A 50 ans, le nouveau coach de l’ESCLAMS, fils unique originaire de Savoie, globe trotteur du basket se fait tirer le portrait pour essayer d’apprendre à mieux le connaître.
Quand on le voit gesticuler sur le banc et crier dans tous les sens, on pourrait le prendre pour un fou mais il l’a confirmé, il va très bien. Sébastien Bozon est en effet un personnage qui à lui seul assure le show les samedis soir. Mais qui se cache derrière ce personnage ? Quand on lui demande qui est Sébastien Bozon sa réponse est assez limpide : “Il y a ceux qui me connaissent qui peuvent dire qui je suis. C’est compliqué, car l’homme est complexe (rire).”
Si l’homme est complexe, l’entraîneur de basket, lui, jouit d’une réputation assez solide mais aussi d’un coach très dur et exigeant. Mais paradoxalement, les joueurs l’apprécient même quand ça va moins bien comme en ce moment, ce qui ne lui est pas souvent arrivé. Tout simplement car son management est un peu comme l’homme à deux visages. “Quand le coach fait chier les joueurs, il est viré mais moi je m’en fous. Chacun sa façon de faire et moi j’assume la mienne. Je suis très dur et exigeant mais ça se passe très bien avec les mecs car j’ai la réputation d’être proche d’eux, avec forcément plus d’affinité avec certains qu’avec d’autres.” Le style est donc totalement assumé et grâce à son authenticité et sa franchise, il arrive à créer de vrais relations avec ses joueurs le tout en “les torturant” au quotidien. Cela lui rappelle d’ailleurs une anecdote, “Ce qui est drôle, c’est quand les mecs sont blessés et assistent à l’entraînement sur le banc et que je pourris les autres. Ils se disent heureusement que je suis pas sur le terrain (rire).”
Mais avant de se créer un tel palmarès et une telle réputation, comment celui-ci à t-il atterrit dans le basket, sport qui ne lui était pas forcément prédestiné vu sa taille ? C’est le hasard comme il le souligne. En effet, ce dernier était plus adroit avec ses pieds que ses mains. Il a d’ailleurs longtemps brillé sur les skis mais surtout au football. Mais derrière ce hasard, il y a une histoire d’amitié et de passion comme il le raconte. “Tous mes amis viennent du basket et j’ai toujours été passionné. Je regardais les matchs de foot avec mon père et de basket avec mes potes. Je jouais un peu avec eux au basket, et, quand j’ai arrêté mes études, je devais faire l’armée. Finalement je me suis retrouvé à travailler dans la mairie de mon village et j’ai commencé à entraîner des jeunes.”
Le début d’une histoire qui prend une tournure un peu inattendue grâce à une victoire charnière. “Un jour, on à battu Aix-Maurienne avec mon petit club de village et ils sont venus me chercher alors que j’étais encore conseiller d’éducation. Un an après, un poste s’est libéré et ils m’ont embauché. Depuis, ça fait 24 ans que je fais ça.” Si le destin l’a mis sur le chemin du basket, le travail et la passion lui ont permis d’écrire son histoire. “Vous ne pouvez pas faire ça aussi longtemps sans cet amour du basket.“
Encore une fois, des rencontres lui ont permis de passer un cap dans sa carrière de coach et de combler les lacunes techniques. “Au début, j’avais de réelles lacunes mais je suis arrivé dans un club où les coachs de l’époque m’ont pris sous leurs ailes, ce qui m’a fortement aidé. Forcément, j’ai été chambré pour ma taille et mon passé de footeux mais j’ai très vite été accepté. J’ai passé ma vie sur les terrains à regarder des matchs et quand ce n’était pas au stade c’était à la télé. J’ai aussi potassé énormément pour combler les lacunes techniques.” Compétiteurs dans l’âme depuis le début, il n’était pas question pour se sportif d’échouer, il a alors travaillé d’arrache pied pour devenir légitime et pallier ses manques.
La naissance d’un personnage
Propulsé à la tête d’une équipe seniors dont l’ensemble des joueurs étaient plus grands que lui, sans expérience, sans bagage technique et avec des lacunes, il a fait parler son leadership pour s’imposer. “Sur le coaching et le fait d’être un leader je l’étais déjà en tant que joueur donc je n’ai pas eu de problème là-dessus. Je n’ai pas eu le choix de m’imposer. J’ai toujours été un peu dirigiste dans ma vie, c’est aussi une façon de coacher. Au début, j’étais obligé mais aujourd’hui c’est devenu une marque de fabrique. Avec l’expérience, quand je m’énerve aujourd’hui, c’est parce qu’ils m’énervent vraiment.” Une marque de fabrique et une façon de faire qui a fait ses preuves en menant ce dernier jusqu’à la Pro B avec Aix-Maurienne, équipe avec qui il a tout connu en 17 ans.
Et quand, malgré son palmarès, ses détracteurs évoquent l’absence de passé de joueur, son franc parlé est de nouveau de sorti. “On continue de me dire que je n’ai pas joué au basket mais il y a toujours des cons. Quand on veut mal parler des gens, on trouve toujours mais pas dans le milieu, car les gens savent ce que j’ai fait. “
Un personnage différent dans la vie…
S’il est dur et très vocal sur le banc, c’est un tout autre personnage dans la vie et heureusement comme il le souligne. “Je suis différent dans la vie que sur le terrain et heureusement car sinon je n’aurais pas de potes (rire). » Parler de lui, ce n’est pas son point fort mais ce dernier va indirectement se livrer. S’il aime sa vie tranquille en dehors du basket, lui qui aime à dire qu’il est le seul coach à lire des livres, a quand même tout le temps quelque chose qui le rattache au ballon orange. “C’est la vie que j’ai choisie. Je n’ai jamais voulu avoir de “vie en dehors”. Ma vie, c’est le basket et ça me va très bien.” Avant de poursuivre, “Parfois, je perds un peu espoir en la société et je ne reconnais pas le monde dans lequel j’ai grandi et c’est peut-être pour ça que je n’ai plus de rêve”. Des mots forts pour celui qui dit être philosophe.
Quand il s’agit de parler basket, il est tout de suite plus bavard et l’on sent cette passion. Une attache et un amour du basket qui lui a permis de faire encore ce métier aujourd’hui. “J’ai parfois pensé à arrêter mais ce qui te fait arrêter, ce n’est pas le basket, mais l’environnement. Que ce soit les dirigeants, joueurs ou autres. Pour le moment la passion m’a toujours rattrapé mais parfois tu as envie de tout plaquer.”
Quand on lui demande pourquoi il a rejoint l’ESCLAMS, ce dernier ne se cache pas une seconde. “C’est simple, j’étais au Cannet, je suis monté en NM1, on m’a refusé la montée, j’ai donc démissionné. Je viens du monde pro mais je n’arrive plus à y revenir malheureusement mais c’est comme ça. J’ai eu des pistes, surtout à l’étranger, mais ça ne s’est pas fait. Au bout d’un moment, aller voir les potes c’est bien mais je n’avais tout simplement pas envie de rester au chômage. Mon agent m’a parlé du club de Longueau que je connaissais. Au début, il n’y avait rien de concret puis j’ai eu le président et en une semaine j’ai mis mes affaires dans ma voiture et je suis venu ici.”
Si ce n’était pas le projet initial ce n’est pas un choix par défaut qu’il assume pleinement, lui qui se dit très content d’être ici dans une situation loin d’être perdue. “J’ai l’habitude de jouer les premiers rôles mais jouer le maintien ne me dérange pas du tout, c’est un challenge excitant. Si je suis venu, c’est que je sais que l’équipe n’est pas si faible que ça et que c’était loin d’être peine perdue. D’ailleurs, malgré que l’on soit si près et si loin, ce que je vois, c’est qu’à la trêve, on est pas relégable. On paye les musiciens à la fin du bal même si je ne vais pas excuser les mecs tous les week-ends non plus.”
Ce qui l’aide aussi à apprécier cette nouvelle expérience, c’est un groupe de “bons mecs” comme il n’a jamais eu même s’ils sont un peu trop soft à son goût. Mais comme il aime le dire, “on ne fait pas de dauphins des requins”. Si parfois il concède qu’à 50 ans, certaines choses l’ennuient, comme entrainer au quotidien, la présence de Liam Michel le soulage pleinement. “J’ai un super adjoint avec Liam. Ce n’était pas facile pour lui car il était avec l’ancien coach mais ça se passe très bien, c’est un mec formidable, très compétent et c’est un énorme plus pour le club.”
Vous pourrez découvrir la suite de ce portrait, ce dimanche 29 décembre.
Aurélien Finet
Crédit Photo : Théo Bégler & Léandre Leber – Gazettesports.fr
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