Comme Thomas Zirn, Roman Scattolari quitte Amiens après de longues années à l’Amiens Picardie Handball. L’ancien capitaine aurait lui aussi préféré que la fin de son aventure se passe autrement. Il revient sur son départ et sur ses sept années à l’APH.
Le changement d’entité, de l’Amiens Picardie Handball à l’Amiens Handball Club a chamboulé l’effectif de l’équipe première. Des joueurs, présents depuis de nombreuses saisons ont plié bagages, contraint ou par volonté comme Roman Scattolari, capitaine des Pirates.
Quel est votre sentiment avec cette fin d’aventure entre vous et le club, elle se termine d’une triste manière avec l’avenir du club qui a été bousculé ?
Bien sûr, je pense que ça reste malgré tout un beau gâchis tout ce qui s’est passé. De manière générale et avec un petit peu de recul, je ne me permettrais pas d’imputer qui que ce soit. J’estime que j’ai une éducation assez droite et respectueuse de la part de ma mère. J’ai beaucoup de respect pour le président Dominique Pingaud, pour les dirigeants et les bénévoles. Je ne me permettrais pas de critiquer ce qu’il s’est passé, même si tout le monde a conscience que c’est un beau gâchis et que malheureusement l’APH n’existe plus. Ce départ, je le vis comme un soulagement, parce qu’effectivement, ça faisait sept ans que j’étais à Amiens, j’ai passé six très belles années. La dernière a été un peu plus terne avec toutes les crises qui se sont passées. Ca a plutôt été un soulagement de partir d’Amiens, et c’est aussi parce que j’ai retrouvé un super projet dans lequel je vais être heureux et épanoui. Je ne regrette rien de ce qui s’est passé, mais il était temps pour moi de changer de club. J’avais surtout envie de retrouver de l’ambition sportive.
Et vous, comment avez vous vécu le fait de partir ? C’était un départ un peu contraint, à contre-cœur ?
Ça a mis un petit peu de temps, parce que forcément, du fait du jugement au tribunal et de quelques choses administratives, la procédure a mis du temps. Mais voilà, moi je suis plutôt soulagé que ça se termine entre guillemets. Après, je reste plutôt effectivement, comme tu l’as dit, pas déçu, mais un peu contraint sur tout ce que j’avais construit à côté. Que ça soit mon travail avec la Ligue des Hauts-de-France, dans les Pôles Espoirs, ou alors avec l’Unité de la Somme, ou à l’Université d’Amiens… Après, sur le plan purement sportif et le plan du club, je suis soulagé de passer à autre chose. De retrouver un club ambitieux sportivement, dans lequel je vais m’épanouir et surtout prendre du plaisir sur le terrain à un bon niveau de jeu. Et donc, c’est chose faite. Je suis vraiment très content de ça.
Il y avait cette volonté de rebondir dans un bon club, à l’Elite Val d’Oise…
Voilà, c’est ça. C’est un club dans le département du Val d’Oise qui s’appelle Elite Val d’Oise. C’est une entente entre Saint-Noël-Saint-Gratien. C’est un club qui est très sain et qui est ambitieux, avec des gens compétents qui ont vraiment la culture du handball et qui sont humains avant tout. C’est ce que j’attendais des gens humains, avec une bonne connaissance du handball. C’est une nouvelle aventure qui commence. Je mettrai toutes les chances de mon côté pour que ça se passe bien. J’ai eu l’opportunité aussi d’avoir un projet de reconversion. Mais une fois, j’avais cette envie de retrouver de l’ambition sportive dans un club d’Elite. Vraiment, c’est une vision professionnelle. C’est vraiment ça qui a guidé mon choix.
Pour revenir sur Amiens, comment avez-vous vécu cette dernière saison qui a encore été marquée par un retrait de points, qui a encore eu un impact sur le sportif, alors que ça faisait déjà quelques années qu’il y avait ces sanctions ?
Ce n’est pas évident de prendre du recul et d’analyser la situation. Je ne suis pas sûr que de rétrograder, d’enlever des points à une équipe soit la bonne façon de résoudre le problème. Peut-être qu’il y avait d’autres moyens juridiques, administratifs pour essayer de redresser le club et aider nos dirigeants à sortir la tête de l’eau. Après, chacun doit assumer ses responsabilités. Mais d’un point de vue purement sportif, nous, en tant que capitaine, on ne peut pas nous refaire de reproches sur le plan sportif. On n’a jamais terminé plus loin que troisième. L’année dernière, en N1, on était deuxième derrière l’équipe de Tremblay, qui a accédé à la N1 Elite et terminé cinquième. On ne se situe pas loin de ce niveau de jeu. Effectivement, le budget prévisionnel n’est pas en adéquation avec les comptes à la fin de l’année. C’est un problème. L’équité sportive, là-dessus, est remise en jeu. On ne peut pas contredire les instances, la CNCG et la Fédération. Mais le fait d’enlever des points, ça a vraiment fait tomber le bateau. Cette année, encore une fois, si on n’avait pas eu ces sept points de pénalité, on aurait pu peut-être jouer la remontée en N1. Après tout, encore une fois, il y a des instances qui sont là pour veiller sur le fonctionnement. Il y a eu beaucoup de dysfonctionnements. On a eu du mal à déposer le bilan dans un plus haut niveau que nous. Mais ça reste normal qu’ils surveillent étroitement ce qui se passe dans les comptes.
Au-delà des points de retrait, il y a eu aussi une rétrogradation en tout début de saison. Puis il y a eu le départ de Julien Richard et Yuri Petrenko. C’était vraiment une saison cauchemardesque finalement ?
Cette saison, ça a été vraiment un cauchemar. On a appris, lorsqu’on était en vacances, le 13 juillet, qu’on était rétrogradés administrativement en N2. Forcément, il y a eu un appel officiel. Mais effectivement, il y a eu un gros coup. Une saison majeure avait prolongé notre aventure au club pour plus de trois ans. On pensait repartir dans un nouveau cycle ambitieux avec une remontée en N1 Elite. C’est ce qui se passait un peu en coulisses. Finalement, ça a été tout l’inverse. Ça a été dur de faire la part des choses, de remettre le bleu de chauffe et de repartir. Personnellement, je sais que je n’ai pas été à mon niveau. On a perdu des matchs qu’on n’aurait pas dû perdre. De manière générale, ça a été une saison sportivement et humainement compliquée. Effectivement, il y a eu la démission des deux coachs. Comme je l’avais déjà dit, j’ai beaucoup de respect pour Julien et Yuri. Je pense que ce sont les premiers Pirates, les premiers vrais Pirates qui sont arrivés il y a plus de dix ans maintenant. Ce sont des aléas, des choix personnels. Je ne peux pas revenir dessus et les commenter personnellement. Finalement, à la fin de la saison, l’effectif du club va complètement changer. Il me semble qu’il n’y aura plus qu’un joueur qui était dans l’effectif N2 la saison prochaine. Il y a eu toute une péripétie par rapport aux numéros d’affiliation. Ce que je peux dire par rapport à ça, c’est que ce qui s’est passé, je suis soulagé qu’il y ait encore du handball l’année prochaine. J’ai pu m’occuper pendant des stages de perfectionnement sur les équipes de jeunes. J’ai retrouvé des créneaux, j’ai retrouvé les gymnases avec leurs ballons. C’est un moindre mal. Le handball à Amiens va renaître de ses cendres et se restructure dans la bonne voie. Concernant l’effectif, ce qu’il faut comprendre, c’est qu’à la base, comme on avait vraiment un effectif de joueurs de National 1, on a été contraints de jouer en N2. Mais là, effectivement, avec le numéro d’affiliation qui a été transféré à l’Amiens Handball Club, les joueurs qui étaient censés jouer en N1 auraient dû jouer en N3, et pas sous les mêmes conditions qu’actuellement. Forcément, ça explique que sur les 18 joueurs qui composaient l’effectif, il y en a 17 qui partent. Ça, c’est compréhensible. Après, j’espère que le nouveau club pourra quand même se faire une belle saison en N3 et retrouver de l’ambition au fur et à mesure.
Quel regard aves vous eu sur cette « guéguerre » entre les deux listes pour reprendre le numéro d’affiliation ? Est-ce que ça vous impacté ?
Je ne savais pas ce qui allait nous arriver. Je dirais qu’on savait déjà ce qui allait arriver. Dans les deux cas, notre contrat ne pouvait pas être honoré par n’importe quel projet. Donc, par rapport à nos vies personnelles, on était impacté. Après, j’ai suivi ça de très près. Et puis, il y a eu une décision qui a été prise de la part de la fédération. Je ne la commenterai pas. Encore une fois, je suis soulagé qu’il y ait du handball à Amiens. Je pense que c’est ça le plus important. Et peut-être que le summum serait que les projets s’unissent pour refaire un beau club, structuré, ambitieux et sain financièrement. Mais ça n’a pas été le cas. Je fais confiance à l’équipe. Une équipe en place pour mener le handball à Amiens vers des bons jours. Je retiendrai vraiment le meilleur. C’est un club qui m’a accueilli pendant 7 ans. Et puis, au fur et à mesure, j’ai pu avoir à la fois l’ambition sportive, avec des belles saisons sportives, et à la fois construire un projet à côté qui a vraiment épanoui ma vie professionnelle. Il y a des jeunes, il y a des entraîneurs, notamment à la Ligue des Hauts-de-France, très compétents. Ça, ça m’a beaucoup apporté. Et vraiment, c’est ça que je veux dire. Je veux remercier les dirigeants de m’avoir laissé cette liberté-là, dans le côté du handball. On avait une liberté. On pouvait être admis deux fois sur le terrain. Il y avait vraiment des beaux samedis soirs, des belles soirées au Coliseum. Mais aussi, à la fois la semaine, on pouvait mener un double projet professionnel. Après, de manière générale, il y a une expression qui dit que moi, je ne cracherai jamais dans la main qui m’a nourri pendant 7 ans. Et c’est vraiment ce que je retiens. J’ai beaucoup de respect pour Dominique Pingaud, pour tout ce qu’il a fait. Je me suis rendu compte qu’au fur et à mesure, avec le temps, c’était très compliqué de gérer un budget de 600 000 euros. C’était loin d’être une association sportive basique. On entrait plutôt dans des termes d’entreprise, de société. Et au final, c’est peut-être ce modèle associatif qui peut être remis en question. Je n’affirme rien, mais ce modèle peut être remis en question avec des gros budgets, à la fois des professionnels, des partenaires à gérer, mais en même temps, des licenciés, des équipes de jeunes à faire tourner, une vie de club pour entretenir. C’est tout ça qu’il y a à prendre en compte. Mais vraiment, je retiendrai le meilleur. Vous savez, quand on fait ce métier-là, il faut être prêt à changer. Et là, c’est déjà très bien d’être resté dans le même club pendant sept ans. Donc, je pourrais revenir au Coliseum et tout se passera bien.
Vous avez aussi d’autres missions à côté de votre poste de joueur. Il y avait cette mission au sein de la Ligue des Hauts-de-France. Elles cessent toutes ?
Oui. C’est un petit peu mon regret, parce que ça faisait cinq ans que j’étais intervenant pour la Ligue des Hauts-de-France, que ce soit sur le pôle espoir garçons, et sur le pôle espoir filles, et aussi sur les équipes de Ligue. Mais voilà, c’est mon regret de partir de la région Hauts-de-France, qui m’a appris beaucoup de choses sur le plan de l’entraînement sportif en tant qu’entraîneur de handball. Encore une fois, je remercie le président Jean-Pierre Lepointe et tous ceux qui m’ont beaucoup apporté, comme Arnaud Parisy. J’avais en gros des semaines effectivement bien chargées, où je devais à la fois maintenir les 5-6 entraînements de handball qu’on avait par semaine, et aussi la journée entraîner le pôle espoir, qui est en gros le cursus de formation fédéral, c’est le processus pour renouveler les équipes de France féminines. C’est parce que mon activité, j’avais aussi une activité de vacataire à l’université, et ça c’était aussi très intéressant pour moi, donc voilà, ça a été très enrichissant, et je ne regrette vraiment rien de ce qu’il s’est passé. Encore une fois, je remercie justement les dirigeants de m’avoir donné l’opportunité de faire ça.
Avec ce changement de club, votre vie va t-elle se recentrer sur le handball ?
Finalement, non, pas vraiment, puisque je garde un contrat professionnel en tant que joueur à l’Elite Val d’Oise, mais j’aurai aussi des missions au comité du Val d’Oise. Donc voilà, c’était mon souhait aussi de pouvoir regarder de l’ambition sportive, mais à la fois aussi faire ce qui me plaît, et prendre du plaisir en tant que joueur à l’Elite Val d’Oise. C’est un peu pour ça que je suis content de partir, c’est que je sais que je vais être dans des bonnes conditions pour travailler, et je vais pouvoir continuer d’apprendre…
Je souhaite vraiment remercier tous les supporters, tous les spectateurs, tous les bénévoles, tous les dirigeants du club, le speaker, aussi les joueurs… Tous les joueurs qui ont pu passer des belles années, qui sont devenus des amis. Tous les entraîneurs, vraiment tout le monde. ! Je pense que chacun, une fois qu’on aura tiré les enseignements de ce qu’il s’est passé, il faudra vraiment garder le meilleur, et rester optimiste et positif par rapport à tout ça. Et je souhaite que les nouveaux dirigeants à Amiens mènent à bien leur projet, et que le handball puisse retrouver de sa superbe sur Amiens et Coliseum.
Propos recueillis par César Willot
Crédit photo : Théo Bégler – Gazettesports.fr