fait combien de kilomètres faites vous dans un match ?
En moyenne 12 kilomètres, un peu comme un milieu défensif. C’est la norme en Ligue 1.
Vous pourriez quasiment faire un marathon aux Jeux ?
Si je suis invité, pourquoi pas. Tout comme porter la flamme olympique quand elle passera chez nous.
Comment voyez vous l’arbitre de demain ?
Il faudra toujours qu’il court, qu’il soit athlétique, qu’il prenne les bonnes décisions et qu’il soit toujours le plus près du jeu sans le gêner.
Est-ce que les jeunes veulent aujourd’hui encore arbitrer ?
Il faut surtout les accompagner quand ils débutent, mais les chiffes sont là : Les candidats sont de plus en plus nombreux. Les jeunes arbitres sont en hausse. Et surtout l’important est de ne pas laisser seul sur un terrain un jeune arbitre.
Propos recueillis par Lionel Herbet
Crédit photo : Lionel Herbet – Gazette Sports