Quoique l’AC Amiens ne soit pas réellement concerné par les mesures prises par la FFF pour procéder à des montées et des descentes, Azouz Hamdane nous a exprimé son indignation à leur égard, avant de se pencher sur la suite pour les siens.
Bonjour, commençons par l’actualité : quel regard portez-vous sur les récentes décisions de la FFF ?
C’est une décision plutôt logique d’arrêter les championnats. Là-dessus, je suis plutôt satisfait parce que les conditions sanitaires n’étaient pas du tout réunies. Je crois que c’était plus judicieux de tout stopper.
Maintenant, quant à la décision finale de valider les montées et les descentes, je pense que ce sont d’autres réflexions que celles des éducateurs qui ont été mises sur la table pour prendre cette décision parce qu’elle est complètement antisportive. Il faudrait poser la question à ceux qui l’ont prises pour savoir réellement le pourquoi de cette décision parce que, sur le plan sportif, elle est complètement inexplicable, elle est complètement en dehors de l’équité sportive. Elle n’est pas argumentable sur le plan sportif. C’est forcément sur un autre domaine que les décideurs se sont basés pour prendre cette décision.
Qu’est-ce que vous lui reprochez, en particulier, à cette décision ?
Je lui reproche de valider une montée alors qu’il reste une dizaine de matchs à jouer, soit environ 30 points à prendre et qu’il y a seulement 2-3 points d’écart. C’est très compliqué pour les équipes qui étaient susceptibles de pouvoir jouer la montée. On sait que dans les 2-3 derniers mois, c’est en général là que se jouent les championnats. Mis à part, peut-être, pour Chantilly et Wasquehal qui avaient une avance tellement confortable que, pour eux, la messe était quasiment dite.
Pour les équipes qui vont être reléguées, le nombre de points d’écart ne les condamnait pas forcément non plus. C’est en ce sens que j’estime que l’équité sportive n’a pas du tout été respectée. Les dirigeants n’ont pas du tout, à mon avis, mis cela dans les débats pour prendre cette décision. Parce que, sinon, ce n’est pas du tout cette décision qui aurait été prise.
Pour vous, c’est la saison blanche qui aurait été la meilleure décision ?
Oui, complètement. Quand on part avec un règlement bien précis qui fait que l’on a 26 matchs à jouer, 13 matchs à domicile, 13 matchs à l’extérieur, 13 équipes à rencontrer, quand on ne les a pas toutes rencontrées, quand on n’a pas fait tous les matchs, on ne peut pas conclure un résultat définitif.
Il n’y a qu’à voir la constitution de cette loi qui devrait sortir pour couvrir tout recours. C’est que ce n’était pas du tout, dans le contexte législatif actuel, la bonne décision. Puisqu’il faut une loi derrière pour la consolider, pour éviter que tout recours soit discuté.
Quand un événement extérieur fait qu’un match ne peut pas se jouer, il n’y a pas de résultat tant qu’il n’est pas rejoué. Il y a plein de situation dans une saison qui vont dans ce sens. La moins mauvaise des décisions aurait été de faire une saison blanche. Je ne dis pas non plus que c’est la panacée. Je ne dis pas que cela aurait été une super décision. Elle n’arrangeait pas les équipes qui ont fait la course en tête.
En ce qui nous concerne, cela ne change rien. Je n’ai aucun intérêt de mon côté à dire que c’est bien ou pas. Je donne juste mon avis et je trouve, en tant qu’éducateur, que ce n’est pas très sportif. Le grand match qu’est la saison, on ne l’a pas fini. Donc on ne peut pas dire qu’untel ou untel a gagné. Donc je ne vois pas pourquoi des équipes sont pénalisées. Je ne trouve pas cela normal.
En ce qui nous concerne, cela ne change rien. Je n’ai aucun intérêt de mon côté à dire que c’est bien ou pas. Je donne juste mon avis et je trouve, en tant qu’éducateur, que ce n’est pas très sportif.
À partir du moment où la saison, comme un match, n’est pas terminée, ce n’est pas aux arbitres, ce n’est pas aux dirigeants de dire qui a gagné ou perdu. Quand une équipe faute et que le match est arrêté par l’arbitre, là, je veux bien qu’une commission donne le match perdu à l’équipe qui a fauté. Mais là, personne n’a fauté, ce n’est la faute de personne. Quand un match est interrompu ou annulé pour cause d’intempéries, le match est reporté. C’est sur ce principe que je me base. Je ne comprends pas, très sincèrement.
Pour revenir sur l’AC Amiens, quel bilan peut-on tirer de la saison ? Et comment peut-on même en tirer un bilan alors qu’on n’en a joué qu’une partie ?
Le bilan est forcément à un moment donné. Si on reste sur les matchs qui ont précédé l’arrêt de la saison, on était invaincus depuis 10 matchs. Beauvais relevait la tête et a eu la chance d’être à la bonne place au bon moment. Il y a des équipes comme Arras ou Chambly qui, je pense, auraient encore eu des opportunités pour y croire. On avait une réserve d’Amiens qui avaient commencé l’année 2020 de manière catastrophique. Il y a juste des équipes qui sont arrivées à leur place au bon moment et d’autres au mauvais moment.
Après, en ce qui nous concerne, cela a été un début de saison un peu calamiteux. Cela a été une saison très particulière pour nous, avec beaucoup d’événements qui se sont produits : le match de Vimy, des problèmes de suspensions, la commission de discipline qui nous a suspendu un joueur alors que la vidéo montrait clairement qu’il était non fautif… Il ne manquait plus que cette crise sanitaire.
Maintenant que la saison est terminée, est-ce que vous êtes déjà dans une phase de projection sur la saison prochaine ?
Oui, un peu. J’ai eu un entretien avec le président ce week-end pour voir comment on pouvait se projeter. Mais la projection est compliquée parce qu’on ne sait pas quand on reprend, on ne sait pas dans quelles conditions. J’ai surtout organisé les entretiens avec les joueurs pour clôturer cette saison. J’essaie de voir quelles sont les armes avec lesquelles on peut également reprendre la saison prochaine. Et dès qu’on aura une date de reprise, on pourra anticiper, même si on a déjà quelques scénarios en tête.
Est-ce qu’on va reprendre fin août ? Est-ce qu’on va reprendre début septembre ? Je pense que ce serait bien de laisser un peu de temps à tout le monde de bien récupérer, de reprendre en septembre. Cela ferait revenir fin juillet, début août à l’entraînement. Je pense que cela se sera éclairci d’ici là au niveau sanitaire. En tout cas, je l’espère. Je pense que cette année sera, pour le coup, un peu blanche, dans le sens où ce confinement risque de laisser des traces.
Parce qu’au-delà de la reprise du championnat, se pose la question de la préparation après un si long arrêt pour bien reprendre le rythme ?
Il y aura forcément une première phase individuelle. Les joueurs devront, avec l’aide de notre préparateur physique, se remettre tout doucement dans le bain. Sur le plan physique, mais, même avant cela, il y aura une phase pour se remettre dans le bain sur le plan psychologique parce que les joueurs doivent aussi se sentir en sécurité. Sinon, comment voulez-vous reprendre de manière convenable ? Une vie de vestiaire, ce n’est pas anodin, les joueurs sont proches les uns des autres. Comment va-t-on pouvoir gérer cela, c’est le genre de question qui nous est posé.
Il y aura une phase pour se remettre dans le bain sur le plan psychologique parce que les joueurs doivent aussi se sentir en sécurité. Sinon, comment voulez-vous reprendre de manière convenable ? Une vie de vestiaire, ce n’est pas anodin, les joueurs sont proches les uns des autres.
Après une phase mentale que les joueurs vont devoir surmonter, la phase physique ne sera pas difficile. On a des programmes, des planifications, il n’y a pas de soucis. L’idée, c’est que les joueurs ne soient pas trop en décalage par rapport à une potentielle reprise. On est en lien avec eux, le préparateur physique l’est constamment, donc il n’y a pas de gros soucis par rapport à cela.
Justement, comment le maintient-on ce lien, dans ces circonstances ?
Les joueurs ont un groupe WhatsApp. Moi, je n’en fais pas partie, de façon volontaire. Les joueurs sont plus libres quand ils ne sont pas écoutés par leur coach. C’est comme dans le vestiaire, c’est un peu leur vestiaire numérique ce groupe WhatsApp. Par contre, des membres de mon staff en font partie. Quand j’ai besoin de faire passer un message, des pensées pour eux, je passe par mon capitaine, c’est lui qui diffuse, c’est lui qui sert de lien entre les joueurs et moi quand je ne les ai pas en face de moi, c’est surtout lui et mon préparateur physique qui sont mes deux portes d’entrée.
Morgan Chaumier
Crédits photos : Kevin Devigne / Reynald Valleron – Gazettesports