DROIT D’AUTEUR : En période de transferts, je ne suis pas courtois, et tant mieux !

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Voilà qu’en moins de dix jours, nos photos ont été reprises, sans autorisation, par plusieurs sites, pages et clubs. La raison ?La période des transferts, qui ne fait que commencer ! Elle démarre actuellement dans le monde du hockey sur glace, et d’autres sports suivront bientôt comme le handball, basket, football, volley-ball… Clubs, joueurs, médias, réseaux sociaux : soyez très vigilants ! L’utilisation de photos soumises à des droits d’auteur comporte des risques juridiques et financiers bien plus importants que vous ne l’imaginez si vous en faites usages sans notre accord ! Normal, non ?

Il paraît que le rédacteur en chef de Gazette Sports a « manqué de courtoisie ». Du moins, selon un site qui utilise nos photos sans autorisation et sans nous créditer. Très bien. Si, pour ceux qui ne respectent pas notre travail, défendre nos droits équivaut à manquer de courtoisie, alors nous assumons pleinement cette réputation ! La réalité, c’est que dès que nous constatons l’utilisation non autorisée de l’une de nos photos, nous réagissons immédiatement, avec un message clair et direct. Nous parlons de vol, de respect du droit d’auteur, de photos non libres de droit, et, le cas échéant, de facturation. Et c’est là que ça coince : ceux qui utilisent nos contenus sans autorisation tentent souvent de se justifier ou de retourner la situation, invoquant la « bonne foi », parfois sincèrement, souvent non. Ce n’est pas un cas isolé : cela arrive plus de 200 fois par an ! Alors oui, vous pouvez comprendre notre lassitude et un ton très direct et cette réputation de manque de courtoisie. Car dans notre média, nous payons nos photographes !

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200 photos « volées » pour l’année sportive en cours…

Nous nous engageons activement pour défendre le statut des photographes, le respect du droit d’auteur et la reconnaissance de notre travail, même si notre média est gratuit. Contrairement à une idée reçue, la diffusion sur les réseaux sociaux ne fait pas disparaître les droits d’auteur. Bien au contraire ! À titre d’exemple : en tant que média, nous percevons de Google une rémunération au titre des droits voisins, en plus des revenus publicitaires. Ce versement, bien que modeste, repose sur un principe essentiel : si une plateforme tire profit de nos contenus, il est normal que nous soyons également rémunérés. Alors si vous utilisez nos photos, il est normal que nous puissions aussi avoir un retour.

Pourquoi, alors que nous rémunérons nos photographes et ce, sans recours à aucun bénévole depuis plus de huit ans, certains estiment-ils normal d’utiliser nos photos gratuitement ? Pourquoi ce qui a un coût pour nous devrait-il être gratuit pour d’autres ? Il est vrai que certains médias ne rémunèrent ni leurs photographes ni leurs rédacteurs. Nous en connaissons de nombreux et malgré leur statut de société. C’est du travail dissimulé, et cela constitue une concurrence déloyale répréhensible par la loi. Ce n’est pas notre fonctionnement. Nos photographes sont journalistes, pigistes, correspondants.

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Les transferts, club et joueurs attention aux photos !

La période des transferts est souvent marquée par une forte augmentation des atteintes au droit d’auteur. Les principaux fautifs ? Bien souvent, ce sont les clubs et les agences de communication, mal conseillés ou mal informés mais aussi, naïvement par les joueurs eux-mêmes.

Prenons un exemple concret : un joueur peut posséder une de nos photos à titre personnel. Mais s’il la transmet à un club pour une publication, ce dernier doit impérativement se poser la question suivante : « Qui détient les droits de cette image ? » La réponse est claire : ce n’est pas le joueur, même s’il y figure. C’est une idée reçue très répandue, mais fausse. Nous sommes dans un cadre journalistique, non commercial : il ne s’agit pas ici de vendre des posters ou des produits dérivés mais d’une information. Prenez le cas de Kylian Mbappé, devrions nous demander les droits au joueur pour diffuser une photo de lui dans notre média ? Non !

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En journalisme, la photo appartient au média, photographe, non à la personne photographié.

Même intégrée dans un montage, la photo ne devient pas votre propriété !

Vous cherchez une photo, vous prenez la nôtre, puis vous la modifiez pour créer un montage. Pourtant, même transformée, l’image d’origine reste notre création, et son utilisation nécessite notre accord. Sans cette base, qu’elle soit utilisée telle quelle ou intégrée à un visuel généré par une IA, votre création n’aurait pas pu exister. Il est donc nécessaire de nous demander pour la création de vos visuels, notre accord.

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Nos photographes sont payés, si vous prenez nos photos, contribuez aussi à les rémunérer !

De notre côté, nous faisons systématiquement l’effort de demander l’accord des clubs ou des photographes lorsque nous ne réalisons pas nous-mêmes les clichés. La moindre des choses, c’est que ce respect soit réciproque : demandez-nous l’autorisation avant de publier nos photos. Nous étudions chaque demande et répondons en toute transparence : oui, vous pouvez publier, parfois gratuitement, parfois non, pour des raisons précises que nous vous expliquons. Les refus sont rares, et dans la grande majorité des cas, un simple dialogue permet d’aboutir à un accord qu’il soit financier ou de partenariat.

Même si vous mentionnez notre crédit photo, si vous n’avez pas obtenu notre accord préalable, vous n’avez pas le droit d’utiliser notre image. Qu’il s’agisse d’une association, d’une entreprise privée, d’une page Facebook, Instagram ou TikTok, aucune structure ne peut utiliser une photo issue d’un tiers pour sa communication, même gratuite, sans autorisation. Et tôt ou tard, vos publications finissent par remonter dans notre fil d’actualité. C’est à ce moment-là que nous intervenons. Ce qui aurait pu se régler par un simple message ou appel devient alors une affaire de vol d’image et de non-respect des droits. Et à partir de là, les choses prennent une toute autre dimension. Ce fameux message peu courtois pour signifier que l’on a vu notre photo et qu’il serait bien de faire le nécessaire pour respecter le travail !

Une photo que nous aurions pu céder gracieusement dans le cadre d’une bonne relation, ou vendue pour quelques euros via une agence de presse, se transforme en infraction. Et les montants ne sont évidemment plus les mêmes. À titre d’exemple, l’AFP facture environ 1 500 € pour ce type d’usage illicite ; MaxPPP (Courrier Picard, Paris Normandie, La Voix du Nord…) facture autour de 1 000 €, et nous aussi. Cela dit, lorsque le dialogue reste possible, nous sommes ouverts à des arrangements ou solutions alternatives. Mais, si aucune conciliation n’aboutit, nous maintenons notre facture, et, le cas échéant, nous saisissons la justice. C’est d’ailleurs ce que nous faisons actuellement dans deux dossiers impliquant des médias nationaux ou locaux. Un troisième cas, avec un guide national, a été conclu de façon amiable.

Google et d’autres ont des filtres pour les photos « libres de droit » ou non

Alors, comment savoir si une photo est libre de droits ? Google propose un filtre pour n’afficher que des images réutilisables légalement. Par ailleurs, de nombreux indices permettent d’identifier une photo protégée : une mention de copyright, un nom de fichier comportant celui du média ou du photographe (comme c’est le cas pour les nôtres), ou encore un marquage discret sur l’image. Il devient donc difficile de prétendre ignorer que la photo appartient à un auteur ou à un média. Le manque d’information ne peut pas justifier le non-respect du droit.

La formation des dirigeants, des clubs quand les fédérations, ligues, comité départementaux s’y engageront sérieusement…

Comment réduire ce fléau ? Le premier acte est de na pas laisser passer, essayer d’instaurer un dialogue pour trouver une solution. La seconde serait que les fédérations sportives s’emparent du sujet sérieusement en prévoyant des formations pour les dirigeants autour du droit à l’image mais aussi du plagiat des articles. Dans la Somme, certains comités comme celui de l’athlétisme, le CDOS, le CROS commencent à sensibiliser les structures à celà. Mais les clubs, même pour une formation gratuite, « oublient » ou négligent d’envoyer des bénévoles ou des communicants (sachant tout évidement).

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L’éducation aux médias et à l’information (EMI), un axe de formation « bord terrain ».


L’éducation aux médias, EMI, doit se faire aussi en bord terrain, en discutant et en nouant de bonnes relations avec les coaches, les managers des clubs. Nous proposons depuis des années que les clubs se forment à nos cotés, de se rencontrer pour expliquer au nouveau service civique ou alternant les règles des droits d’auteur et des plagiats de nos articles. Mais pas assez de club ou de comité ne nous sollicite. Pourtant, j’ai envoyé des mails, discuté en direct avec des fédérations et rien n’y a fait. La sensibilisation du droit d’auteur et du plagiat ne sont pas encore à l’ordre du jour. Avec Damien Fleurot des « Lumières de l’Info » nous avions évoqué cette problématique nationale, et nous proposons l’un et l’autre d’aller vers la sensibilisation de cela et pas seulement des fakes news. Cette discussion avait débuté il y a deux ans lors des « assises internationales du journalisme de Tours » ou j’intervenais pour l’éducation au média en « bord terrain.’

Mais pour certains, il est tellement plus simple de penser que gratuit c’est donc pour tous. Iriez-vous prendre une photo du site de L’Equipe ? Sans doute pas ! Nous avons exactement le même droit qu’eux. Mais cette attitude de la part de média qui ne rémunère pas, qui utilise n’importe quelle photo entraine une dévalorisation du métier et de la « valeur » photo. Alors s’il faut manquer de courtoisie pour que la photo ait encore un prix, nous continuerons à ne pas être courtois avec ceux qui entraine notre métier dans cette spirale.

Léandre Leber
Crédit photo : Léandre Leber, Kevin Devigne, Théo Bégler et Dorine Cocagne – Gazettesports

Publié par Leandre Leber

Fondateur du média, journaliste curieux tant en photo qu'en rédaction. Les mots et les rencontres ont du sens.