RUGBY : Bilan et projection pour le RCA (1/2)

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Alors que la 1ère saison d’Amiens en Fédérale 2 est terminée, le maintien acté en mars, le président du RCA, Joël Nayet et l’entraîneur, Martin Saleille, en tirent les enseignements, en se tournant déjà vers la suite.

Entre fierté, ambitions, déceptions, optimisme et grand projet, les deux hommes forts du Rugby Club Amiénois livrent ensemble leur vision sur de multiples sujets.

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Voici la première partie de cette interview, évoquant notamment le bilan de la saison écoulée et les ambitions sportives pour la prochaine.

Quel bilan dressez-vous de cette saison ?

Martin Saleille :  L’objectif initial a été acquis avec le maintien, en plus à trois journées de la fin, ce qui est vraiment bien. Après, on avait en tête le top 8 que l’on n’accroche pas (le RCA s’est classé 10ème, ndlr), car on a raté des points sur quelques matchs à notre portée. On nous avait prédit une saison d’apprentissage et ça a été le cas.
On a vu notre capacité à bien figurer face aux équipes du top 4 face à qui, à l’exception du Havre, on a bien figuré. Et on a battu plusieurs équipes du top 6-8. On est capable de faire de belles choses mais on a manqué de constance. Sans se cacher derrière des excuses, on a eu énormément de blessures, ce qui nous a empêché de faire de la rotation et on a été dans l’apprentissage. Mais on reste en Fédérale 2 et c’est le principal.

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Quand on voit ce que vous avez été capable de produire à domicile sur la fin, on peut avoir quelques regrets ?

Joël Nayet : Je trouve que l’on avait une équipe bien homogène et performante, avec un ou deux trous, mais dans l’ensemble, l’équipe s’est bien comportée. Dans une saison, il faut aussi de la réussite. L’année dernière on l’avait, là sur des matchs, ça n’a pas tourné de notre côté non plus. Le président que je suis aurait préféré le top 8 mais on est maintenu et beaucoup de gens me laissent entendre que c’est une très bonne performance pour une première année. On pouvait faire mieux mais on va s’en contenter.

Sur les trois équipes montées de Fédérale 3, on est la dernière, ce n’est pas la place que j’envisageais.

Joël Nayet, président du RC Amiénois

On est encore un club jeune dont les structures ne sont pas encore stabilisées. Il ne faut pas oublier que l’on était en Honneur (jusqu’en 2019, ndlr). On a raté des points qui étaient à notre portée et qui nous auraient permis de finir dans le top 8. Sur les trois équipes montées de Fédérale 3, on est la dernière, ce n’est pas la place que j’envisageais. Face à Versailles et Saint-Malo, on a fait de bon matchs et cela prouve que l’on pouvait viser mieux.
Les joueurs ne sont pas les seuls responsables, chacun a sa part de responsabilité. On a eu pas mal de blessures et on pense que l’on a payé notre préparation. Le club monte de niveau et je pense qu’on n’en avait pas assez conscience en début de saison. Quand on a vu que l’on se déplaçait en région parisienne, on a été content pour les déplacements mais on a fait face à des équipes très costaud. On s’est fait les dents et l’on a appris lourdement mais cela va nous servir pour la suite.

Quand on voit que le noyau dur qui était là la saison dernière, voire en Honneur, a performé, c’est un signe positif pour vous ?

MS : C’est très positif. Il y a environ vingt joueurs du groupe présents en Honneur qui ont joué en Fédérale 2 cette saison. Sachant que certains étaient en réserve à l’époque, cela prouve que les mecs ont progressé. La capacité du groupe à monter de niveau est très intéressante. Je pense que si certains sont au seuil de progression maximal, d’autre peuvent encore progresser. C’est très bénéfique car ce sont des mecs qui vont nous apporter encore plus la saison prochaine. Les recrues, comme depuis plusieurs saisons, avaient pour but d’être des facteurs X ou de nous apporter de l’expérience et d’augmenter notre niveau. 

JN : Je considère qu’Amiens mérite un club au minimum en Fédérale 2 voire 1. La présence du club en Honneur n’était pas normale. Les joueurs ont su se mettre au niveau en montant d’un cran avec l’évolution du club. Être en Fédérale 2, c’est plus la place que je me fais du club d’une métropole comme Amiens. On est un club amateur, contrairement à ce que j’entends de temps en temps. On reste dans un monde amateur même si on touche au semi-professionnel, ce qui nous oblige à faire venir des joueurs de l’extérieur. Après, ce n’est pas pour le plaisir de faire venir des mecs de l’extérieur, mais c’est pour faire augmenter le niveau de l’équipe et du rugby en Picardie.
On a d’ailleurs une vraie crise de croissance car on passe d’un milieu associatif à un milieu amateur mais de grand niveau, qui nécessite plus d’hygiène de vie, d’entraînement et de rigueur d’une manière générale. On est en train de passer ce cap, ce qui n’est pas facile. En Honneur, on jouait un match et on faisait la fête tous les soirs, c’était très bien ! Mais là, il faut faire plus attention. 

Notre budget a triplé en quatre ans mais avec nos 600 000 €, on ne peut pas parler de monde professionnel…

Joël Nayet

C’est aussi l’une des explications à cette saison un peu compliquée : il a fallu que chacun s’adapte à ces nouvelles exigences ? 

JN : Les joueurs travaillent et ce n’est pas toujours simple. Le club est dans une mutation à tous niveaux qui n’est pas facile… La rigueur sportive est plus importante qu’avant. On représente un club mais aussi une ville et j’y suis très attaché. Amiens est la deuxième ville des Hauts-de-France et la Métropole doit avoir une belle équipe de rugby. Je m’engage dans cette logique et le club s’inscrit dans ce projet. 

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MS : La mutation est assez express quand même… On a connu deux montées en quatre ans ans, avec deux années Covid ! Ce n’est pas inédit, on l’a déjà vu, à l’image du Servette de Genève qui enchaîne les montées (la section rugby de ce club suisse, créée en 2014, rattachée à la France et à la Ligue Auvergne Rhône-Alpes, évoluait cette saison en Fédérale 1, ndlr), mais on n’est pas dans la même cour.
Mais pour un club comme nous, faire cela en si peu de temps, c’est très rapide. Il faut changer les habitudes, elles ont d’ailleurs déjà été modifiées de la part des joueurs. Ils ont pris conscience cette saison. L’année dernière, ça passait encore mais pas cette année…
Ce que l’on avait vécu en phase finale la saison dernière, c’est ce que l’on a vécu toute la saison. Les mecs se sont dit qu’ils devaient s’entraîner de plus en plus fort. Ils ont fait des efforts et la question est de savoir comment les accompagner pour qu’ils puissent continuer et que l’on ait de meilleurs résultats. 

Peut-on vraiment imposer à des joueurs amateurs qui travaillent une telle rigueur ?

MS : Forcément, ce n’est pas comme si les joueurs étaient professionnels et que c’était leur métier. Puis ce qui fait la différence, c’est l’envie de jouer. À partir du moment où il y a de l’émulation entre les joueurs et de la concurrence, cela les pousse à se surpasser pour gagner leur place. Depuis que je suis arrivé (en 2015, ndlr), j’ai senti cet esprit de compétition qui anime les joueurs. Cette envie de gagner, c’est ce qui fait tenir dans le monde amateur, avec l’envie de prendre du plaisir ensemble. On n’a donc pas de souci de ce côté et d’eux-mêmes, ils s’imposent cela sans problème.

JN : Je le dis depuis le départ, on est un club amateur avec ses contraintes mais cela n’est pas incompatible avec nos ambitions. À l’exception de quelques salariés à plein temps, les rémunérations au club sont minimes. Ce qui tient les joueurs, c’est l’envie de jouer pour ce club. Quand on n’a pas la chance de devenir professionnel, pouvoir évoluer à un haut niveau doit être satisfaisant. Je crois que c’est ce qui anime le sportif, évoluer au plus haut niveau. Notre budget a triplé en quatre ans mais avec nos 600 000 €, on ne peut pas parler de monde professionnel… On est animé par l’amour du rugby et du sport. 

Un duo d’entraîneurs Martin Saleille – Mickael Morainville

Il va y avoir l’arrivée de Mickael Morainville. Quel est l’objectif ?

JN : C’est un choix du bureau pour renforcer le staff et en se disant que sans la formation, durablement, on n’y arrivera pas. Malheureusement, les années Covid et les travaux avec la Ligue des Hauts-de-France sur l’arrivée du centre labellisé ont pris du retard et l’ouverture est prévue en 2024. On espérait l’avoir cette saison et on ne ne peut pas continuer à attendre, surtout sur des décisions dont on ne maîtrise pas tout.
On va donc essayer de monter un projet rugby avec le scolaire, que ce soit à l’Université ou avec la Cité scolaire. En accueillant des jeunes, que ce soit au niveau de l’hébergement et du suivi sportif. C’est un énorme projet sur lequel on travaille déjà depuis trois ans. On va pour l’instant d’échec en échec avec le Covid. Puis l’arrivée d’Anthony Scelers, chargé du projet, qui est finalement parti et la Ligue qui a repoussé la date. On va donc prendre notre avenir entre nos mains quand la formation est essentielle.
Pour cela, on a le collaborateur idéal avec Martin, qui était venu à la base pour structurer le club. Pour cela, il faut l’aider en lui dégageant du temps. C’est pour cela que Mickael va venir, pour le détacher de certaines tâches sur le groupe senior. Ce sera donc un duo, comme ça peut exister dans beaucoup de clubs. Je m’inscris dans un futur de Fédérale 1 et je veux structurer le club dans ce sens, et ce dès cette année.
Je souhaite par exemple qu’on laisse beaucoup plus de place aux jeunes dans l’équipe réserve. Pas que les anciens ne soient pas importants, mais il est essentiel que nos jeunes puissent jouer à un bon niveau. On réfléchit d’ailleurs à une troisième équipe avec l’Entente Somme, pour que tout le monde puisse jouer un maximum. On doit se structurer pour être prêt, dans un futur proche, à jouer en Fédérale 1 et à s’y installer.
Mickael vient de Rouen, qui est un de nos clubs partenaires et on est très heureux de l’accueillir. On va continuer à s’appuyer sur notre club partenaire pour continuer à grandir. Martin va alors être dégagé d’un quotidien qui l’envahit, charge à lui de prendre le temps nécessaire pour mettre en place sa nouvelle mission. 

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La priorité est de conserver une grosse partie de l’effectif.

Martin Saleille, entraîneur du RC Amiénois

C’est aussi l’occasion d’apporter un regard extérieur sur le groupe senior et une remise en question des joueurs, les cartes étant plus ou moins rebattues ?

JN : Comme j’ai pu l’évoquer récemment, le club est en pleine mutation, que ce soit sportive et culturelle. On a un bureau de dirigeants qui s’est élargi, à la fois en qualité et en quantité. Il faut aussi que l’ensemble de l’encadrement évolue. Cela va amener du changement et un autre regard qui peut nous être bénéfique. 

Quel va être l’objectif en termes d’effectif pour la saison prochaine ?

MS : On ne va pas tout révolutionner ! La priorité est de conserver une grosse partie de l’effectif. Changer pour changer, ça n’a pas d’intérêt et on reste dans notre philosophie des dernières années. Tout changer, déjà c’est compliqué et on n’en a pas forcément les moyens et surtout il n’y a pas la nécessité de tout chambouler. L’objectif est de se renforcer à des postes bien précis pour faire progresser les joueurs individuellement et le niveau collectif. On va aussi avoir quelques jeunes qui vont monter et qui pourront jouer dans un premier temps avec la réserve et pourquoi pas plus, s’ils progressent bien. On commence à trouver des jeunes de la formation qui sont en capacité, à leur passage en seniors, d’intégrer le groupe et c’est ce que l’on recherche. 

L’ASC, au foot, ils ont eu leurs meilleurs résultats sous Pelissier, quand il y a eu de la stabilité. (…) C’est ce que je souhaite faire.

Joël Nayet

JN : On va essayer d’avoir un budget identique, on ne va donc pas faire de folies ! Il faut continuer de s’implanter pour ensuite avancer. On s’est renforcé l’année dernière avec quelques joueurs, avec plus ou moins de réussite, mais au final on a atteint l’objectif. On va essayer de faire venir quelques joueurs de l’extérieur qui viendront nous renforcer sur des secteurs clefs mais aussi pour combler certains départs. Mais on ne va pas prendre une dizaine de mecs et tout modifier. Je m’appuie sur des expériences voisines où, quand ils ont changé la moitié de l’équipe, n’ont pas forcément eu de meilleurs résultats.
Si l’on prend l’exemple de l’ASC au foot, il ont eu leurs meilleurs résultats sous Pelissier (Christophe Pelissier, arrivé en 2015 en National, parti en 2020 après des montées en Ligue 2 et Ligue 1, ndlr), quand il y a eu de la stabilité. C’est sur cela que je m’appuie et que je souhaite faire. Ceux qui pourraient attendre beaucoup de recrues seront déçus, il y aura juste quelques recrues pour renforcer l’équipe techniquement et tactiquement. On a déjà commencé à travailler dessus et on espère boucler cela rapidement. On aura en tout cas acquis une année d’expérience, qui sera peut être notre meilleure recrue ! 

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Vous aviez la saison précédente trois joueurs sous licence étrangère. Le règlement ayant changé, seulement deux peuvent jouer ensemble. Est-ce que cela va changer la saison prochaine ?

JN : C’est effectivement un problème de laisser un joueur de ce niveau en réserve et pas évident à gérer pour le staff. On avait anticipé une montée en Fédérale 2 avec la possibilité à l’époque d’aligner trois joueurs avec licence B en même temps. Finalement, on n’a pu jouer qu’avec deux en même temps. On payait donc à chaque fois un joueur qui ne peut pas jouer et c’est problématique quand on a un budget qui n’est pas extensible.
On a donc fait le choix de ne pas prolonger le contrat de Ruan Van Rensburg qui arrive à échéance. C’est un joueur très talentueux et qui nous a apporté, mais la situation était compliquée à gérer et cela nous laissera de la marge au niveau budgétaire. On a fait le choix de le libérer lui et pas un autre car son contrat se terminait. Je tiens d’ailleurs à remercier Ruan pour son passage et je n’ai aucun doute qu’il va retrouver un projet. 

Quel sera l’objectif la saison prochaine ?

JN : On pourra, je pense, jouer le top 6, c’est en tout cas ce que je fixe comme objectif à Martin. Avec une année d’expérience, la qualité de l’équipe, les recrues et un peu plus de réussite et surtout moins de blessures, c’est jouable.

À suivre très prochainement la seconde partie de cette interview. Elle évoquera essentiellement l’équipe féminine des Licornes et ses brillants résultats. Ainsi que les nombreux projets du club.

Propos recueillis par Aurélien Finet
Crédit photo : Léandre Leber – Gazette Sports (archives)