En l’emportant sur Grenoble, l’Amiens SC a pris la tête de la Ligue 2. Pas de quoi encore s’enflammer, mais suffisant pour savourer.
Celui qui n’était pas d’humeur joviale à la fin du match, c’était Vincent Hognon. L’entraîneur du GF38 pestait, avec une certaine prudence langagière mais sans que personne ne soit dupe, contre l’arbitrage avec un formule bien sentie : « Je pense qu’il y a des gens qui n’ont pas été à la hauteur, et ce ne sont pas mes joueurs. » Pourtant, pas question de sa part de contester le penalty accordé à Mathis Lachuer : « Il y a penalty. »
Mais le coach isérois en rajoutait pourtant une louche, arguant que si « tout le monde fait des erreurs, de manière aussi unilatérale pendant tout le match, ça m’interpelle » citant notamment une main dans la surface vue par son staff et le rouge qu’aurait dû prendre Nicholas Opoku pour un deuxième avertissement. Si Philippe Hinschberger n’estimait quant à lui pas devoir ce résultat au trio arbitral, il reconnaissait d’ailleurs aisément que l’exclusion de son défenseur central aurait été logique, expliquant bien que c’était « à lui de faire attention. J’ai préféré le sortir plutôt que de finir à 10. »
Une première mi-temps difficile
Pourtant, si la focale a été mise sur cet aspect de la rencontre, il n’y eu pas que ça au cours de ce match. D’abord, une entrée en matière poussive de l’Amiens SC : « Ça a été très dur pendant une demi-heure. On a manqué de jeu combiné en première mi-temps. On a pas mal ronronné, on a eu du mal à trouver ce qu’on a eu en deuxième mi-temps : du jeu vertical. »
Des difficultés, notamment offensives, que, dans la joie de la victoire, Philippe Hinschberger tenait à minimiser au regard du contexte : « C’est dur, il y a eu une accumulation de matchs. On a joué avec deux attaquants qui n’ont jamais échangé sur un terrain, car depuis samedi dernier, on n’a pas fait une mise en place, donc il ne faut pas être surpris qu’on manque d’huile dans les rouages. » Mais, au grand regret de Vincent Hognon, les Grenoblois n’ont pas su en profiter : « il aurait fallu être très efficace en première période », ce qui n’a pas été le cas.
La montée en puissance
Et puis l’Amiens SC, presque paradoxalement dans une semaine à trois matchs, est monté en puissance. Après une « fin de première mi-temps déjà meilleure, notre deuxième mi-temps a plutôt été bonne. » C’est que le technicien picard avait fait le choix de miser sur un onze de départ peu renouvelé et de faire des changements tôt dans le match. Une option payante puisque « les entrants nous ont fait du bien » se félicitait-il. En « apportant de la fraîcheur » précisait Matthéo Xantippe. Alors qu’en face, « on n’a pas fait suffisamment en deuxième période. On aurait pu faire plus, je pense qu’on a payé physiquement, il a manqué un peu de gaz, un peu de solutions » révélait le coach isérois.
Après un but sur penalty inscrit suite à un superbe geste de Ring au sein d’une combinaison à trois sur la gauche, il fallait encore bien gérer la fin de match, ce qui fût fait. Avec toutefois un sentiment mitigé. Certes, et c’est le plus important, « on est très contents de tenir le score », mais l’ASC n’a pas été capable de se mettre à l’abri malgré des opportunités : « Il y a de la fatigue, on manque un peu de lucidité; à partir du moment où tu marques et tu tiens un quart d’heure, les espaces s’ouvrent, on a eu ça sur la fin de match, on aurait aimé en profiter pour marquer ce deuxième but. » Mais sans conséquence car, de l’autre côté du terrain, « on s’est précipité, on a manqué un peu d’efficacité offensive. »
Amiens leader !
Ainsi, face à la « grosse déception » de Vincent Hognon, on retrouvait une vraie joie amiénoise. D’une part du fait de la victoire – « ce qui était important, c’était avant tout de gagner » – mais aussi parce que la 1ère place est au bout. Et même si on sait pertinemment que c’est une position encore bien fragile, « on est très heureux de cette place, c’est la résultante d’une combinaison de résultats, c’est anecdotique, mais ça fait plaisir » à l’entraîneur samarien.
Et forcément, ses propos trouvent un écho particulier auprès des joueurs, d’un Ring évoquant « un sentiment agréable » à Nojo Fofana, « vraiment content pour nous, pour les supporters, les gens du club » en passant par Lachuer pour qui « ça fait plaisir, parce qu’il y a un an, on était un peu dans le trou. »
Mais surtout cela donne de l’appétit, surtout quand, comme Sebastian Ring, on affirme que ce statut de leader « n’est pas une surprise pour nous » car « on a une bonne équipe, je pense qu’on peut vraiment faire une bonne saison. » Tout juste cela permet-il justement de « donner beaucoup de confiance, c’est important. »
Une réussite collective
Si ce n’est pas une surprise, c’est aussi que l’équipe a changé de visage. Un discours revenait ainsi en boucle, la solidarité au sein de cette équipe. « Collectivement, on a une vraie force. Défensivement, on a été solides », insistait ainsi Mathis Lachuer tandis que Matthéo Xantippe soulignait que « la cohésion d’équipe, c’est vraiment notre force. On a su gérer nos temps faibles, on a fait preuve d’un gros mental. » Plus largement, au-delà de capacités à s’exprimer collectivement, qui n’en est que la manifestation, Nojo Fofana soulignait « un groupe qui se dégage. »
Une articulation résumée par Antoine Leautey, qui sent « un collectif qui se dégage : quand on doit défendre, on défend tous ensemble. » Cette capacité à faire front en bloc, en contraste avec la saison passée, Nojo Fofana y voit une explication : « On est sur une bonne dynamique. Les supporters viennent nous encourager, cela nous donne de la force pour nous surpasser, nous aider les uns les autres, on a pris du plaisir à souffrir ensemble. »
Ne pas se laisser griser
Et maintenant ? Il va falloir trouver un équilibre entre la confiance actuelle, symbolisée par les propos du piston suédois de l’ASC, l’importance de « surfer sur la dynamique » sur laquelle appuyait Xantippe, d’une part, et la nécessité de « ne pas se relâcher » (Nojo Fofana), de « ne pas s’enflammer » (Leautey) d’autre part. Car, insiste le piston droit amiénois, « on a un groupe très jeune, on gagne souvent 1-0, ce n’est pas comme si on mangeait l’adversaire, ça se joue à des détails. » C’est là que Philippe Hinschberger et son staff interviennent : « On est là pour entretenir la dynamique, tout en gardant la tête sur les épaules. »
Seule grisaille dans la soirée, finalement, la sortie sur blessure de Jérémy Gélin. Même s’il semblerait que ce ne soit pas trop grave, l’ancien Rennais « a ressenti une petite décharge » expliquait son coach, à l’ischio gauche. Mais dans une soirée aussi positive, « comme il sera suspendu contre Caen, il va en profiter pour se soigner » philosophait le coach amiénois.
Amiens SC – Grenoble Foot 38 : 1-0 (0-0)
But : Arokodare (69′ s.p.)
Amiens SC : Gurtner – Leautey (jaune 64′), Mendy, Opoku (jaune 48′, Barry 77′), Nojo Fofana, Ring (Xantippe 90’+3) – Gélin (Lachuer 58′), Gomis (Doums Fofana 58′, jaune 73′), Benet – Arokodare, Bande (Chibozo 58′)
Grenoble Foot 38 : Maubleu – Gaspar (Nestor 63′, jaune 89′), Pacquiez, Monfray (jaune 68′, Ngando 83′), Tchaptchet, Gersbach (jaune 82′) – Jeno, Michel (Touray 75′) – Correa (Phaeton 75′, jaune 76′) – Sanyang, Ba
Morgan Chaumier
Crédit photos : Kevin Devigne – Gazette Sports