BASKET-BALL : Un divorce inévitable à l’ESCLAM
De nouveau leader de Nationale 3 après son succès dans le derby face à l’Amiens SC (98-67), le club de Longueau a vécu un véritable mélodrame dans la foulée de cette victoire. Au lendemain de la démission de Franck Haleine de son poste d’entraîneur de l’ESCLAM, le président du club, Serge Tristram, qui a déjà trouvé son remplaçant en la personne de Liam Michel, revient sur le départ de son entraîneur à trois journées de la fin du championnat. Quant au principal intéressé, Franck Haleine, il livre les raisons d’une décision particulièrement brutale mais loin d’être inattendue.
Les coulisses du départ de Franck Haleine
Gazette Sports : Serge Tristram, votre entraîneur a décidé de démissionner à trois journées de la fin, comment expliquez-vous ce choix ?
Serge Tristram : Cette situation est vraiment triste. Franck a tenu des propos très sévères à mon égard. Je trouve que c’est infondé de dire que nous n’y connaissons rien au basket et au monde professionnel. Je tiens à lui rappeler que Longueau n’est pas un club professionnel. Dans la vie, il faut savoir s’adapter au contexte auquel on est confronté, à savoir un espace entre le monde professionnel et le monde amateur. Il n’a pas su le faire. Quand j’ai pris la présidence du club, nous avons ramené des joueurs pour permettre à Franck de performer. Le conseil d’administration et moi-même avons fait le travail d’un entraîneur.
GS : Le départ de Franck Haleine, en fin de saison, était déjà acté depuis samedi soir…
ST : Il ne s’est pas senti soutenu mais il a toujours été l’entraîneur de Longueau à mes yeux. Il n’a jamais été viré. J’ai appris son départ par le biais de la presse puisqu’il a communiqué cette information à l’issue du match face à l’Amiens SC. Ce sont des choses qui peuvent arriver, il était là depuis six ans, la vie d’un club est faite de cycles. Nous avions déjà envisagé cette hypothèse aussi du club depuis plusieurs semaines.
GS : Dans un premier temps, votre volonté était de partir à l’issue de la saison, votre décision a donc été murie au fil du week-end…
Franck Haleine : Effectivement. Je me suis posé, j’ai pris en compte les réflexions des dirigeants à mon égard, ils parlent beaucoup trop avec les joueurs. Cela démontre qu’ils ne connaissent pas bien le basket et le sport de haut niveau. C’est inconcevable et irrespectueux de voir un président qui parle avec les joueurs pendant un match, de voir un président qui négocie mon départ avec les joueurs. Cela participe au carnaval de ce club de Longueau. J’arrête sur un derby, après avoir repris la première place, cela me semblait être le bon moment pour le faire. Le tout face à Frédéric Domon, une personne que j’apprécie beaucoup et qui a également eu des soucis avec les dirigeants.
Les raisons d’un départ
GS : Ce fut de nouveau le cas, samedi soir…
ST : C’était la goutte d’eau qui a fait déborder le vase aux yeux de Franck. Cette situation n’a pas été voulue par les dirigeants. Je n’étais pas à leurs côtés au moment de l’invective. Je pense aussi que Sophien n’a pas apprécié la teneur des propos de Franck. Nous sommes dans un monde sportif, il y a un respect mutuel qui doit exister. Lors de la réunion entre joueurs, hier soir, 40% d’entre eux étaient soulagés du départ de Franck. Ils étaient frustrés par leur temps de jeu, de choix tactiques qu’ils ne comprenaient pas forcément. D’autres, plus sentimentaux, ne comprennent pas comment nous pouvons se retrouver dans cette situation. Ils ont eu le mérite de se parler, maintenant il faut que les leaders assument leur rôle.
Un dialogue totalement rompu
GS : Serge Tristram, avez-vous été tenté de retenir Franck Haleine ?
ST : Même si je trouve honnête et respectueux qu’une majorité de joueurs soit encore attachée à Franck, cela n’a jamais été dans ma réflexion. Cela prouve qu’il parvenait à fédérer une grande partie de son vestiaire mais il fallait aussi prendre en compte la minorité avec laquelle cela se passait mal.
GS : Franck Haleine, une majorité du vestiaire semblait vouloir poursuivre l’aventure avec vous, cela n’a pas pesé dans votre décision ?
FH : J’ai discuté avec de nombreux joueurs. Les plus jeunes sont déçus parce qu’ils ont pu évoluer à mes côtés, c’est une fierté et une satisfaction. Ensuite, certains cadres m’ont appelé et c’était une attention qui fait toujours plaisir. Ils ont été exemplaires jusqu’au bout.
GS : Il y a certainement un goût d’inachevé de ne pas être allé au bout de ce défi…
FH : C’est une grande déception. J’ai quand même passé cinq saisons dans ce club. Je pars avec un club premier de Nationale 3, je pense avoir fait du travail correct. Je remercie tous les joueurs qui ont participé à cette aventure. Malheureusement, ce n’était plus possible de continuer. Le président ne venait pas à l’entraînement. C’est donc difficile pour lui de savoir ce qu’il s’y passe. Il devait mettre en place un règlement interne pour punir les joueurs en fonction des retards et des absences. Ce n’est pas encore fait. Pour autant, la très grande majorité des joueurs a été très sérieuse. Je n’avais la main que sur le sportif, j’ai donc fait des choix en fonction du degré d’investissement de chacun en ne donnant pas de temps de jeu à certains joueurs. Ensuite, c’était au président de prendre des décisions sur le plan financier. Il n’a jamais joué au basket, il n’a jamais entraîné, il a peut-être voulu assumer un rôle pour lequel il n’avait pas les compétences et il en a oublié l’essentiel.
Leurs avenirs respectifs
GS : Serge Tristram, alors que vous êtes de nouveau en position favorable pour obtenir la montée en Nationale 3, il vous faut trouver un nouvel entraîneur…
ST : C’est tout de même incroyable de devoir tout modifier à trois journées de la fin alors que nous sommes en tête de notre poule. De toute façon, c’est dans la lignée de la riche et mouvementée saison que nous vivons actuellement. Jusqu’au bout, nous ne serons pas ménagés mais je reste persuadé que cela ne freinera pas notre élan. Maintenant, la solution sera interne par le biais d’entraîneurs qui réalisent un excellent travail. Le plus compliqué est de valider la question des diplômes auprès de la fédération. Nous jouons vendredi en Coupe de Picardie contre Montdidier, ce sera un training important avant la reprise du championnat le 1er avril.
GS : Serge Tristram, envisagez-vous de nommer le nouvel entraîneur avant vendredi ?
ST : La décision sera officialisée mercredi. Nous disposons de trois solutions interchangeables. Liam Michel, l’entraîneur de l’équipe C, sera quoi qu’il arrive dans le duo retenu. Il sera soit accompagné soit de Stéphane Noë (entraîneur de l’équipe féminine), de Fanny Martin (entraîneur de l’école de basket) ou bien encore un ancien entraîneur du club disposant du brevet d’Etat. Quoi qu’il en soit, le point commun sera Liam Michel. J’ai tout naturellement pensé à lui parce que Liam connaît bien les joueurs, il a des relations particulières avec eux. Il est investi dans la vie du club et je suis persuadé qu’il a la fougue pour nous aider à obtenir la montée.
GS : Franck Haleine, comment voyez-vous l’avenir pour Longueau ?
FH : Ils n’ont pas les ambitions et les moyens d’assumer la montée. Ils ont de nombreux joueurs en fin de contrat, c’est du bricolage permanent. Il a bien marché jusqu’ici mais les dirigeants ne pensaient pas que nous serions premiers. Il faut assumer désormais.
GS : Après cet épisode, gardez-vous la volonté de vous asseoir sur un banc de touche ?
FH : A court terme, je vais prendre le temps de faire une pause. Ensuite, si une opportunité se présente, je n’hésiterais pas à la saisir. Je connais mes compétences et mes qualités. Je souhaite désormais passer à autre chose.
Propos recueillis par Romain PECHON