AUTO : Lilou Wadoux et Adeline Lourenço, l’une au volant et l’autre à la data-performance

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Le sport automobile est encore loin de la parité mais il compte de plus en plus de femmes au volant, comme Lilou Wadoux, 7ème de l’Alpine Elf Europa Cup 2020. Et elles sont peu nombreuses à régler et préparer les voitures. C’est le cas d’Adeline Lourenço, 26 ans, ingénieure de course data-performance.

« Je suis arrivée chez Autosport GP par hasard et sur un coup de chance ! explique Adeline LourençoJe cherchais à travailler et il leur manquait un ingénieur pour le meeting final de la saison de l’Alpine Cup, à Portimao… » Bingo ! Ses références déjà solides en dépit de son jeune âge, lui ont permis de remplacer temporairement Julien Neveu, l’ingénieur de course attitré de Lilou Wadoux, pris ce week-end-là chez Graff, en LMP2. Une « pige » pour découvrir l‘Alpine Elf Europa Cup (AEEC) en forme de séjour intense de quatre jours au sud du Portugal, sur le circuit où les A 110 Cup livraient leur dernière bagarre de l’année. « J’ai pris beaucoup de plaisir à intégrer ce team pour la fin du championnat et à partager le titre avec eux » savoure derrière son masque celle qui aura donc pu fêter le doublé des pilotes Autosport GP Jean-Baptiste Mela et Laurent Hurgon, montés sur les deux plus hautes marches du podium. Un exploit auquel s’est ajouté le titre chez les juniors du même JB Mela !

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Adeline Lourenço en analyse de data

« Des courses intenses en Alpine Cup »

« Je me suis très bien entendue avec tout le monde. C’était facile de discuter avec les pilotes, pour leur demander leur avis. Mon intégration a été très rapide » se remémore Adeline Lourenço. Ce qui est tombé à pic car en Alpine Cup « les courses sont courtes (NDLR : 25 minutes + un tour) mais plutôt intenses, au niveau de la préparation des pilotes et de la concentration. Côté réglages, c’est différent des courses d’endurance qui durent quatre heures et où les tests sont aussi beaucoup plus longs. J’ai trouvé ça intéressant. »

Simulateur de course

La Bourguignonne, originaire de Cluny (Saône-et-Loire), ne boude pas, de toute façon, le plaisir qu’elle ressent dès qu’elle gravite autour des paddocks : « depuis toute petite, j’ai été attirée par le sport auto. Mon papa collectionne les vieilles voitures. Il a aussi fait du rallye » précise celle qui a également su toquer aux bonnes portes. « Quand j’étais en école d’ingénieurs, l’ISAT à Nevers, j’ai fait mon stage de fin de 4ème année chez South Racing, un team spécialisé dans le rallye-cross-country. Puis mon stage de fin d’études chez Duqueine Engineering, sur leur centre d’entraînement, en travaillant sur simulateur de course et à la préparation des pilotes. Des pilotes de différentes catégories, des jeunes qui passent du karting à la F4 aux Gentlemen en GT, Proto, en monoplace. Et j’ai poursuivi pendant six mois, en mettant à mon compte la gestion de leur centre d’entraînement jusqu’en janvier dernier. »

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« Lilou Wadoux s’améliore rapidement. » Adeline Lourenço, ingénieure de course

Depuis, la pandémie est passée par là. Pour Adeline Lourenço, « le Covid a compliqué la situation, comme pour tout le monde, mais j’ai quand-même pu travailler sur mes trois premières courses, avec le team Orhès Racing, sur Ligier et en Fun Cup. » La suite, on la connaît… L’Alpine Elf Europa Cup, pour l’ultime rendez-vous de la saison, vécu de l’intérieur, dans l’équipe déjà assurée du titre. Si numériquement, elle remplaçait chez Autosport GP Julien Neveu, l’ingénieur de course en binôme toute la saison avec l’Amiénoise Lilou Wadoux, 7ème au classement général final pour sa première saison en Alpine, c’est auprès de Pierre Macchi, pilote gentlemen chevronné, qu’elle a découvert l’Alpine Cup. Tandis que la jeune picarde faisait équipe avec un ingénieur maison, Alexandre Fonfreide, tout en débriefant à distance avec « son » ingénieur habituel. « Si j’avais déjà rencontré Julien Neveu, je n’avais pas encore croisé Lilou, explique Adeline Lourenço. J’avais juste lu des choses sur elle sur Instagram – le compte Women in Motorsport – et j’avais aussi entendu parler de ses performances. A Portimao, j’ai trouvé qu’elle réussissait à s’améliorer rapidement, d’une session sur l’autre. Alors que d’autres pilotes, même très bons, mettent du temps à trouver le rythme. » 

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« Les femmes entre elles, c’est plus d’embrouilles ! » Lilou Wadoux

Allusion au meilleur tour dans la course 1 de Portimao signé par la jeune picarde ! Lilou Wadoux qui croit savoir que son équipe a été satisfaite de la collaboration avec Adeline Lourenço, même si l’Amiénoise répète inlassablement qu’elle n’attache pas d’importance au genre : « homme ou femme, je m’intéresse aux compétences et à la personnalité. Après, on dit que les femmes sont souvent plus organisées mais aussi que dans la vie, les femmes entre elles, c’est plus d’embrouilles… »  Et à quand une femme classée à l’arrivée devant la meute des hommes ? « Je ne vois pas pourquoi les femmes n’y arriveraient pas » s’exclame Adeline Lourenço. Et elles peuvent le faire dans n’importe quelle catégorie, parce qu’on voit maintenant des jeunes femmes qui arrivent dans toutes les catégories. Si un pilote, homme ou femme, est meilleur, alors il sera devant ! » En attendant que les femmes s’imposent, la collaboration avec Autosport GP a rendu la jeune « ingé » pigiste « très fière du travail avec Pierre (Macchi) ! Il a eu un bon rythme et l’écart s’est réduit avec les autres. Dans la course 1, il a réussi à se caler, c’est-à-dire à se mettre dans le rythme de la N°41 (Anthony Fournier, de Race Cars Consulting) qui était juste devant lui, à rester proche de ses temps et à suivre ses trajectoires. » 

« En tant que femmes, on doit faire beaucoup plus nos preuves. » Adeline Lourenço, ingénieure de course

Cette « pige », c’est en tous les cas une ligne de plus pas superflue sur le CV déjà bien fourni d’Adeline Lourenço, car pour travailler dans le sport auto, « en tant que femmes, on doit faire beaucoup plus nos preuves, c’est en tous les cas mon impression…Même si dans une catégorie comme celle-là (l’AEEC), on n’a pas à se plaindre. Les teams apprécient de plus en plus d’avoir des femmes, peut-être grâce à notre regard extérieur et différent, qui nous aide à nous intégrer et à apporter quelque chose. De toute façon, fille ou mec, il faut faire ses preuves pour se faire un nom ! » Une position qui rejoint celle de Lilou Wadoux pour qui « il ne faut pas que les filles courent entre elles si on veut qu’elles devancent un jour les mecs ! Quand je courais en Twingo, avec seulement des filles, j’ai gagné toutes les courses. Aujourd’hui, en Alpine, je me bats pour être dans les cinq meilleurs, au milieu des pilotes masculins. »

De l’Alpine Cup à la préparation du Dakar 2021

Et c’est pour aider à faire émerger des pilotes féminines qu’après Portimao, Adeline Lourenço a enchaîné et posé son ordinateur au Castellet, auprès de l’école de pilotage Winfield pour des tests afin de faire progresser huit jeunes filles sélectionnées par la FIA : « une progression en particulier sur la conduite et la gestion du freinage. » Adeline Lourenço croise à présent les doigts, elle qui se plait décidément au Portugal, car trois semaines après Autosport GP pour l’Alpine Cup à Portimao, elle collabore cette fois avec South Racing qui prépare près de Lisbonne le Dakar 2021*« Une expérience intense, des journées très longues, précise l’ingénieure touche-à-tout qui « préfère travailler sur les circuits. » Avis aux recruteurs !



Vincent Delorme (avec Léandre Leber)
Photos : Léandre Leber Gazettesports.fr

(*) : le Dakar 2021 doit se courir en Arabie Saoudite, du 3 au 15 janvier.