C’est sous les couleurs de Metarom, entreprise de Boves, que l’expérimenté skipper Marc Guillemot s’élancera finalement mercredi de Saint-Malo à l’assaut de la 12ème Route du Rhum.
C’est l’un des 138 voiliers sur la ligne de départ de la 12ème édition de la Route du Rhum : Metarom MG5. Un catamaran de 15,80 m, engagé parmi les 14 bateaux de la classe Rhum Multi et conçu spécialement pour l’occasion par Marc Guillemot : « J’ai beaucoup aimé ce que j’ai fait avant, explique le navigateur breton de 63 ans aux cinq participations à la reine des transats. Mais là, c’est un projet léger à porter, qui s’est fait de façon toute simple au niveau relationnel. »
La simplicité, l’un des mots-clé de cette aventure à laquelle Metarom Group s’est associé. « C’est devenu comme une évidence, indique le skipper. On passe parfois des mois à aller de bureau en bureau pour vendre un projet et là, avec Metarom, ça s’est fait naturellement. Beaucoup de monde se reconnaît dans notre démarche, c’est plutôt rassurant. Les différents partenaires du bateau vont tous dans la même direction. Vers Pointe-à-Pitre déjà, dans un premier temps ! » lance en souriant Marc Guillemot, devant les médias au village-départ, à Saint-Malo.
Car le plus dur commence, Marc Guillemot le sait pertinemment : “Ce qui nous arrive dessus, annoncé à la pointe Bretagne après le départ n’est pas très excitant, franchement… Grâce à mon expérience, je sais ce que ça représente d’aller dans une mer très courte. On n’est pas au large mais en bordure des côtes, avec des fonds qui remontent et une mer très forte. Et avec en plus le contre-courant qui amplifie encore le phénomène. Les Ultim (les plus rapides, ndlr) auront peut-être le temps de s’éclipser, mais nous, les Multi, on aura du mal… » pressentait-il jeudi dernier.
Protéger le bateau pour ne pas aller au carton
Marc Guillemot
« Alors même si je ne sais pas encore la décision que je prendrai, j’envisage fortement de temporiser, de mettre la course de côté, de trouver un endroit pour faire une escale pour me mettre à l’abri, protéger le bateau pour ne pas aller au carton. Parce que j’ai connu le Rhum 2002 où on était trois bateaux seulement à l’arrivée, sur 18 Imoca au départ. J’étais arrivé 2ème dans ma classe, content. Mais 2ème sur 3, après une hécatombe, ça ne fait pas plaisir… Le but du jeu, ce n’est pas de faire les jeux du cirque ! C’est qu’il y ait le plus de bateaux possible à l’arrivée. Et pour ça, il faut pouvoir naviguer dans de bonnes conditions. Donc je n’hésiterai pas à m’arrêter s’il le faut” prévenait Marc Guillemot, visionnaire, avant l’annonce de report du départ.
Marc Guillemot en bref 63 ans. Port d'attache : La Trinité-sur-Mer (Morbihan) Route du Rhum - 1998 : 4ème - 2002 : 2ème IMOCA - 2006 : 7ème IMOCA - 2010 et 2014 : 3ème monocoques 60 pieds Vendée Globe - 2008/09 : 3ème (après avoir secouru Yann Eliès, gravement blessé). Transat Jacques Vabre - 2009 : vainqueur avec Charles Caudrelier. 2013 : 2ème IMOCA avec Pascal Bidégorry etc.
Pour rallier la Guadeloupe, il s’installe à la barre d’un « bateau alternatif. C’est d’ailleurs pour ça qu’on l’a appelé au début Dazeilad, alternative en breton. Avec Metarom, on a de nombreux points qui nous rassemblent, comme l’environnement. Le fait d’avoir réutilisé beaucoup d’équipements, d’être éco-responsables pour faire le bateau me fait vraiment plaisir. Et au-delà du plaisir, j’ai une vraie fierté de porter tous ces équipements qui étaient couverts de toiles d’araignées ! Leur donner une deuxième vie, ça donne un cachet particulier au bateau » estime Marc Guillemot.
Concrètement, poursuit le skipper de Metarom MG5, « à peu près 90 à 95% des équipements du bateau sont réutilisés : le filet avant a déjà fait le tour du monde avec Spindrift et avec Banque Populaire, le grand trimaran. Toutes les “ficelles”, c’est à dire les cordages, le gréement courant étaient sur mon bateau pour le Vendée Globe (2008/09, ndlr), les dérives viennent de Damien Seguin lors du Vendée Globe 2020/21, les safrans de Jérémie Beyou (Vendée Globe 2012 avec Maître Coq, ndlr). Pour les mâts, c’était ceux de Jean Le Cam et de Roland Jourdain dans le Vendée Globe 2004. »
Éco-conception pour le bateau comme pour les produits Metarom
« La façon dont Marc a conçu son bateau, explique à ses côtés Céline Hocquet, directrice générale de Metarom France à Boves, fait d’ailleurs écho aux solutions qu’on cherche pour concevoir des produits différemment. Ou aussi pour utiliser l’énergie autrement. En plus, la voile diffuse de l’énergie auprès du grand public, on le sent ici à St Malo. C’est porteur de valeurs très saines, qui donnent envie… »
Cette démarche a constitué le déclic pour la cheffe d’entreprise amiénoise : « Sans le savoir, avec Marco, comme avec Wellness Training, l’autre partenaire principal, on s’est rendu compte que, dans nos milieux très différents, le monde de la mer, celui du sport en entreprise et dans l’agro-alimentaire, en suivant des chemins très différents, on faisait des actions qui avaient la même intention. L’innovation, on en fait tous les jours dans nos laboratoires pour mieux éco-concevoir, pour trouver une autre manière de faire. C’est l’alternative, le concept qui fait qu’on s’est rencontrés et qui a ancré l’envie de partager cette Route du Rhum » raconte Céline Hocquet.
« C’est assez sympa, parce que c’est un bateau tout neuf mais qui a déjà une histoire » se réjouit Marc Guillemot. Pour faire entrer carrément Metarom dans la légende des courses au large, le rendez-vous est donc désormais fixé à partir de ce mercredi…
La Route du Rhum 2022 (12ème édition) - 3542 milles marins (6560 km) de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe). Départ décalé à mercredi 9 novembre pour les 138 skippers, un record (58 participants en 2002) dont 7 femmes et 111 Français. 6 classes de bateaux, les plus rapides étant les Ultim avec 8 concurrents. Les favoris : Francis Joyon, 66 ans (IDEC Sport), vainqueur 2018 et recordman de l'épreuve en 7 jours, 14h et 21 min. François Gabart, 39 ans (SVR-Lazartigue). Charles Caudrelier, 48 ans (Maxi Edmond de Rotschild). Armel Le Cléac'h, 45 ans (Maxi Banque Populaire XI). Thomas Coville, 54 ans (Sodebo Ultim 3) etc.
Vincent Delorme (avec Léandre Leber à Saint-Malo)
Crédit photos : Léandre Leber – Gazette Sports et DR