En cette période de confinement le basket-ball, n’est lui non plus, comme de nombreux sports, pas épargné. Et si les divisions professionnelles bénéficient d’aménagements comme dans l’ensemble des sports, certaines incohérences demeurent.
C’est le cas notamment de la NM2, championnat considéré comme non professionnel, mais dont de nombreux joueurs le sont. Cela entraîne un certain flou et des inégalités dans la façon de s’entraîner durant ce confinement. Mais si cela dérange certains, la vraie question est de savoir dans quelles conditions va reprendre le championnat. Car ce flou et la possibilité de reprendre à huis clos menacent bon nombre de clubs.
En prenant l’exemple de la poule C, nous avons recueilli différents points de vue pour essayer d’obtenir des éclairages et des réponses à ses questions.
Pourquoi certains peuvent s’entraîner et pas d’autres ?
Durant cette période de confinement et alors que les gymnases sont fermés, toutes les équipes ne bénéficient pas des mêmes conditions pour s’entretenir et s’entraîner en attendant la reprise. En effet, jouant sur le fait qu’elles possèdent des joueurs professionnels certaines formations se sont vues autoriser l’accès aux gymnases. Une incompréhension pour certains qui “dénoncent” une certaine iniquité sportive. Dès le début du confinement Thomas Giorguitti, coach de l’ESCLAMS, “estimait que cela allait entraîner des écarts physiques conséquent à la reprise, dont l’impact va se faire ressentir sur les résultats”.
Et il n’est pas le seul, en effet Michel Hervé Raymond, président de Gravenchon partage cet avis. “Nous ne pouvons pas nous entraîner et c’est le cas depuis presque deux mois déjà car nous avons dû faire face au couvre-feu avant le confinement. Que des équipes puissent s’entraîner tant mieux pour elles mais je ne comprends pas trop pourquoi elles peuvent puisque la NM2 n’est pas considérée comme professionnelle. Il va y avoir un écart considérable à la reprise sur le plan physique, ce qui risque de jouer sur les résultats.”
Même son de cloche pour le manager général du Basket Club Liévois, Patrick Petit, “c’est un peu compliqué à comprendre, il y a deux poids deux mesures. On est confiné, les salles de sports et gymnases doivent être fermés mais sous prétexte que certains clubs ont des joueurs professionnels, ils ont le droit de s’entraîner alors que la division n’est pas considérée comme professionnelle. Après tant mieux pour eux, mais cela va forcément créer des différences de préparation physique à la reprise.”
Il y a deux poids deux mesures
Patrick Petit
Même son de cloche pour Serge Tristram, président de l’ESCLAMS, “je pense que c’est quelque part une injustice car dans un championnat, on doit tous être sur le même pied d’égalité. Le championnat de NM2 n’est pas professionnel et je ne comprends pas pourquoi les règles diffèrent selon les équipes. Je comprends le principe de précautions de certaines communes mais il devrait y avoir une harmonie dans les décisions. Avec la prolongation du confinement les choses vont encore plus se compliquer. Il va y avoir tout à refaire car une préparation physique individuelle ne remplace pas le travail à la salle en collectif, nous sommes dans l’inconnu.”
Pour Nicole Delcour, présidente de Tourcoing, le discours est semblable, “on ne peut plus s’entraîner depuis un très long moment puisque l’on a été confiné avant tout le monde. Mais on nous a obligés à disputer des matchs pendant un mois sans réel entraînement… Forcément cela a influé sur nos résultats et la situation dans laquelle la FFBB nous a mis est inadmissible. On a en plus dû enchaîner les rencontres à l’extérieur ce qui pourrait avoir des conséquences si l’on joue seulement la phase aller. La NM2 n’est pas considérée comme professionnelle donc le fait que certaines équipes s’entraînent n’est pas équitable et va créer des soucis à la reprise, surtout que l’interruption va être plus longue que prévue. La FFBB estime qu’en quinze jours-trois semaines on peut retrouver le rythme, mais après une si longue pause il faut presque refaire une préparation et tous les clubs ne s’entraînent pas tous les jours ou plusieurs fois par jour. Il y a une multitude de choses qui accentuent les inégalités sportives et tronquent le championnat. Les clubs « professionnels » de la poule sont clairement avantagés par les décisions.”
Il y a une multitude de choses qui accentuent les inégalités sportives et tronquent le championnat.
Nicole Delcour
Il y a donc une incompréhension globale pour un grand nombre de clubs mais la faute à qui ? En effet, si les clubs peuvent s’entraîner c’est qu’ils en ont l’autorisation de la Mairie. Il y a donc, selon les régions ou secteurs, des disparités dans les décisions, qui engendrent de l’incompréhension mais surtout une inégalité sur le plan sportif. Mais le vrai problème est que pour beaucoup cette situation passe au second plan. En effet, la situation économique et les conditions de reprise posent énormément de questions.
C’est d’ailleurs ce qui préoccupe le manager général du club liévois, “la vraie question est de savoir comment on va reprendre la compétition et dans quel contexte. Notre budget est composé à 90% de partenaires privés, jouer à huis clos n’est pas tenable. Cela revient à avoir des dépenses mais aucune rentrée d’argent même pire car à chaque match à huis clos je dois rembourser des places à mes partenaires car je ne peux les honorer. Il y a des enjeux financier importants pour un grand nombre de clubs et il faut que la fédération prenne en compte cette donne. Il faudrait aussi se pencher sur la suite du championnat car on parle de finir au minimum la phase aller pour faire un classement. Mais nous avons sur les 13 matchs retours 8 à domicile, il va donc là aussi se poser un problème d’équité sportive. La fédération doit aussi penser aux clubs, car sans ça il y aura de nombreux dégâts dans les mois à venir.”
Un avis partagé par Serge Tristram lui aussi inquiet, “on ne pourra pas reprendre à huis clos car financièrement ça ne sera pas tenable. On est déjà privés des activités annexes que l’on réalise habituellement, faire sans la billetterie et la buvette ne serait tout simplement pas possible. Cela impliquerait aussi de ne pas pouvoir recevoir nos partenaires. La fédération souhaite finir les matchs aller car à partir de là un classement peut être entériné c’est dans les règlements, l’équité ne les préoccupe pas vraiment. On ne sait pas vraiment où l’on va aujourd’hui et cela pose de nombreux problèmes. Finir au mois de juin alors que de nombreux joueurs ont des contrat qui se termine avant pourrait par exemple engendrer d’énormes soucis. Le premier confinement avait déjà mis à mal les trésoreries des clubs et la situation actuelle pourrait être fatale pour certains. Si l’on a pas la possibilité de repartir dans des conditions normales et de générer des revenus nous ne pourrons finir la saison au complet.”
La présidente de Tourcoing, Nicole Delcour, met aussi en cause la gestion de la FFBB et s’inquiète d’une possible reprise à huis clos. “On a vraiment l’impression que la fédération veut faire en sorte que l’argent rentre coûte que coûte quelque soit l’impact sur les clubs et même si cela influe sur l’équité sportive. En obligeant des équipes à jouer sans entraînement met aussi en péril la santé des joueurs. Jouer seulement les matchs allers serait une nouvelle fois quelque chose d’inégale mais c’est dans les règlements. On est déjà privé de buvette et de billetterie depuis le début de saison, si cela continue c’est 10000€ de budget en moins sur la saison. On a la chance d’avoir une municipalité qui nous soutient mais l’on a pas de visibilité donc c’est très compliqué de se projeter et d’envisager la suite.”
Pour le président de Gravenchon, la possibilité de reprendre à huis clos pose moins de problème, “évoluer à huis clos ne serait pas vraiment un problème financièrement pour le club. Il y aurait un manque à gagner évident mais la part à laquelle correspond la billetterie n’est pas énorme pour un club comme le nôtre. Ce serait par contre dommageable pour notre public qui ne pourrait suivre l’équipe.”
La suite de ce papier est à retrouver dès demain sur notre site.
Aurélien Finet
Crédit Photo : Léandre Leber – Gazettesports