ACTUALITÉS : Un bel hommage au judoka, Michel Bourgoin

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Ce jeudi, la Maison des Sports a accueilli une soixantaine de personnes pour rendre hommage à un « monument » du judo français, Michel Bourgoin, à travers le récit conté par le journaliste Lionel Herbet et les anecdotes partagées par son fils, Frédéric.

Une soixantaine de personnes ont répondu présentes ce jeudi, à l’occasion des « Rendez-vous du Sport » organisés par la Maison des Sports, conjointement avec le Département et le Comité départemental olympique et sportif. Cette soirée a été l’occasion de mettre à l’honneur Michel Bourgoin, représenté par son fils Frédéric, témoin le plus proche de sa vie et de son parcours, pour le plus grand plaisir du public.

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La parole est d’abord donnée à Lionel Herbet, journaliste, qui entame le récit de la vie de Michel Bourgoin. « C’est un moment de mémoire et d’histoire », souligne l’octogénaire, qui tient personnellement à cet hommage. L’idée est de remonter le temps pour comprendre comment cet homme a marqué son époque, non seulement en tant que l’un des plus grands champions de judo de l’après-guerre, mais également comme passeur de valeurs et maître de transmission. La conférence se déroulera autour de quatre étapes, « comme autant de tatamis posés les uns après les autres », racontées par Lionel Herbet, la bible vivante du sport picard.

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Frédéric, fils de Michel Bourgoin

Michel Bourgoin naît dans un contexte particulier : les années 1950 voient l’explosion des grands champions de judo. Dans la Somme, et plus largement en Picardie, les infrastructures commencent tout juste à se mettre en place, laissant beaucoup à construire. C’est dans ce cadre qu’il découvre le judo, à 16 ans, presque par hasard. « Il n’aimait pas les chiffres, mais on lui prédisait une carrière d’expert-comptable, comme son frère aîné. C’était un peu un rebelle, et il a choisi le sport… ou c’est le sport qui l’a choisi », se rappelle son fils Frédéric. Ce qui distingue Michel, c’est sa stature, sa puissance, et sa compréhension instinctive du mouvement grâce à des qualités purement innées. « C’est un monument », déclare Lionel, fier d’avoir partagé un voyage avec lui au Vietnam. En 1958, il devient champion d’Europe senior premier dan. Trois ans plus tard, il est sacré champion de France toutes catégories et finaliste des Championnats d’Europe toutes catégories à Milan. Il affronte la légende néerlandaise Anton Geesink à plusieurs reprises jusqu’à l’apparition d’une grave blessure au genou en 1964, qui met prématurément fin à sa carrière : Michel n’a que 27 ans et est alors quatrième dan.

Une nouvelle ère commence, celle du bâtisseur et « celle de père », ajoute Frédéric d’un ton léger. Michel enseigne les techniques, mais transmet surtout une philosophie, une éthique des valeurs du judo. « Mon papa était un bon vivant », lâche son fils à propos de son père devenu entraîneur. Les jeunes cadres techniques à son contact découvrent les bons vins. D’ailleurs, Michel n’a jamais écrit d’ouvrages sur les techniques du judo, mais sur les vins. « Pendant les stages, la table des cadres était toujours bien arrosée », sourit Frédéric.

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Frédéric Biurgoin tient sa passion du judo de son père.

Michel Bourgoin occupe de nombreuses fonctions nationales et internationales et atteint le 8e dan, un grade élevé à l’époque, réservé à une véritable élite. Aujourd’hui, ces règles ont changé, mais à son époque, il fallait notamment avoir été membre de l’équipe de France. Curieusement, Michel n’atteint jamais le 9e dan, probablement parce qu’il n’était plus suffisamment présent sur les tatamis en raison de sa retraite, ce que beaucoup ne comprirent pas. Sa volonté hors norme et sa gentillesse restent des valeurs qu’il a transmises à son fils et à son club, contribuant à perpétuer son héritage technique et humain. Michel marque profondément ses élèves. Au dernier entraînement avant son déménagement en Vendée, à La Roche-sur-Yon, 80 judokas sont réunis pour une véritable fête du judo. 

Finalement, ce mentor n’était pas inquiet pour l’avenir du judo, convaincu que ce sport s’était bien structuré. Sa plus grande difficulté, confie Frédéric, a été de devenir un homme « normal », de poser sa casquette de judoka international. « Tous ceux qui ont pratiqué le judo en sortent grandis », souligne-t-il. Le judo a façonné l’homme autant que l’athlète. « Nous, ses trois enfants, sommes pratiquement nés sur un tapis de judo. Avec mon père, nous avons partagé cette connexion, cette même passion. Beaucoup de personnes en stage m’ont dit qu’on avait l’impression de revoir mon père, dans mes gestes, mes paroles… c’est un bel hommage », conclut son fils. Avant que chacun ne prenne la parole pour témoigner, plus ou moins intensément, de son lien avec Michel, que le public remercie chaleureusement lui et son fils, Frédéric, pour la transmission de leur passion, donnant ainsi à la soirée une belle teinte d’émotion.

Sabine Loeb
Crédit photo : Sabine Loeb – Gazettesports.fr