FOOTBALL : Cédric Blomme, une sélection nationale pour nouveau défi

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Alors qu’il vient de devenir responsable de la préparation physique de la sélection marocaine féminine, nous nous sommes entretenus avec Cédric Blomme. L’occasion d’évoquer son parcours déjà très riche, son nouveau rôle, mais aussi l’évolution permanente de son métier.

Bonjour Cédric, pour commencer, pouvez-vous vous présenter ?

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Je m’appelle Cédric Blomme, j’ai 42 ans, je suis préparateur physique dans le milieu professionnel depuis 2006. Je suis Amiénois, j’ai fait toutes mes études à la FAC des sports d’Amiens, ensuite j’ai été footballeur au niveau régional à Albert. En même temps j’ai passé mes diplômes de foot avec la Ligue de Picardie et j’ai obtenu mon DES. Et j’ai commencé à entraîner des jeunes à Villers Bretonneux, puis à Albert, et je suis parti à Arras avec Christophe Raymond. Par la suite, en 2006, j’ai signé mon premier contrat pro au Mans, en tant que préparateur physique adjoint.

Quel est votre parcours dans le monde professionnel ?

Après Le Mans, j’ai signé à Sochaux, avec Frédéric Hantz. Là-bas je suis préparateur physique durant 5 ans, et je travaille avec Francis Gillot, puis avec Mecha Bazdarevic. En juin 2012 je signe avec Mecha Bazdarevic au Qatar où l’on fait une saison avant de revenir en France. Là, je rencontre Azouz Hamdane, je lui propose mes services, et je reste une saison avec l’ACA. La saison, qui suit, en 2014, je commence avec lui, et Francis Gillot m’appelle et me propose de signer en Chine à ses côtés, ce que j’accepte. Après cette expérience j’ai fait deux nouvelles saisons au Qatar avec Djamel Belmadi. Et fin 2017, je signe à Auxerre avec Francis Gillot. Jean-Marc Furlan et ensuite arrivé avec son staff, et j’ai donc signé deux ans à Nancy avec Jean-Louis Garcia.

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Cédric Blomme, alors en poste au Qatar

Une aventure nancéienne qui s’est clôturée récemment…

En décembre dernier le club a été vendu. En même temps que cette vente, j’ai eu une proposition pour partir sur un projet avec la fédération du Maroc sur le foot féminin, en tant que responsable de la préparation physique de la sélection A des féminines. Un projet intéressant avec la CAN 2022 qui va se passer au Maroc et les qualifications pour la Coupe du Monde 2023 en Nouvelle Zélande, qui vont démarrer aussi en 2022. On prépare bien cette CAN car les quatre demi-finalistes sont qualifiés directement pour la Coupe du Monde. Donc si on peut éviter de passer par le couperet des qualifs ce serait pas mal.

Est-ce difficile de refuser une sélection ?

Pas quand on connaît la situation dans laquelle j’étais à Nancy, à savoir que ça s’est passé en décembre et j’étais en fin de contrat en juin. Le club venait d’être racheté mais je n’avais aucun signe de la direction sur un éventuel projet m’incluant dedans. Donc j’ai fait part de la proposition au coach. Ça m’embêtait de terminer l’aventure comme cela, mais j’avais une proposition sur 3 ans, sur un gros projet, avec une fédération qui est l’une des fédérations africaines les mieux organisées. Ajouté à tout le contexte qu’il y avait, ça me paraissait logique d’accepter.

Ce projet comporte deux nouveautés pour vous : première fois que vous allez travailler avec des femmes et première fois avec une sélection ?

Nouveau public avec des féminines et avec une sélection où le travail est quotidien, mais pas sur le terrain tout le temps. Il y a un travail d’organisation des futures dates FIFA. Là je n’ai pas de suivi quotidien sur ce qu’elles font à l’entraînement, je vais les avoir 10 jours pour les dates FIFA tous les mois. Après il y a les contacts avec les préparateurs des clubs, pour savoir comment elles vont, ce qu’elles font, pour avoir une liaison. C’est un travail totalement différent. C’est tout à mettre en place avec nouveau projet, une nouvelle expérience à l’étranger aussi, un nouveau continent… J’aurais fait l’Asie, l’Afrique, l’Europe, il ne manquera plus que l’Océanie et l’Amérique (rires).

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Cédric Blomme lors de sa période à l’AC Amiens

Ce poste de préparateur physique en sélection implique-t-il un dépassement de fonction ; par exemple d’observer des joueuses ?

C’est un tout, c’est un travail de staff et ça dépend les missions que nous donne l’entraîneur (ndlr : Reynald Pedros est le sélectionneur). Les trois quarts de nos joueuses sont du même club, le club du FAR, de l’Armée Royale, ils ont une grosse section féminine, ce sont les championnes en titre. Quand on va voir les matchs du FAR on voit les adversaires aussi en fait. Bien sûr, sur ces matchs-là, moi j’ai un regard sur le niveau athlétique des joueuses.

L’objectif sera de rentrer dans le dernier carré de la CAN pour se qualifier pour la Coupe du Monde

Quels sont les objectifs de cette sélection marocaine ?

On sait qu’il y a des grosses nations : Ghana, Nigéria, Afrique du Sud voire même la Guinée. On a une année et demie pour bien travailler avec les filles, pour pouvoir les amener loin. L’objectif sera de rentrer dans le dernier carré de la CAN pour se qualifier pour la Coupe du Monde.
Par ailleurs, on va pouvoir récupérer les filles qui jouent au Maroc certaines semaines. C’est-à-dire qu’on va les récupérer, elles vont s’entraîner avec nous la semaine, et elles repartiront dans leur club le week-end.

Pour en revenir à votre profession ; d’une manière générale, avez-vous vu une grosse évolution du métier de préparateur physique depuis vos débuts ?

Le travail a évolué dans le sens où la technologie a évolué. Le suivi des joueurs a évolué au travers des technologies, on arrive à mieux gérer la charge d’entraînement, mieux gérer pas mal de choses autour du joueur. Cela permet aux footballeurs d’être quasiment tout le temps performants sans avoir de trou. C’est ça l’objectif du préparateur. La place de la partie athlétique à travers le foot a évolué aussi, dans un championnat comme la Ligue 2, si vous n’êtes pas prêt physiquement vous n’existez pas. C’est un combat permanent chaque week-end, il y a beaucoup de duels, d’intensité. En Ligue 2, la dimension athlétique a une très grande importance.

C’est un métier qui demande une grande adaptation ?

Oui, on a vu l’apparition du GPS, des plateformes au niveau des questionnaires technologiques, couplés aux données chiffrées. Tout cela il a fallu s’y adapter et s’y former. C’est une perpétuelle adaptation, une perpétuelle innovation dans le travail. Après il ne faut pas oublier que ce n’est jamais le GPS qui mettra le ballon au fond, ce n’est jamais le GPS qui fera faire les courses. Ce sont des outils qui aident le joueur à être plus performant. Je resterai assez humble, pour dire que ce n’est pas moi qui fais gagner les matchs. Bien sûr que l’on fait partie de la performance, mais comme tous : le kiné, le médecin, l’intendant, tout le monde à sa part dans la performance de l’équipe. Il ne faut pas se tromper en disant : c’est grâce au préparateur physique que l’équipe gagne. C’est d’abord grâce aux joueurs et à ce que l’entraîneur insuffle.

Après il ne faut pas oublier que ce n’est jamais le GPS qui mettra le ballon au fond, ce n’est jamais le GPS qui fera faire les courses

En parlant d’adaptation permanente, cela a du se vérifier cette année avec la Covid…

Nous on l’a vécu à Nancy avec un petit cluster où l’on a eu 20 cas d’un seul coup, c’est sûr que c’est une découverte, on allait dans l’incertitude totale. On ne savait pas comment les joueurs allaient réagir à la sortie de leur isolement, comment ils allaient réagir aux premiers efforts qu’ils allaient faire. Il y avait un protocole, avec une reprise très progressive pour voir l’adaptation, et des examens cardios pour les joueurs qui sortaient du covid, pour voir s’il n’y avait pas de problème pour les intégrer au collectif par la suite.

Les joueurs réagissaient bien à leur retour du Covid ?

Sur les premiers matchs oui, on a eu un bon retour, plein d’envie, plein d’influx. Et au fur et à mesure on s’est aperçu que l’on a un peu accusé le coup et c’était surtout dans une période, fin novembre, où l’on enchaînait les matchs tous les trois jours. Donc une période très compliquée où on a fait une série catastrophique à la sortie de notre Covid. On ne va pas tout mettre sur le dos du Covid mais ça ne nous a pas aidé.
Au final on a vu une baisse de la performance, pas une atteinte au niveau de leur santé, juste un contrecoup athlétique. Avec l’arrêt d’une semaine en isolement et après la reprise progressive, ça fait quasiment quinze jours d’arrêt, donc pour un sportif de haut niveau c’est vraiment beaucoup.



Propos recueillis par Quentin Ducrocq

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