RUGBY (Fédérale 3) – Esteban Devich : « Je me sens en pleine forme pour des projets comme celui du RCA »

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Le Rugby Club Amiénois a rapidement trouvé le remplaçant de Mickaël Morainville avec l’arrivée de l’expérimenté Esteban Devich. Le technicien franco-argentin s’est confié sur ses ambitions et sur ce qu’il souhaite apporter au projet ambitieux du club picard.

Esteben Devich, officialisé comme nouvel entraîneur du Rugby Club Amiénois mardi 20 mai, a été intronisé ce jeudi soir lors d’une soirée de présentation. Le technicien franco-argentin, qui aurait déjà pu rejoindre le club amiénois il y a deux ans avant de rejoindre Chartres comme entraîneur des avants, a cette fois-ci franchi le pas de revenir en Picardie, après une première expérience du côté de Beauvais, dans l’Oise. Esteban Devich s’est confié à Gazette Sports sur son arrivée au RCA et a donné des premières indications sur sa manière de fonctionner et sur la philosophie de jeu qu’il souhaite inculquer aux joueurs qu’il aura à sa disposition la saison prochaine.

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Dans quel état d’esprit êtes-vous avec cette arrivée ? Était-ce important de retrouver un projet rapidement après la saison avec Chartres ?

Oui, mais de toute façon, j’avais déjà prévu mon départ de Chartres depuis quelques mois. Je me suis pris en avance sur la recherche d’un nouveau projet et, à Amiens, il y a deux ans, quand je suis parti de Beauvais, j’avais déjà été en contact. Ça ne s’est pas fait sur le coup, mais ça a toujours été un projet de club qui m’intéressait, pour essayer de faire un peu la même chose qu’on a faite à Beauvais, d’installer le club en Fédérale 1 à long terme.

Qu’est-ce qui vous a motivé à rejoindre le projet du Rugby Club Amiénois cette fois-ci ?

Déjà, il y a deux ans, c’était une approche, ça ne s’est pas fait, mais j’étais en contact avec Joël (Nayet, ancien président décédé le 18 février dernier, ndlr) Ça ne s’est pas fait et j’ai décidé d’aller à Chartres. J’avais quelques pistes, comme cette année. On va dire que, pour un rugbyman ou un ancien rugbyman comme moi, la Somme ou la Picardie, ça ne parle pas vraiment pour le rugby. Mais je sais que, dans cette région-là, il y a quelque chose à faire. Comme je l’ai dit, le fait d’avoir un vivier qui peut être pas mal et des moyens aussi qui peuvent être bien, à condition d’amener le club à un bon niveau. On va faire chaque chose en son temps. Là, j’arrive, il faut qu’on fasse vraiment un état des lieux de l’effectif pour voir quels sont les moyens que nous avons pour aller chercher le haut du tableau de la poule. Là, le club est descendu en Fédérale 3 (par rapport à il y a deux ans). [Cette année], ils ont fini cinquième. L’effectif a l’air d’être mieux que l’année dernière déjà. Il n’y aura pas de révolution sur l’effectif, mais plutôt sur la façon de travailler ou sur une manière de travailler qui est très différente de ce que font la plupart des équipes de ce niveau-là.

Justement, quelle est votre manière de travailler ?

Je n’ai jamais entraîné en Fédérale 3, ça va être une première pour moi. Mais quand on aime le sport qu’on fait et qu’on veut performer, j’ai la conviction qu’il faut s’entraîner plus que les autres. On va mettre en place un planning avec beaucoup plus de présence au club, mais avec des entraînements qui vont être raccourcis, plus intenses, avec beaucoup plus de concentration qu’un entraînement qui peut dépasser l’heure et demie ou s’approcher des deux heures. Ce seront des entraînements plus courts, avec des préparations, des séances avec un staff qui va être très précis et que les joueurs vont connaître déjà à l’avance, par exemple. L’idée, c’est d’arriver au club pour s’entraîner pendant, on va dire, une heure, une heure et quart maximum, mais avec des choses qui vont être claires et rythmées. Pour que la performance soit plus proche de la concentration d’un match et pour permettre aussi aux joueurs de progresser. Ceux qui aiment le sport et la performance, s’ils veulent vraiment performer, il n’y a pas de secret, il faut faire quelques efforts. Mon idée, c’est d’amener les joueurs à s’entraîner d’une autre façon. Pour le moment, ça m’a toujours réussi, donc j’ai confiance que ça va marcher ici aussi, mais à condition que l’effectif suive la démarche. Si on n’y croit pas, ça ne va pas marcher, c’est à moi de convaincre l’effectif. Si on va tous dans le même sens, ça devrait marcher.

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Esteban Devich va faire une revue de l’effectif afin de construire son équipe pour la saison prochaine.

On sent que c’est vraiment ce qui vous anime…

En tout cas, c’est ce qu’on m’a appris depuis toujours et c’est ce que j’ai mis en place partout où j’ai travaillé. Je considère que, à condition égale, celui qui bosse le plus est celui qui gagne. On n’a pas une équipe de stars, et on n’a pas non plus les moyens d’en amener dans l’équipe. Mais ce n’est même pas l’objectif, on n’est qu’en Fédérale 3. Aujourd’hui, l’objectif est d’optimiser nos moyens, et pour cela, il y aura des modifications dans la façon de travailler, dans les plannings. Hier (jeudi), j’ai présenté le calendrier de la saison, et il y en a qui ont été surpris, d’autres ont adhéré, certains ont été un peu dubitatifs, on verra bien. Les clubs ont décidé de me prendre pour ça aussi. Vous imaginez bien que, lorsque je passe mes entretiens avec des dirigeants, je montre comment je travaille. Il y en a qui, s’ils me prennent pour un fou parce que je travaille trop, ne concrétisent pas. Mais pour le moment, je n’ai jamais eu de problème à trouver un projet qui m’intéresse. J’ai très bien accroché avec les dirigeants d’Amiens. La ville d’Amiens, je la connais parce que j’ai passé six saisons à Beauvais, je sais que c’est une belle ville, qu’il y a une bonne qualité de vie. C’est aussi une ville universitaire, les gamins de 18 ans, quand ils finissent leurs études, n’ont pas de raison de partir ailleurs, ils peuvent rester à Amiens. C’est un atout important, parce que j’étais dans beaucoup de clubs où on ne pouvait justement pas garder nos jeunes parce qu’ils devaient partir pour leurs études, ou à Bordeaux, ou à Nantes, ou à Paris. C’est quelque chose d’important de savoir qu’on est dans un endroit où notre formation peut aussi alimenter l’équipe première.

Je suis quelqu’un qui aime les projets où on peut se projeter sur le long terme

Esteban Devich, nouvel entraîneur du Rugby Club Amiénois

La formation semble importante pour vous ?

Oui, exactement. Une des choses qui m’a conforté dans mon choix, c’est de savoir que le CEL (centre d’entraînement labellisé) est au club, ça veut dire qu’on a quand même beaucoup de très bons jeunes de la région qui sont à Amiens. Ça aide pour attirer les meilleurs joueurs aussi, il faut qu’on joue à un bon niveau ; pour moi, c’est très important de très vite aller chercher la Fédérale 2.

Vous avez signé pour trois ans au club, quels sont vos objectifs ?

La Fédérale 2, à moyen terme, et après, à long terme, on veut aller chercher plus haut. Mais c’est avec des résultats sportifs qu’on pourra y arriver. Si vous voyez mon CV, il y a des endroits où je suis resté longtemps, comme à Beauvais. Je suis quelqu’un qui aime les projets où on peut se projeter sur le long terme, et c’est pour ça que j’accepte d’entraîner à Amiens.

Qu’est-ce que vous aimez, au-delà du travail à l’entraînement intensif, inculquer dans le jeu en match ?

Dans le jeu, j’ai un projet qui est assez ambitieux. J’aime bien qu’il y ait de longues séquences avec la conservation du ballon et un projet de circulation offensive qui est assez clair. Je suis manager général, mais je m’occupe de la conquête aérienne qui est très importante pour moi, de la conquête en touche, pour avoir des ballons de sortie rapide ou des ballons portés. J’aime la circulation offensive, mettre de la vitesse, sortir des balles rapides dans le jeu au sol. Mais tout ça, c’est pour ça que je dis que c’est dans les entraînements intensifs et courts qu’on va travailler tout ça, mais avec beaucoup de répétition. Donc voilà, sortir des ballons rapides, de vitesse dans le jeu, et que les ballons soient vivants. Si on veut imposer de longues séquences offensives aux adversaires, il faut avoir une bonne conservation et cela implique du travail.

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Esteban Devich prône un jeu ambitieux et espère pouvoir le mettre en place avec le RCA.

Cette philosophie est-elle un héritage du rugby que vous avez appris en Argentine ?

Oui, c’est possible. Je suis Argentin, j’ai appris le rugby là-bas où c’est un rugby latin, c’est un peu comme en France où ça part d’une bonne conquête. C’est assez joueur. Je sais qu’Amiens a déjà une culture de jeu qui est assez dirigée vers les extérieurs. Je regardais un peu leurs matchs, et je vois que c’est une équipe qui aime jouer. Je suis un ancien pilier, donc la conquête, c’est hyper important pour moi, et la France, c’est plutôt la conquête en touche, donc on va essayer d’avoir une touche très performante, justement pour avoir une bonne rampe de lancement dans le jeu.

Vous avez une grosse expérience dans le rugby, près de 50 ans d’expérience, qu’est-ce que vous pouvez apporter au RCA ?

Je pense que les dirigeants d’Amiens sont venus me chercher aussi par rapport à mon expérience dans le rugby. Pour le moment, ils n’ont pas eu de staff très expérimenté, mais plutôt des staffs assez jeunes avec beaucoup d’énergie, j’imagine. J’ai déjà vécu des situations dans des clubs où on a structuré pour faire des montées et pour qui ça se passe très bien en ce moment. Je pense que ces expériences d’être passé dans des clubs pendant quelques saisons pour les structurer font que j’ai quand même pas mal d’idées pour aider les clubs à améliorer leurs infrastructures. Il y a pas mal de choses à faire sur la structure du club, j’ai déjà commencé à parler avec les dirigeants sur pas mal de projets, c’est tout de même excitant de voir si on peut améliorer la situation d’un club et de l’installer au plus haut niveau possible. […] Je suis motivé et c’est pour ça que je suis là, c’est pour ça que les dirigeants m’ont fait venir. Vous savez, quand on a la chance de vivre de notre passion, il faut en profiter, et pour le moment, même si je commence à avoir un certain âge, je me sens en pleine forme pour des projets comme ça.

César Willot
Crédit photo : Kevin Devigne, Théo Bégler – Gazettesports.fr