ATHLÉTISME : Arnaud Michel – « Je savais que j’avais mon record dans les jambes »

Ⓒ Arnaud Michel – 10km Valenciennes 2019
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L’édition 2019 des Foulées Valenciennoises qui s’est déroulée le 31 mars dernier avait vu de nombreux athlètes de la métropole participer. Quatorze d’entre eux se sont qualifiés pour les France de la spécialité comme relaté dans notre compte-rendu. La performance du weekend est à mettre au crédit de l’Amiénois Arnaud Michel, passé tout proche de changer de dimension (30’09 – 7ème français). 

Le sociétaire de l’Amiens Université Club a profité de la densité de la course pour effectuer une sortie remarquée. Dix-huitième d’un des dix kilomètres les plus relevés de France, Arnaud a répondu à nos questions. L’occasion pour nous de revenir en détails sur sa performance et ses objectifs futurs.

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Comment s’est passée la course ? Quel est ton ressenti ?

Je savais que j’avais mon record dans les jambes

Valenciennes n’était pas du tout une course prévue. L’objectif de la fin de saison hivernale c’était les France militaires de cross-country (ndlr : septième et vice-champion de France par équipe avec la Garde Républicaine). J’ai vu qu’à l’entraînement j’avais passé des bonnes séances. Notamment une séance test sur cinq kilomètres  qui m’avait rassurée sur les chronos (14’46 seul à l’entraînement sur la route). Je me disais que cela valait quand même le coup de terminer la saison sur un dix kilomètres pour voir de quoi j’étais capable. Je savais que j’avais mon record dans les jambes.

Ce weekend j’allais à Valenciennes pour tenter les moins de trente minutes. A un moment donné, pour casser des barrières, il faut prendre des risques. J’y suis allé vraiment dans cette optique là en me disant que la compétition la plus importante restait les France militaires. J’y suis donc allé plus relâché mentalement, sans pression. Je n’avais pas forcément annoncé que je venais pour tenter le coup.

A l’avant, le Kenya a dominé les débats. Kipkorir (6) et Bor (7) termineront respectivement en 27’52 et 28’05.

J’aurai bien aimé qu’on passe en 14’45, malheureusement on passe un peu plus lent (14’53, sept secondes d’avance sur la barrière des 30′ à la mi-course). Je savais que ça allait être un peu compliqué. On a perdu du temps le long du canal avec du vent de face. Je me suis retrouvé à mener un groupe de trois et forcément on y a tous perdu un peu. Je relance sur la fin (5’57 le dernier 2000m) mais c’était déjà trop tard. Il y avait la place. Neuf secondes à 20km/h c’est cinquante mètres, mais ils font toute la différence.

La barre des trente minutes c’est quelque chose de particulier, symbolique pour les coureurs sur route. Qu’est-ce cela représente pour toi ?

Pour tout coureur, la barrière des 30′ nous fait passer dans un autre cercle. C’est une barrière symbolique forte de sens sur 10km. C’est un peu le rêve de tout mec qui fait du dix kilomètres. Peut-être que quand j’arrêterai ma carrière j’aurais un record à 30’09 mais je n’aurais aucun regret. Je pense que beaucoup de monde serait déjà satisfait de faire ça.

Il y a donc un sentiment partagé entre le record personnel et la frustration d’être passé tout proche de changer de dimension ?

Je me suis pris au jeu, je venais pour ça. S’il avait fallu abandonner je l’aurais fait mais j’ai voulu tenter. Cela ne va pas passer neuf fois et la dixième ça passera. Je ne me suis pas posé de questions, je n’avais pas peur d’exploser. Forcément il y a de l’amertume, à la limite j’aurai préféré faire 30’40 et on en parlait plus (rires). C’est comme ça.

Ce dont je suis le plus fier c’est du chemin parcouru

Je cours depuis quinze ans, j’arrive toujours à progresser un petit peu d’année en année. Il y a cette satisfaction là de toujours progresser, grappiller les secondes. Ce dont je suis le plus fier c’est du chemin parcouru, de ma progression. Je ne sais pas si je vais réussir à descendre encore. Je suis content d’être arrivé à ce niveau là. Quand je faisais du football, si on m’avait dit un jour tu vas faire 30’09 je n’y aurais pas cru.

Tu avais initialement prévu de courir marathon de Paris le 14 avril prochain ?

C’était l’année oui, notamment pour accompagner François Leprovost (AUC), et Matthias Eymard (collègue de la Garde Républicaine). Je ne serai peut-être pas parti aussi vite qu’eux. Si j’étais monté sur marathon cette année c’était vraiment pour terminer, le temps que je voulais c’était entre 2h25 et 2h30 pour être sûr de finir. C’était un chrono abordable mais je ne voulais surtout pas monter en tentant un gros chrono et finalement exploser, abandonner. Cela m’aurait dégoûté, je ne serais jamais remonté sur marathon.

Arnaud avait terminé cinquième de la Transbaie en juin 2018 (premier français)
Tu as finalement décidé de ne pas monter sur marathon cette année. Qu’est ce qui a motivé ce renoncement ? 

En fin d’année dernière, après la semaine de coupure je n’avais plus l’envie de courir. C’était un peu le cri du cœur, je le ressentais au plus profond de moi. Au bout de quinze ans la lassitude s’installe, avec une monotonie dans les saisons : les cross l’hiver, un peu de route puis la piste. Je commençais à saturer. J’avais du mal à retrouver le plaisir. Je ne pouvais pas me lancer dans une préparation marathon dans cet état quand on sait ce que cela demande. J’ai discuté avec mon coach (Hakim Belhachemi), il fallait qu’on trouve des solutions. D’un commun accord on a décidé que je redémarre aux sources mêmes de la course-à-pied, en prenant plaisir. Il ne me faisait plus de plan, je courrais au jour le jour. Je faisais ce que j’avais envie de faire sans me prendre la tête. Avec les contraintes professionnelles ce n’est pas toujours évident à suivre. L’athlétisme devenait contraignant.

Arnaud Michel lors de l’échéance régionale du cross-country à Soissons, il avait terminé quatrième
Cela a duré combien de temps ?

Il y a eu la désillusion sur le cross au Mans le 19 janvier (ndlr : il avait terminé 29ème). Je n’avais pas d’envie, rien ne répondait. La tête n’avait pas envie, le corps a suivi. J’avais l’impression de faire un footing. Je me suis battu à jouer les dernières places individuelles. Cela a été difficile à digérer. J’ai ensuite arrêté une semaine pour souffler. J’ai repris doucement, soixante kilomètres puis quatre-vingt avant de refaire autour de cent kilomètres sans jamais les dépasser depuis.

Premier Tour Interclubs l’an dernier à Tourcoing

En janvier l’idée de courir le marathon s’éloignait. Je me suis dit que ça ne valait pas le coup, que ce n’était pas possible de faire des sorties de trente kilomètres dans cet état là.

La suite de ta saison est-elle décidée ?

L’objectif c’était les championnats de France militaires mais je n’ai rien programmé d’autre sur mon planning pour le moment. Je ne sais pas si je vais faire cette saison sur la piste. Je serai normalement présent sur les deux tours Interclubs sur 3000 mètres mais pour le reste rien n’est planifié.

Propos recueillis par Vincent Guyot

Crédits Photos : Florian Bigotte / Benjamin Fauvergue

Publié par La Rédaction

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