Après le concours de Jean-Baptiste Bruxelle, nous avons pu retrouver son entraîneur au-dessus du virage sud de l’Olympiastadion. Pour évoquer les qualifications auxquelles venait de participer son athlète, et plus généralement sa saison, et la place de cette compétition dans son projet.
Quelle analyse faites-vous de ce concours ?
Je suis assez satisfait du comportement du J-B sur le concours. C’est le plus jeune, c’est sa première grosse compétition internationale en senior. Et on voit qu’il est rentré dedans, qu’il n’a pas eu peur. Après, la perf n’est pas extraordinaire, mais le premier jet hors secteur est meilleur, je ne sais pas si cela était suffisant, mais celui-là était une bonne perf.
C’est hyper intéressant pour l’avenir, parce qu’il rentre dans un grand championnat comme ça en sachant qu’il a les moyens. Ce qui est important, c’est surtout son comportement qui a été vraiment intéressant.
Ça a été important de pouvoir s’imprégner de ce genre d’événement ?
Oui, parce qu’il a fait des championnats jeunes, mais c’est une autre dimension. Là, dans son concours, il avait 4 finalistes des championnats du Monde, il aurait pu être impressionné, se décomposer. Et non, il se sent à sa place, et ça c’est important.
C’est encourageant, on sent qu’il est vraiment dans son monde. Pour l’avenir, il sait qu’il est là, qu’il a sa place parmi ces grands lanceurs. Il a tout l’avenir devant lui. Et, j’aime bien les statistiques, on peut voir que sur les 5 présents sur les podiums mondiaux et européens juniors l’année dernière, c’est le seul qui est parvenu à se qualifier pour les championnats d’Europe. Cela veut dire qu’il a une constance et une progression assez forte.
On a la sensation qu’il a de la confiance mais pas d’excès de confiance en lui ?
Oui, complètement, il est dans un bon état d’esprit. Il sait ce qu’il vaut, il a confiance en lui. Là, on a fait une bonne séance à l’entraînement, donc il sait qu’il est prêt, ça lui donne cette confiance. Il ne va pas se dire qu’il va être champion olympique, en tout cas, pas tout de suite. Mais il a confiance en lui, en ses capacités. Et c’est un travailleur.
La saison a été un peu difficile parce qu’avec le système de ranking, on a été obligés de travailler un peu différemment de ce qu’on faisait avant. C’est-à-dire de faire beaucoup de compétitions pour marquer des points. Il a fait 9 compétitions de suite, sur autant de semaines, c’est beaucoup, parce que pendant ce temps-là, on ne peut pas s’entraîner, avec les déplacements. Mais il est dans son monde, à sa place.
Il nous avait dit que ce n’était pas ce qu’il préférait…
Non. En fait, il fait une grosse perf cet hiver, il fait plus de 75, les minimas, c’était 77 pour ici et 77,50 pour les Mondiaux. On avait deux stratégies qui s’ouvraient. Ou on se disait qu’il était capable de faire 77,50, mais c’était quand même énorme. Ou alors on jouait le ranking, et dans ce cas, il fallait passer sur une stratégie où il faut faire beaucoup de compétition, ce dont il n’a pas l’habitude. Lui, ce qu’il aime, c’est se préparer pour une compétition, pour un objectif.
Il est avec des gens qui ne font que ça, dont c’est le métier, qui sont de grands professionnels avec énormément d’expérience. Lui, c’est le petit jeune qui arrive dans ce monde, mais il trouve sa place. C’est vraiment intéressant.
Mais, bon, ça y est, il est sénior, ça devient son métier, il faut apprendre à faire ça. Ce n’est pas ce qu’il préfère, c’est sûr, mais il fait le boulot.
Ça a finalement été une saison globale d’apprentissage d’une nouvelle façon de travailler ?
Complètement, c’est ça. Il est passé du côté ludique, jeune, où même s’il a fait des compétitions internationales, on n’était pas dans le même environnement à une position professionnelle, où il est avec des gens qui ne font que ça, dont c’est le métier, qui sont de grands professionnels avec énormément d’expérience. Lui, c’est le petit jeune qui arrive dans ce monde, mais il trouve sa place. C’est vraiment intéressant.
Cette compétition, c’était une étape avec l’idée de revenir sur des échéances futures mais plus forcément dans la même position ?
Tout à fait. De toute façon, on a un projet assez clair. On a d’abord les Jeux de 2024 dans l’objectif. Alors, évidemment – sauf si… – 2024, on ne peut pas penser faire une médaille. Mais en tout cas pouvoir se qualifier en 2024 et avoir un objectif 2028 pour jouer les premiers rôles. Et pour ça, il faut passer par ces étapes. Parce qu’il faut avoir ces expériences des grands championnats, cette année les championnats d’Europe, la saison prochaine, l’objectif, ce sera les Mondiaux, de pouvoir se qualifier et pourquoi pas passer une étape supplémentaire pour monter les échelons au fur et à mesure des grands championnats.
Pour vous aussi, cette compétition a pu être une forme d’apprentissage ? (C’était son premier grand championnat senior, ndlr)
Oui, tout à fait. Même si j’ai eu de l’expérience sur tous les championnats jeunes, c’est aussi une forme d’apprentissage sur un grand championnat comme ça. Après, côté coach, hormis la taille du stade et le nombre de personne dedans, ça reste semblable à ce que j’ai pu faire avant.
C’est tout de même agréable à vivre ?
C’est même plus qu’agréable, je suis un passionné, je vis pour ça, pour vivre ces moments-là. Et encore, ce matin (mercredi matin, ndlr), il n’y a pas énormément de monde, mais quand on est comme hier soir avec un stade plein et une ambiance de feu (l’Allemagne y avait notamment récolté deux médailles d’or, soulevant la foule compacte et bruyante de l’Olympiastadion, ndlr), c’est vraiment génial. J’avais connu ça aux championnats du Monde en 2003, je ne coachais pas, j’étais venu tous les jours, c’était énorme.
De notre envoyé spécial à Munich, Morgan Chaumier
Crédit photo : Kevin Devigne (archives) / Morgan Chaumier – Gazette Sports