HISTOIRE : Chantal Langlacé la première femme à avoir disputé le marathon

Chantal Langlace (2)
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Dimanche dernier, des milliers d’hommes et de femmes ont participé à la Jules Verne, une course qui se déroule dans les rues d’Amiens. Chaque année, cette épreuve attire de plus en plus de monde, notamment parmi les femmes. Si le nombre de participantes augmente d’année en année, c’est en partie grâce à Chantal Langlacé, qui a donné l’exemple en étant la première femme à s’aligner au départ d’un marathon.

Revenons en effet 51 ans en arrière. Chantal Langlacé est une athlète qui, au départ, joue au football et pratique même le cyclisme (elle sera plus tard championne de Picardie sur route). Elle est d’ailleurs une fervente supportrice de Raymond Poulidor. Chantal a aussi la chance d’avoir un jeune entraineur de qualité Philippe Barbier qui lui donne d’utiles conseils, notamment celui de s’aligner sur un marathon, ce qui au départ eu le don d’effrayer Chantal. Dans sa tête, elle repensait à ce célèbre Soldat de Marathon qui, dans l’Antiquité, avait couvert les 42,195 près d’Athènes et elle savait parfaitement que marathon rimait avec souffrance.

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Mais si en définitive Philippe Barbier parvenait à convaincre Chantal, les autorités sportives en France restaient sur leur position. Il n’était pas question de marathon féminin. Nous étions alors en 1974 et à cette époque, la Fédération Française d’Athlétisme interdisait officiellement le marathon, estimant même que l’avenir du marathon au niveau olympique était sombre. La FFA avait même édicté un règlement qui autorisait les femmes à courir sur route, mais sur la distance maximum de 5 km.

À l’inverse sur le plan médical, le Docteur Stephan affirmait « qu’il n’y avait pas de danger« . Et de se justifier par cette déclaration : « Les efforts d’endurance sont moins toxiques que les efforts de résistance pour les femmes. Une fille normalement préparée comme l’est Chantal Langlacé et dont le pouls bat à 45 pulsations par minute, peut courir sans danger sur de longues distances.« 

Assez rapidement, Chantal Langlacé, alors âgée de 19 ans, a augmenté la distance de ses courses. La première fois qu’elle s’aligna au départ d’un marathon en Europe, ce fut en Belgique, à Nivelles, durant l’été 1974. Elle était la seule femme au départ, mais ses adversaires l’ignoraient. Chantal termina ce marathon de Nivelles en 2h46’18’’, soit tout simplement la meilleure performance mondiale de l’époque. Ce qui lui valait une page complète dans le Journal L’Equipe, accompagnée d’un titre évocateur du journaliste Christian Montaignac : « Chantal Langlacé, la Cendrillon du Macadam. »

Quelques semaines auparavant, elle avait disputé le marathon de Boston aux États-Unis, où elle avait reçu un très bel accueil. À Nivelles, même si l’organisateur était au courant de la présence de Chantal, la légende raconte que notre Amiénoise avait revêtu une tenue un peu plus masculine pour ne pas être reconnue. Car dans la vie de tous les jours, ce n’était pas toujours simple pour Chantal, qui faisait parfois l’objet de remarques peu sympathiques (souvent sexistes).

Ainsi un jour une dame l’accostait et lui disait : « Je ne t’embrasse pas. À courir comme ça, tu m’impressionnes. » Elle percevait Chantal comme un garçon manqué. Pour Chantal, le marathon, c’était la liberté et l’indépendance. L’histoire de Chantal Langlacé est donc unique, et il faut remonter à 1908 et au Tour de France remporté par Petit-Breton. À cette époque, le patron du Tour de France, Henri Desgrange, qui ressemblait beaucoup à Pierre de Coubertin, interdisait aux femmes d’être présentes non seulement dans la course, mais aussi au sein de la caravane, même en tant que journalistes.

Récemment, L’Equipe a retracé l’Histoire d’une pionnière comme Chantal Langlacé. Il s’agissait de Marie Marvingt, une authentique championne du début du siècle dernier, qui, raconte la légende, a disputé le Tour de France 1908 courant non pas dans le peloton masculin mais devant le plus souvent. Aujourd’hui, le stade de football du Mans qui vient de retrouver la L2 porte le nom de Marie Marvingt. Le nom de Chantal Langlacé ne doit pas être oublié.

Lionel Herbet
Crédit photo : DR

Publié par Lionel Herbet

Journaliste historique du sport Picard et Amiénois. Lionel est la mémoire des plus grands exploits sportifs de la région.