Cinquième à deux points de la tête il y a trois mois et demi, la réserve de l’Amiens SC est au bord du gouffre, pouvant même déjà être officiellement reléguée dimanche prochain.
Que s’est-il passé ? Fin janvier, après une victoire certes poussive contre Longueau, commençait à poindre, de façon implicite, la question de savoir si la réserve de l’Amiens SC pourrait se mêler à la lutte pour la montée. Il faut dire que tous les voyants étaient alors au vert. Non seulement elle était dans le peloton de tête, à seulement 2 unités du leader Lens (b), mais en plus la dynamique était-elle très prometteuse : sur les 9 matchs précédents, c’était tout simplement la meilleure équipe avec la 2ème attaque et la 2ème défense, 20 points (soit 2,22 par match) et 1 seule défaite au compteur pour 6 victoires.
Et depuis, patatras. Cela fait désormais 10 matchs que l’ASC (b) n’en finit plus de s’effondrer. Seul Lambres, défait 10-1 le week-end dernier, fait pire, et encore, seulement à la différence de but (on comprend bien pourquoi). Seulement 5 petits points inscrits, 7 défaites, l’avant-dernière défense et voilà donc les Amiénois non seulement relégables mais en plus dans une situation délicate, avec 4 points de retard sur le 9ème et un match déjà décisif contre un adversaire direct le week-end prochain.
Comment en est-on arrivé là ? De l’édifice solide…
Un petit point sur l’utilisation de l’effectif peut toutefois éclairer ces deux visages totalement différents de l’équipe d’Antoine Buron. Pendant sa bonne période, la formation amiénois a ainsi pu compter sur une vraie stabilité. Seulement 20 joueurs de champs utilisés et une équipe type bien claire qui se dégage.
Sur les onze joueurs le plus souvent alignés, 6 sont titulaires lors de 8 des 9 rencontres. De manière plus générale, Antoine Buron peut compter sur 8 joueurs, à minima, de son onze type à chaque fois – et même sur 9 de ses 10 joueurs de champ à 5 reprises. Sauf une, la seule défaite de cette période, à Valenciennes. Seuls 15 joueurs de champ sont titularisés plus d’une fois.
Et en dehors de cette équipe de base, le renfort ponctuel de pros (4 titularisations pour Sy, 3 pour Assogba, 2 pour Gene, 1 pour Ring) et quelques joueurs de complément présents régulièrement (Ilenikhena, Adon, El Idrissi, Tutuana, Ikia Dimi). Peu de joueurs n’entrent qu’à une ou deux reprises dans la rotation.
…au chantier permanent
Et puis, le château de cartes s’effondre. Plusieurs raisons à cela, la perte de joueurs importants du onze type et beaucoup plus de mouvement dans les compositions d’équipes. Ainsi, sur les titulaires de la période faste de cette saison, Diabaté et Boulet quittent le club, le premier en prêt, le second définitivement pour Clermont, Ouattara rejoint régulièrement les pros, n’étant plus que rarement disponible pour la réserve et, les uns après les autres, Bariki, le meilleur buteur amiénois, Lahmer et Beuvain se blessent.
Dès lors, pour compenser tout cela, il faut recomposer une équipe, sans les automatismes acquis jusqu’ici. Mais cela s’avère plus compliqué. Antoine Buron doit faire sans 4 joueurs minimum de son onze type du moment lors de 4 rencontres, et n’est même en mesure d’aligner 8 des 10 joueurs de champ qu’il utilise le plus sur cette période qu’à 3 reprises.
Un manque de stabilité qui s’illustre dans le nombre de joueurs utilisés. Quand il avait pu faire tourner avec parcimonie lors de la période précédente, il utilise cette fois 28 joueurs de champ dont 19 sont titularisés à plusieurs reprises. Au total, Antoine Buron aura même aligné d’entrée plus de joueurs sur ces 10 matchs (25 joueurs de champs, 27 avec les gardiens) qu’il n’en avait utilisé au total sur les 9 matchs antérieurs. Et 12 joueurs qui n’avaient pas été alignés lors des 9 matchs réussis auparavant ont fait leur entrée dans la rotation.
Des impondérables lourds de conséquence
Antoine Buron le rappelle souvent, coacher une réserve comporte des écueils supplémentaires par rapport aux autres équipes de son championnat. Et le fait est qu’aux blessures qui sont le lot de toutes les formations, il a fallu ajouter l’obligation de composer avec un effectif pléthorique, des montées en pro, des prêts pour s’aguerrir et des redescentes aléatoires de professionnels qui n’ont pas permis de solidifier l’édifice prometteur construit en première partie de saison par le technicien amiénois. Au point de devoir viser la remontée immédiate depuis la R1 la saison prochaine ? Le risque est réel. Et l’impact sur la formation amiénoise – et sur les professionnels, qui piochent allègrement en son sein depuis quelques saisons – encore difficile à mesurer.
Pour mieux se représenter l'ampleur du changement, voici les onze types, en fonction du temps de jeu et du nombre de titularisations, sur les deux périodes comparées : Onze type de la mi-octobre 2022 à janvier 2023 : Rongier – Degrumelle, Lahmer, Diabaté, Ouattara – Lutin, Beuvain, Junior Fofana – Bariki, Boulet, Touho Onze type de février 2023 à maintenant : Rongier – Degrumelle, Tutuana, Ouchouache, Bakayoko, El Idrissi – Lutin, Junior Fofana – Ikia Dimi, Zraa, Touho
Morgan Chaumier
Crédit photos : Kevin Devigne – Gazette Sports