Rencontre avec Patrick, Eloumou Boteba, un judoka amiénois, un colosse de 38 ans, qui affiche 97 kilos sur la balance et 2 mètres sous la toise, un véritable « Lucky Luke » de la bonne humeur il dégaine le sourire et le rire plus vite que son ombre. Cet amiénois, manager dans un institut de sondage spécialisé dans les médias, affiche un parcours sportif qui sort vraiment de l’ordinaire….!Il a débuté sur les tatamis du Cameroun à l’âge de 9 ans, très vite, il affiche de belles dispositions dans cet art martial.
Au départ, il considérait ce sport comme un loisir, avant d’en faire, les premiers titres régionaux, puis nationaux arrivant, une véritable passion !
« J’ai commencé par rafler tous les titres régionaux, dans les catégories jeunes, ce qui m’a valu d’être rapidement surclassé. En cadets, je « tirais » avec les juniors, puis je m’entraînais avec les seniors. A 17 ans, j’ai intégré l’équipe nationale. En 1995, j’ai participé, avec les seniors, aux Jeux africains à Harare, au Zimbabwe, où j’ai disputé une finale de bronze ; j’ai terminé 5ème. Ce fut ma première récompense internationale ! Au retour de cette compétition, alors que je venais d’être sélectionné pour les jeux Olympiques d’Atlanta et que mes distinctions sportives faisaient la joie de mes parents,mon père me rappela ses priorités : Il voulait absolument que je consacre l’essentiel de mon temps, à mes études. C’est ainsi, qu’à 18 ans, au moment où nous sommes arrivés à Amiens , j’ai dû abandonner mon kimono pour entreprendre mon parcours estudiantin , pas question d’espérer suivre une formule genre Sports études, le refus parental était clair et net ! Mais comme je voyais bien que le judo ne nourrissait pas son homme, j’ai fait contre mauvaise fortune bon cœur »
La vie quotidienne a alors repris son cours, loin des tatamis, l’ami Patrick, concède avoir bien remis les pieds dans un dojo, mais quelques très rares fois, et seulement pour se maintenir en bonne forme physique.
Baccalauréat, mariage, naissance d’un enfant, tout se déroulait sans anicroche notable, jusqu’au dernier trimestre 2014, lorsque les ennuis s’accumulent pour Patrick. Problèmes personnels et professionnels (dur, dur d’être un délégué syndical !).
« Alors que j’étais en pleine tourmente et pour décompresser, afin de me libérer de cette énergie négative et de cette rage qui m’habitaient pendant cette période, je suis allé faire un tour à Longueau, au club de judo »
Pourquoi avoir choisi le judo, plutôt que le psy pour lutter contre cette grave déprime frustrante ?
« Je pensais que les valeurs et la combativité qui caractérisent ce sport pouvaient me permettre de positiver toutes ces énergies négatives. C’est exactement ce qui s’est passé !, Le judo, ce sport qui fut ma passion d’enfance et d’adolescence, qui a également beaucoup contribué à forger ma personnalité m’a permis de retrouver : code moral , respect et contrôle de soi. Pour moi, qui avais envie de tout broyer, c’était important de remettre de l’ordre dans ma tête et dans ma vie, afin de retrouver l’esprit de compétition et le courage de se battre. Le judo m’a permis de cristalliser, toutes ces rancœurs et de les transformer en énergies positives !
En septembre 2014, Patrick, rejoint le judo club de Longueau et au rythme d’une fois par semaine, il « entretient sa forme » physique, mais, très vite l’envie de reprendre la compétition le titille. Au bout d’un mois et demi d’entraînement, il s’inscrit, « juste par curiosité « , histoire de se jauger un peu, au tournoi départemental des ceintures noires, de Villers-Bretonneux, qui regroupe toutes les catégories et toutes les tranches d’âge de la Somme. « A ma grande surprise, j’ai remporté la victoire ! »
Ensuite, tout s’est enchaîné très vite, cette première compétition étant qualificative pour les demies finales des championnats de France, Patrick s’y rend et termine second, une place qui le qualifie pour entrer dans la catégorie Elite, « la Division 1 du judo » !
Il trouve le temps, fin novembre 2014, de s’inscrire, « toujours en curieux « , aux championnats du monde WIBK Budokai, en vétérans, qui se sont déroulés à Coppet , en Suisse. Il n’a pas fait le voyage pour rien, il revient avec le titre mondial ! Une récompense qui est passée inaperçue dans la presse locale.
Ses performances antérieures à ce titre l’ont également qualifié pour les mondiaux IJF (Fédération Internationale de Judo) qui se déroulent, à partir du 24 septembre 2015, à Amsterdam.
« Il va y avoir du beau monde, et dans ma catégorie, vétéran, moins de 40 ans, moins de 100kg,où je vais représenter la France, je vais croiser des adversaires qui ne font que ça, alors que, pour ma part, je n’ai repris le judo, en loisirs, que depuis à peine plus d’un an ! Après 20 ans d’interruption, je ne pensais pas arriver aussi vite à ce niveau »
Pour ce tournoi mondial, as-tu suivi une préparation spécifique ?
« Tout à fait, J’ai du améliorer ma condition physique, en augmentant les séances d’entraînements, je suis passé à 2 ou 3 par jour. : à cela s’ajoute un travail foncier ; course, endurance, et renfort musculaire, je pense être affûté pour cette compétition , même si j’ai eu quelques pépins physiques, qui ont un peu freiné ma préparation, mais globalement , je pense être aussi prêt que possible.
Je profite de cette question pour remercier quelques personnes qui m’ont bien épaulé : le Judo-club de Longueau et sa présidente Simone Quillet, qui m’ont accueilli chaleureusement, Grégory Quillet, l’entraîneur de judo et Taïso 4ème dan, qui m’a concocté ce programme de préparation spécifique, et je n’oublie pas mon employeur qui m’a permis d’aménager mon emploi du temps pour que je puisse m’investir à fond dans ces mondiaux ! »
Propos recueillis par Jicehel
Dernière minute: c’est officiel, Super Patrick a conquis de haute lutte le titre de Champion du monde de judo, catégorie vétérans, moins de 100kg et moins de 40 ans, le 24 septembre 2015, à Amsterdam, il devient donc double champion du monde de judo, dans 2 fédérations différentes, dont la plus huppée,la Fédération Internationale de Judo !!